II.1.2. ENJEUX
OPERATIONNELS
A. ETATS FRAGILES D'AFRIQUE ET
SUPRAETATISME
Un autre obstacle auquel risquent de se heurter les africains
s'ils optent pour la mise en place d'un Etat multinational serait la
fragilité de la plupart des Etats africains postcoloniaux. Cette
fragilité risque d'avoir pour conséquence de faire de l'Etat
multinational un assemblage disparate des Etats faibles alors que la
qualité du tout dépend de celle de ses parties.
Puisque la multination n'implique pas une appropriation par
l'Etat de tous les problèmes locaux, le renforcement des Etats qui vont
la composer apparaît comme une nécessité car tous les
problèmes de proximité n'appelleront pas des interventions de la
multination au risque d'alourdir le système et de le rendre
inefficace.
Ainsi, chaque Etat africain postcolonial devra, avant la mise
en place de l'Etat multinational, avoir atteint un certain degré de
capacité d'auto régulation et une intériorisation
suffisante des principes de droits humains et des libertés
fondamentales.
Qu'en est-il actuellement ? La majorité des Etats
africains est aujourd'hui à ses premières expériences
démocratiques au sortir - le plus souvent - des longs régimes
dictatoriaux ou des sanglantes guerres civiles. D'autres tels que
l'Algérie, le Zimbabwe, le Congo Brazza et récemment encore le
Gabon, continuent à être dirigés de main de maitre par des
dictateurs intransigeants.
Dans d'autres pays plus ou moins démocratiques, la
classe politique au pouvoir n'est souvent pas capable d'anticipation et ne peut
pas résoudre les problèmes urgents qui se posent dans ces pays et
dont la survie des gouvernés dépend.
C'est par exemple le cas de la République
Démocratique du Congo qui est encore à un stade de balbutiement
démocratique, dont l'armée est loin d'être
républicaine, dont le tissu économique est délabré
et dont l'organe judiciaire n'est qu'une étoffe sèche que la
corruption brûle à petit feu.
C'est aussi le cas du Zimbabwe où tout l'espace
politique est verrouillé par un individu qui risquerait tout pour se
consolider au pouvoir.
Que dire de cette Mauritanie ou de cette Guinée
où chaque gradé de l'armée rêve de devenir Chef de
l'Etat un jour quel qu'en soient les moyens ? Ou de l'Algérie et
du Niger où Bouteflika et Tanja n'ont d'autres tâches que de
tailler les constitutions de leurs pays à leurs mesures ? Ou encore
de la jungle Tchadienne où les opposants disparaissent nuits et
jours ?
En sus, faut-il bâtir l'Etat multinational sur les
ruines de l'Etat post colonial ? C'est-à-dire sur la vie
chère, sur le paludisme, sur les changements anticonstitutionnels de
régime, sur les guerres civiles ? Où serait le
progrès dans ce cas ?
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