2.2. La réforme de la normalisation comptable
En Tunisie, la normalisation comptable est du ressort du
Conseil National de Comptabilité (CNC), institution prévue par
les textes législatifs et chargée de l'élaboration et de
la réforme des normes comptables, sous la tutelle du Ministère
des Finances.
L'adoption des normes IFRS par la Tunisie, constituera une
réforme majeure aux impacts significatifs sur les entreprises et sur
l'économie, qui doit être mise en vigueur dans le cadre d'un
processus progressif, sous le pilotage et la supervision du CNC.
Les principales étapes de ce processus d'adoption des
normes IFRS, peuvent être ventilées en trois grandes phases :
1. Une première phase de réflexion, d'étude
et d'approbation des options à retenir,
2. Une deuxième phase d'accompagnement et de supervision
des entreprises pour l'application de la réforme,
3. Et une dernière phase de mise en place d'un dispositif
de suivi et de participation active aux travaux de l'IASB, et de veille
technique par rapport aux évolutions normatives.
Tout d'abord, et avant de rentrer dans le modalités
détaillées de la mise en application de ce processus, il faut
souligner les limites soulignées par plusieurs experts et institutions
nationales et internationales, de l'organisation et du mode de fonctionnement
actuels du CNC tunisien, et la nécessité de le réformer et
de le moderniser pour lui permettre de répondre au mieux aux objectifs
qui lui sont assignés.
Aujourd'hui, le CNC ne dispose pas d'une structure
adéquate qui lui permet d'assumer pleinement son rôle en
matière de normalisation comptable. A noter que le décret
cité par l'article 5 de la loi n°96- 112 relative au système
comptable des entreprises, relatif à la composition et au mode
d'organisation du CNC n'a été publié qu'en mai
2007401.
401 : Décret n°2007-1096 du 2 mai 2007 relatif
à la fixation de la composition et les règles d'organisation du
Conseil National de la Comptabilité.
Gestion, mesure et communication sur les risques au sein des
établissements de crédit au regard du contexte tunisien et des
standards internationaux
Les principaux travaux réalisés à
aujourd'hui par le CNC correspondent à la conduite de la réforme
comptable de 1996, réalisés en étroite collaboration avec
les cabinets d'expertise comptable. Cette réforme n'a pas
été accompagnée d'exposés sondages, de guides
d'application ou d'interprétations pour aider et accompagner les
entreprises à son application.
Par ailleurs, l'évolution considérable des normes
IFRS depuis la mise en place du système comptable des entreprises en
Tunisie à fin 1996, n'a donné lieu à aucune
révision des NCT.
Le CNC ne disposant pas d'un pouvoir indépendant de
normalisation, de ressources suffisantes de financement, d'une organisation et
d'un mode de fonctionnement bien définis, ne pourra pas répondre
de manière adéquate aux enjeux d'une telle réforme et aux
attentes des acteurs économiques.
Dans son rapport final daté d'octobre
2006402, la Banque Mondiale a recommandé la revue des
objectifs et de l'organisation du Conseil National de Comptabilité et a
estimé que ses ressources étaient très limitées.
Par ailleurs, ce rapport a souligné la nécessité de mettre
en place une structure ayant une capacité suffisante en matière
de ressources intellectuelles, financières et administratives,
permettant d'assurer l'élaboration des normes et leur diffusion d'une
manière continue.
Les principaux travaux à réaliser par le CNC dans
le cadre du processus l'adoption des normes IFRS, seront les suivants :
1. Une première phase de réflexion et
d'étude, dont l'objectif est d'examiner les différentes options
possibles de réforme, leur adéquation avec les
spécificités du contexte et des entreprises tunisiennes, les
éventuelles difficultés de leur mise en application et les
impacts potentiels sur les états financiers des entreprises. Dans ce
cadre, le CNC aura deux grandes options :
· soit la poursuite de la convergence vers les normes
IFRS, entamées par la mise en place du système comptable des
entreprises, à travers une mise à jour des NCT tout en tenant
compte des particularités comptables et fiscales de l'environnement
tunisien.
· soit l'adoption pure et simple du
référentiel IFRS, avec la définition des modalités
à retenir en ce qui concerne la transposition de ces normes dans la
législation tunisienne, les options et les dispositions transitoires
à retenir à chaque évolution normative.
La publication en juillet 2009 par l'IASB d'une norme
comptable spécifique aux PME, peut inciter le normalisateur tunisien
à s'orienter vers la 2ème option. En effet, la
principale critique portée à l'IASB au cours des dernières
années par les pays en voie de développement, est relative
à la complexité des normes IFRS et à la difficulté
de leur mise en application dans un environnement économique
composé en majorité par des PME.
Des consultations avec les différentes parties
prenantes (experts comptables, commissaires aux comptes, universitaires, la
BCT, le CMF, des représentants de sociétés cotées
et de PME, des représentants d'établissements de crédit et
d'assurances, l'administration fiscale...) doivent également être
initiées, pour anticiper les impacts de cette réforme,
définir la démarche à retenir dans le cadre de cette
réforme (application limitée aux entreprises
d'intérêt public dans un premier temps par exemple) et
préparer toutes les conditions nécessaires à la
réussite de sa mise en application.
2. Une deuxième phase d'accompagnement et de
supervision consiste à renforcer le dialogue entre le CNC et les
entreprises, à travers la mise en place de guides d'application des
normes, la publication d'interprétations et la réponse aux
interrogations des entreprises.
Le CNC doit également préparer les entreprises
à cette réforme en multipliant les canaux de communication
(organisation de conférences, de formations, articles de presse...).
402 : Rapport sur le Respect des Normes et Codes (RRNC),
Comptabilité et Audit, établi dans le cadre d'un programme
initié conjointement par la Banque Mondiale et le Fonds Monétaire
International, octobre 2008, page 28.
Gestion, mesure et communication sur les risques au sein
des établissements de crédit au regard du contexte tunisien et
des standards internationaux
3. Une troisième et dernière phase consiste
à mettre en place une structure permanente dédiée au suivi
et à la participation active aux travaux de l'IASB pour assurer une
veille normative, et par conséquent la mise à jour des normes
tunisiennes et la préparation de guides d'application destinés
aux entreprises tunisiennes.
Les établissements de crédit, en tant
qu'acteurs majeurs de l'économie et de son financement, seront au coeur
de ces travaux de réforme et de l'harmonisation comptable
internationale, notamment à travers à leur représentation
au sein du CNC et leur participation aux études d'impacts de l'adoption
d'un nouveau référentiel
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