B : Les organes spécialisés
Les organes spécialisés sont ceux qui se voient
dotés d'une mission particulière. Pour les analyser, il faut
distinguer ceux qui ont pour mission d'organiser les élections(1) et les
autres(2).
1 : Les organes concernant les
élections
Il s'agit essentiellement des `'commissions électorales
et leurs démembrements d'une part, et l'organe de supervision ou
d'observation d'autre part.
Les commissions électorales sont celles-là qui
sont chargées de conduire le processus électoral. Dans une
atmosphère aussi tumultueuse que celle du contexte de crise, cette
mission dénote d'une difficulté particulière au point de
s'assimiler à une véritable gageure. Pour rendre cette
tâche plus supportable, les accords politiques substituent à
celles en vigueur, des commissions électorales plus aguerries. Aussi,
leur consacrent-ils un ensemble normatif souvent généreux.
Celui-ci est relatif à la composition et aux compétences.
Relativement à la composition, les accords politiques
prévoient une distribution des postes aux partis signataires. Sa
présidence est souvent une question épineuse allant
jusqu'à fragiliser la stabilité de l'entente. Pour y
remédier, des solutions souvent originales et diversifiées sont
expérimentées. La plus intéressante semble sans doute,
celle de la Guinée, lors des élections présidentielles de
2010, qui a consisté à faire appel à un étranger.
Relativement aux compétences, elles sont parfois très larges,
parfois relativement restreintes.
En outre, pour garantir le caractère
démocratique, libre et transparent de l'élection, les accords
politiques instituent parfois un organe d'observation ou de
supervision93, qui dénote en réalité d'une
intervention de l'extérieur dans le processus électoral. C'est le
cas de l'accord de Pretoria qui prévoyait que les résultats des
élections présidentielles de 2010 en Côte d'Ivoire
devraient être soumis à la certification. Nul n'ignore le
rôle qu'a joué cet organe dans le processus ayant conduit Alassane
Ouattara au fauteuil présidentiel.
93 Relativement à cette intervention de
l'extérieur dans le processus électoral, le Professeur Dodzi
KOKOROKO distingue la supervision dont le répondant pratique est la
certification, la vérification qui consiste en la validation de certains
aspects du processus électoral par la mission ; l'organisation et la
conduite des élections et l'observation. Relativement à la
supervision il tient à rappeler que ce mécanisme n'a pas
été prévu pour les Etats indépendants ou du moins
qui jouissent encore de la plénitude de leur souveraineté.
Contribution à l'observation des élections op.cit.,
pp.23-24.
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Par ailleurs, les accords politiques peuvent prévoir
d'autres organes. 2 : Les autres organes
Ces organes sont très divers et multiformes. Ils ont
chacun, une mission particulière.
On peut noter tout d'abord l'organe de réconciliation.
Il jouit d'une nomenclature enviable : Conseil National de
Réconciliation94 au Madagascar, Commission
Vérité Justice et Réconciliation chargée du
`'pardon et réconciliation nationale»95 au Togo.
Pour la révision de la constitution, on peut noter le
comité de révision de la constitution en Sierra Leone
chargé d'examiner les dispositions de la constitution actuelle et
lorsqu'il le jugera nécessaire, le comité recommandera des
révisions et amendements96.
Pour les réfugiés, le point 2.3.2 de l'APG
dispose que « les parties prenantes au dialogue conviennent de la mise
en place d'un comité ad `hoc pour appuyer les efforts du
Haut-Commissariat chargé des Rapatriés et de l'Action humanitaire
dans sa mission d'organisation et de coordination du processus de rapatriement
et de réinsertion des réfugiés et des personnes
déplacées... »97. Dans sa manifestation,
elle a pris le nom de Haut-Commissariat pour les Réfugiés.
Il est donc clair que les accords politiques instaurent des
régimes de fait. Curieusement, malgré ce paysage aussi
ratissé que celui-ci, la constitution (sauf dans de très rares
cas où elle est tout simplement abrogée)98 reste
encore en vigueur. D'où la nécessité d'analyser le sort
qui lui est alors réservé.
94 Point 3.3 de l'accord de Maputo.
95 Point 2.4 de l'APG
96 Art. 10 de l'accord de Lomé
97 Point 2.3.2 de l'APG
98 Le cas de Madagascar ou de la République
Démocratique du Congo
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