Paragraphe II : La mise à l'écart du juge
constitutionnel
La mise à l'écart du juge constitutionnel semble
se justifier par la nature des normes et le domaine des normes applicables (A).
Ce qui justifie sa substitution par un autre organe (B).
A : La nature et le domaine des normes applicables
Quelle est la nature des dispositions contenues dans les
accords politiques ?(1) A quelle situation et institutions s'appliquent-ils ?
Le juge constitutionnel a-t-il sa place dans ce domaine ?(2).
1 : La nature des normes applicables
Les normes applicables sont issues de l'accord politique. Ce
sont donc des normes politiques. Comme telle, le juge constitutionnel est
étranger à ce corpus normatif. Cela justifie par-dessus
tout, son comportement mitigé, et en faisant tantôt des normes
supra constitutionnelles ( cour constitutionnelle béninoise fait du
consensus national issu des conférences nationales, donc acte politique,
un principe immuable et intemporel), tantôt des normes internationales,
comme l'a fait le Conseil Constitutionnel ivoirien, ou peut-être des
normes législatives applicables au contentieux électoral comme ce
fut au Togo en 2007 où la cour constitutionnelle épuise le
contentieux préélectoral selon l'esprit de l'APG. Il
s'égare donc dans ce domaine.
2 : Le domaine des normes applicables
S'il est vrai que le juge s'invite souvent dans les pouvoirs
de crises applicables aux crises ordinaires ou juridiques, les crises qui font
appel aux accords politiques semblent transcender son domaine de
compétence.
148 SALAMI (I.), « le pouvoir constituant
dérivé à l'épreuve la de la justice
constitutionnelle béninoise », RTSJ, p.57, voir aussi,
BRAMI (C.), la hiérarchie des normes constitutionnelle op.cit.,
p.9
149 VEDEL (G.), cité par BOLLE (S.), « Le
contrôle prétorien... » op.cit.p.3
51
En effet, il n'est pas étrange de voir le juge
constitutionnel intervenir dans l'état de siège, l'état
d'urgence ou même la dictature constitutionnelle.
Seulement, il importe d'opérer un distinguo
entre une crise juridique et une crise politique. Pour le Professeur
Martin BLEOU, une crise juridique est celle qui menace les institutions au sein
de l'Etat. On pourrait penser à un conflit de compétences entre
le gouvernement et le parlement, ou entre un administré et une
administration. Une crise politique est par contre celle qui menace le
phénomène du pouvoir lui-même, et qui est de ce fait, en
dehors du juridique. Elle requiert donc des solutions extra juridiques. Il
conclut que les conflits juridiques se résolvent par des
mécanismes juridiques et les conflits politiques par des moyens
politiques150.
Il est donc clair qu'en période de crise ce sont les
accords politiques qui s'appliquent et le juge semble du coup ne rien avoir
à faire dans un monde qui a priori n'est pas le sien. Il ne
saurait donc contrôler la constitutionnalité d'une révision
constitutionnelle initiée par un accord politique. Son rôle de
régulateur du fonctionnement des institutions lui est tout simplement
ravi par le conseil de suivi.
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