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La Cour de Justice de la CEDEAO à  l'épreuve de la protection des Droits de l'Homme

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par Thierno KANE
Université Gaston Berger de Saint- Louis Sénégal - Maitrises en sciences juridiques  2012
  

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Paragraphe 2 : De l'intégrité des juges dans leurs actions

Chargés de promouvoir un véritable espace juridique ouest africain, les juges doivent être dotés de garanties leur permettant de mener à bien leurs missions. L'indépendance (A) et l'impartialité (B) sont les deux mamelles qui concourent à garantir ce sacerdoce.

A. L'indépendance des juges

L'indépendance et l'impartialité sont les deux éléments essentiels de tout procès équitable ainsi que le stipule clairement l'article 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme : « Toute personne a droit, a pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial ». En effet, L'indépendance valorise et consolide le rôle du juge. Elle est selon le dictionnaire Salmon « le fait pour une personne ou une entité de ne dépendre d'aucune autre autorité que la sienne propre »72(*). La juridiction communautaire est à ce titre indépendante car ne dépendant d'aucune autre institution de la Communauté73(*). Corolaire de l'indépendance de la Cour, l'indépendance des juges est consacrée à l'article 3 du Protocole sur la Cour de justice.

Au niveau institutionnel, la juridiction est composée de « sept (7) juges indépendants qui ont juré solennellement d'exercer leurs fonctions et leurs pouvoirs de membres de la Cour de façon honorable et loyale »74(*). Cette garantie d'indépendance n'est pas sans intérêt. Elle permet au juge de statuer en toute liberté. Pour le requérant, la crédibilité de l'institution se trouve assurée en ce sens que les juges ne subissent aucune influence ou pressions extérieures. L'indépendance signifie que les membres de la Haute Juridiction ne sont pas dans un lien de subordination et doivent rendre leur décision en ne subissant aucune influence extérieure. Dans l'affaire, Etim Moses Essien c. la République de Gambie et l'université de Gambie75(*), les deux défenderesses ont dans une curieuse démarche demandé au Président de la Commission de la CEDEAO d'intervenir en leur faveur pour pouvoir interjeter appel de la première décision rendue par la Cour communautaire. Si on sait qu'une telle voie est impossible en l'état actuel de notre droit communautaire, on peut penser que cette initiative vise à soumette l'autorité judiciaire aux ordres de l'autorité politique. Malgré cette complainte, la Cour de céans n'a pas fléchi et est restée fidèle à sa démarche pragmatique consistant à dire le droit sans pour autant froisser la susceptibilité de l'Etat.

L'indépendance est en effet le gage de la crédibilité et de la légitimité auprès des parties et de l'opinion publique. Le juge ne doit pas ainsi accepté d'être dans un deal de compromis ou de compromission. La force du droit doit résister au droit de la force.

Au carrefour de multiples formes d'influence que leur Etat d'origine souhaiterait exercer, on peut dire que les juges sont mis à l'abri (en raison entre autres des privilèges, immunités, incompatibilité de la fonction de juges avec d'autres activités de nature à porter atteinte aux exigencesd'indépendance ou d'impartialité de la profession judiciaire ). Son statut le protège de la malléabilité. En raison de son importance qualitative, la Cour ne doit pas être politisée même si son existence est du fait des Etats. Elle doit faire montre d'un devoir d'ingratitude (Est-il besoin de rappeler que l'heureuse formule est celle de R.BADINTER).

La question de l'indépendance sous l'angle de la nationalité du juge ne semble pas a priori poser problème pour au moins deux raisons évidentes ; Le juge communautaire n'est pas le représentant de son Etat et il n'est pas la continuation de la politique de son Etat par d'autres moyens (heureusement que le principe de la collégialité fait écran à toute velléité de ce genre); il est le grand serviteur exclusif de toute la Communauté.

Dans cette veine, la protection des droits de l'homme se trouve garantie et le saisissant est assuré que sa requête sera traitée avec diligence. Pour que cette exigence soit pleinement remplie, il est nécessaire que le juge soit impartial car un juge peut être indépendant et complètement partial dans son jugement.

* 72 Dictionnaire de droit international public, Op.cit. p.570

* 73Article 15 du Traité de la CEDEAO

* 74 L'article 5 (2) du Protocole sur la Cour de justice

* 75 CJ CEDEAO 29 octobre 2007 Etim Moses Essien c/ République de Gambie et l'Université de Gambie

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