III. Le Wafd soutenu entre autres par Ali Abderraziq :
un combat pour la démocratie représentative
Ali Abderraziq est issu d'une famille de riches
propriétaires terriens, connue pour son engagement en faveur du courant
libéral égyptien. Son père, Hassan Pacha `Abderraziq
était un des fondateurs du parti « `Al `umma », puis un des
chefs historiques du parti des libéraux constitutionnels, crée
après la dissolution du premier. Il comptait parmi les proches du
Muhammad `Abduh et était lié à Lotfi al-Sayyid, autre
grande figure du réformisme de l'époque. Son frère
aîné était un philosophe connu et estimé. Il avait
eu une double formation, traditionnelle et moderne, dans une université
française, et était à l'avant garde de l'élite
intellectuelle de l'époque. Cette élite s'affirmait à
l'époque pour une ouverture et un dialogue avec l'Occident, pour
l'abandon des attitudes traditionnelles et dépassées azhariennes,
pour la raison universelle et la rationalité exigeante, qui semblaient
justement être à l'origine de la puissance et de l'avancement de
l'Occident. Muhammad Abduh, son maître à penser, avait
commencé à avoir une influence réelle au sein de
l'université Al Azhar, et à détacher un important nombre
des ses « docteurs » des méthodes et conceptions
surannées. Un premier clivage est apparu : traditionnalistes et
partisans du renouveau. Incontestablement, les frères Abderraziq
faisaient partie de ces derniers et étaient parmi les plus fervents
partisans du « réformisme islamique ».
Le combat d'Ali Abderraziq à travers son essai tombe
sous le sens, car s'il incrimine le califat comme une institution qui est
devenue tyrannique et autocratique, c'est au nom d'une certaine liberté
d'initiative politique. Les années 1920 sont une incroyable
décennie de foisonnement de la pensée politique et de la
politisation de tous les pans de la société. Les militants
nationalistes pour l'indépendance de l'Egypte sont toujours le moteur de
la vie politique au courant des années 20. La première
constitution de l'Egypte est l'occasion pour eux de fixer les limites de
pouvoir de chaque acteur dans la vie politique. Même si le roi
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garde une certaine hégémonie politique, il est
législativement limité par les deux chambres et la constitution
qui notifie ses pouvoirs. Ali Abderraziq, alors issu d'une famille à la
culture de l'engagement forte, peut réaliser en tant que citoyen mais
aussi en tant que penseur une initiative pour participer au changement de son
pays. Il a d'ailleurs été probablement à l'origine de
l'abandon du califat, bien que les Arabes y aient vu une nouvelle chance de
guidance du monde musulman, guidance religieuse à défaut
d'être civile.
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