Introduction :
L?objectif primordial de tout enseignement - apprentissage
d?une langue étrangère est d?installer chez l?apprenant des
compétences qui lui permettent de communiquer aussi bien à l?oral
qu?à l?écrit, plutôt que d?acquérir des savoirs
savants. Ainsi, il sera en mesure de produire des énoncés
intelligibles et cohérents dans diverses situations, se donnant la
possibilité, par conséquent, de transmettre et comprendre un
message entre lui et son interlocuteur.
Cela implique aussi la transformation de son savoir à
l?état brut en comportements observables. L?apprenant sera en mesure
donc d?exploiter ses acquis antérieurs en classe afin de surmonter un
obstacle auquel il sera confronté.
L?acquisition des connaissances ne sera pas alors une fin en
soi mais au contraire un moyen permettant la réalisation de l?objectif
terminal de la séquence d?apprentissage. Cela signifie donc le
réinvestissement de ces connaissances.
La plus grande difficulté, pour l?apprenant, se situe
dans le fait qu?il rencontre des difficultés à mettre la langue
au service du discours car il s?est habitué souvent à la
restitution mécanique d?un appris plutôt qu?à son
emploi.
Le réinvestissement de ses acquis, au moment propice,
surtout quand il doit produire des énoncés intelligibles et
cohérents n?est souvent pas assuré, alors que c?est cette action
qui constitue l?enjeu majeur de l?enseignement.
Cependant, si ce réinvestissement n?est souvent pas
réussi, cela trouverait en partie son origine dans la manière
même dont ces acquis ont été assimilés. Nous serions
donc amenés à analyser toute la situation
d?enseignement/-apprentissage avec ses principales composantes, entres autres,
la notion enseignée et la méthode mise en oeuvre.
La grammaire constitue, en effet, un exemple significatif de
cette situation où les connaissances que les élèves ont
de la langue apprise sont rarement mises au service de
l?expression écrite. Le constat est que ces
élèves sont incapables de se servir des règles de
grammaire qu?ils sont pourtant en mesure de restituer par coeur.
Ainsi, la maîtrise de la langue reste indispensable dans le
sens où la méconnaissance des règles de fonctionnement
d?une langue empêche certainement son bon usage.
Or, il faut mettre en évidence qu?une simple
connaissance de la langue ne traduit pas forcément une maîtrise
linguistique.
L?apprenant qui ne fait que mémoriser des
règles, qu?il est incapable d?expliquer et plus
précisément d?appliquer, n?aura aucune chance de réaliser
des messages intelligibles. En effet, nous avons besoin pour cela, en plus de
l?application de règles de grammaire, de la maîtrise d?autres
facteurs, relatifs à l?organisation de tous les discours. En effet, la
réalité des classes, nous révèle que la production
écrite, censée être le point de convergence de tous les
apprentissages, offre à l?enseignant l?occasion d?évaluer le
degré de réalisation des objectifs fixés au départ
et du coup, l?impact de son enseignement sur l?apprenant.
Aussi, ayant choisi de travailler sur des collégiens de
quatrième année moyenne dont le programme est essentiellement
centré sur l?argumentation1, avons-nous pris, à titre
illustratif, un point de langue bien précis dont les apprenants auront
fortement besoin lorsqu?il leur sera demandé, à la fin de la
séquence ou du projet didactique, de réaliser un texte
argumentatif ou à visée argumentative répondant aux
caractéristiques étudiées : il s?agit du rapport de cause.
L?expérience a montré qu?il est moins difficile pour l?apprenant
de relier deux phrases simples en utilisant la conjonction de subordination
parce que ou encore la conjonction de coordination
car que d?employer le méme procédé lors
de la rédaction d?un texte argumentatif par lui-même.
Cela se manifeste souvent soit par le non recours à ce
moyen transformationnel, soit par son emploi erroné. Ce qui nous permet
de parler d?absence de transfert dans la mesure où la notion
étudiée n?est, dans les deux cas, pas mise au service de la
production écrite.
1 Le programme officiel de quatrième année
moyenne met en exergue le verbe « argumenter »,
figurant dans les trois projets didactiques : Projet 01
Argumenter en décrivant, projet 02 Argumenter en racontant, projet 03
Argumenter en expliquant.
Ces mémes apprenants réussissent à
effectuer les opérations nécessaires lorsqu?il ne s?agit que de
phrases isolées, répondant ainsi à des consignes
clairement formulées. Le travail mécanique s?avère
être plus aisé car il relève d?un simple réflexe
conditionné ; contrairement au réinvestissement proprement dit
qui, lui, nécessite plutôt d?effectuer des opérations
cognitives hiérarchisées.
Ainsi, cette situation devrait-elle nous amener à nous
poser des questions sur le type de grammaire qui est enseigné dans le
collège algérien, en nous référant aussi bien
aux
documents officiels (programmes, manuels, documents
d?accompagnement du professeur. .etc.),qu?aux pratiques pédagogiques des
enseignants qu?il sera indispensable d?observer puis d?analyser .Car, s?il est
vrai que la mobilisation des connaissances reste un problème qui ne
concerne pas exclusivement la grammaire mais qui touche à toutes les
autres disciplines enseignées , il n?en demeure pas moins , qu?en classe
de langue , l?apprenant ne saurait progresser sans une reconstruction
permanente de la langue apprise , et sans une réflexion objective sur
celle-ci.
En effet, dans une approche méthodologique qui
privilégie l?appropriation de la langue à des fins
communicatives, la grammaire ne devrait nullement être conçue
comme une activité isolée se suffisant à elle-méme,
mais plutôt comme une phase dans le processus d?acquisition de la langue
qui aboutit à une utilisation adéquate et une reconstruction
personnelle voire autonome c?est ce qui appelé aujourd?hui l?approche
par compétences.
Qu?en est-il alors de l?enseignement/apprentissage de la
grammaire dans les collèges algériens ?
A travers cette étude et comme nous l?avons
déjà mentionné, les éléments sur lesquels
nous comptons fonder notre analyse sont de deux types. Il s?agira dans un
premier temps de documents dans lesquels sont définis et les objectifs
assignés à cette activité et les contenus à
enseigner. Cela nous permettra d?identifier clairement l?approche linguistique
adoptée et les implications didactiques sous jacentes. Les pratiques des
enseignants constituent le second
type, en ce sens que ce qui se fait sur le terrain ne correspond
pas toujours aux finalités et autres intentions
déclarées.
C?est sur la base de cette analyse et en fonction des
résultats auxquels nous aurons abouti, qu?il nous sera possible de
déceler les moments de rupture et les incohérences
méthodologiques qui empéchent le réinvestissement par
l?apprenant de la notion étudiée, en l?occurrence, le rapport de
cause.
Le présent travail s?articule autour de la
problématique suivante :
1- Les apprenants de quatrième année moyenne
réussissent-ils à utiliser correctement le rapport de cause dans
leurs productions écrites quand il s?agit de rédiger un texte
argumentatif ?
2- Dans le cas contraire, pourquoi les collégiens de
quatrième année moyenne n?arrivent-ils pas à
réinvestir le rapport de cause dans leurs expressions écrites
lors de la rédaction d?un texte argumentatif ?
Cela nous pousse à poser d?autres interrogations
liées à la problématique déjà
énoncée, entres autres :
-Dans quelle situation la notion en question (la cause) est-elle
enseignée ?
-Dans quelle séquence du projet didactique s?inscrit-elle
?
-Comment est-elle enseignée ? (La méthode mise en
oeuvre par l?enseignant)
-Quels sont les objectifs spécifiques fixés pour
enseigner cette notion ?
-Quels sont les supports choisis par l?enseignant ? Quelles
relations entretiennent-ils avec l?objectif terminal de communication ?
-Comment les règles régissant la notion de cause
sont-elles déduites ?
-L?apprenant est-il impliqué dans cet acte d?apprentissage
?
-Quels sont les tests évaluatifs qui lui sont soumis
à la fin de la séance (la fin de la leçon) ?
Ce sont, pour l?essentiel, les nombreuses questions auxquelles
nous essayerons de trouver des réponses à travers cette
étude qui se veut être à la fois didactique et
linguistique, dans la
mesure où elle traitera des possibilités
méthodologiques qui favorisent un réinvestissement réussi
d?un point de langue précis.
Pour répondre à cette problématique, nous
avons formulé deux hypothèses qui sont comme suit :
1/-Le point de langue (le rapport de cause) n?est pas
complètement assimilé par l?élève pour qu?il soit
correctement réinvesti.
2/-Le type de grammaire mis en oeuvre ne favorise pas le
réinvestissement de cette notion.
Aussi, notre travail se subdivisera en trois parties
complémentaires :
1/-Une partie théorique dans laquelle nous aborderons les
définitions des concepts relatifs au domaine de transfert et de la
mobilisation des connaissances.
Nous y exposerons également les différentes
approches linguistiques et leur rôle dans l?émergence des courants
en didactique de la grammaire.
2/-Une partie méthodologique réservée
à l?exposé de la démarche à suivre quant au choix
du corpus, et des outils d?analyse à y appliquer.
3/- Une partie pratique ou d?analyse proprement dite. C?est
à l?issue de celle-ci que seront vérifiées les
hypothèses préalablement formulées, et que nous pourrions
envisager de nouvelles pistes méthodologiques afin de combler les
éventuelles insuffisances décelées tout au long du
processus d?apprentissage que nous aurons examiné durant cette esquisse
de recherche.
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