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Les réécritures bibliques dans l'oeuvre de Pascal Quignard

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par Daphné Pulliat
Université Paris IV- Sorbonne - Master II littératures françaises 2008
  

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conclusion : Ç incende quod odorasti È

Ç Il n'y a pas Ç le livre È. Il y eut des livres218. È

Il y a dans les réécritures bibliques une double dimension d'attraction-répulsion par rapport à la source. Les pages de l'Ïuvre de Pascal Quignard sont pleines de cette attraction, de cette attirance presque incontrôlable, presque réßexe vers ce texte. Il est le socle de la culture de l'écrivain. Il est à l'alpha de la littérature. C'est une source inévitable.

En même temps, le travail de réécriture qu'effectue Pascal Quignard constitue un travail de mise à distance, un repositionnement idéologique. Il y a par rapport au dogmatisme biblique une répulsion elle aussi réßexe par moments. Le texte biblique est rejeté en ce qu'il constitue l'origine des religions et donc la source de certains aspects intransigeants de la foi.

Mais l'écriture quignardienne ne se veut pas idéologique. Ce phénomène d'attraction-répulsion se retrouve sur le plan littéraire. Le livre qu'est la Bible exerce une attraction en tant que tel, une attraction littéraire. En tant que tel, en tant que Ç le Livre È, en tant que livre unique, il exerce aussi cette répulsion, ce rejet de l'unique.

218 Petits Traités, op. cit., XVIIème traité, Ç Liber È, Paris, Gallimard, [1990], coll. Folio, 1997, p. 316

Entre ces deux tendances, Pascal Quignard, par le biais de la réécriture, opère un travail de prise en compte et de remise en question.

1 . attraction biblique

Le nombre et la diversité des références à la Bible dont nous avons fait l'examen dans cette étude attestent de l'indéniable attraction exercée par la source biblique sur l'écriture et l'imaginaire de Pascal Quignard. Elle s'explique par des raisons biographiques culturelles, la Bible est le fondement de la culture catholique dans laquelle a été élevé l'écrivain. Elle est à la source de la littérature européenne aussi, de toute la culture judéochrétienne.

source

La Bible attire, intéresse, fascine parfois en tant que source culturelle. Elle est à la clé de la culture européenne et de la littérature en particulier. La Bible, manuscrit le plus copié, premier livre imprimé, livre le plus vendu et le plus lu, reste aujourd'hui le livre commun à toute la culture européenne. A travers les siècles qui Þrent notre humanité, elle a toujours eu un rTMle clé, un rTMle majeur.

Elle a été et reste une source majeure d'inspiration pour la littérature, La Légende dorée, source affectionnée par Pascal Quignard, qui fait le récit de la vie de centaines de saints, en est la première preuve. La place occupée par les épisodes et les personnages bibliques dans l'Ïuvre de Pascal Quignard en est la preuve la plus récente. La Bible est une source majeure de la littérature.

Pour Pascal Quignard elle est, nous l'avons vu, le terreau propice à l'imagination ; à partir de détails l'écrivain glose, invente et crée des histoires, des contes.

origine

Ces histoires et ces contes sont tous dirigés par une question, la question majeure de l'entreprise quignardienne, celle de la recherche des origines. L'écriture de Pascal Quignard est une écriture à reculons, une écriture à rebours, elle se tourne, se retourne, agit par tours et détours. Toujours elle se dirige vers l'avant, l'ante, vers l'origine.

La Bible est à ce titre une source clé. En elle se concentrent des aspects de l'origine du monde, de l'origine de l'homme, de l'origine de la langue, de l'origine de l'écriture, de l'origine de la littérature enÞn.

A cette source, Pascal Quignard puise le matériau le plus large possible, afin de toucher au plus grand nombre d'aspects de l'origine possible. Aussi son attitude par rapport à ce texte-source est diverse. Dans le travail de réécriture, Pascal Quignard adopte des formes différentes, de la citation à la traduction, nous l'avons vu. Elles se font aussi sur différents modes que nous voulons envisager à présent.

L'entreprise de réécriture des textes sacrés, qu'ils soient du canon ou apocryphes, constitue en soi une désacralisation. Nous avons vu dans les réécritures des livres de Jonas et d'Elie que la dimension divine est évacuée au profit de la nature. C'est elle dont la colère doit être apaisée par le sacrifice de Jonas, c'est elle qui venge Elisée dont les enfants du Carmel se sont moqués. Le traitement scientifique de la création, l'acquisition de l'écriture quignardienne aux thèses darwinistes achève de prouver que le divin est évacué, rendu obsolète.

Ainsi la Bible est une source dans la quête de l'origine, mais elle n'est en rien une fin, en rien une réponse. Elle n'est qu'un outil dans l'entreprise de l'écrivain. Elle est utilisée et dépassée.

Le regard de Pascal Quignard est celui d'un lecteur, comme il se définit lui-même, et d'un écrivain. Son entreprise est littéraire, ainsi la Bible est-elle utilisée comme source littéraire, ce qui semble constituer l'étape

supérieure de cette désacralisation. La Bible, non seulement privée de sa dimension divine, est livrée à la lecture des profanes, elle n'est plus un livre de foi mais un objet littéraire. C'est bien ce à quoi semble nous inviter les contes que réécrit Pascal Quignard, à relire la Bible comme un grand recueil d'histoires merveilleuses, avec des héros, des personnages bienveillants, d'autres malveillants, des aventures et de la magie. Une entreprise de la
·cisation en somme.

Car Pascal Quignard remet fortement en question cette source majeure qu'est la Bible. Le texte sacré, si l'écrivain y puise largement, est fortement critiqué, et pas seulement sur des aspects théologiques.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe