1.3. Travail sur terrain :
Le cadre proposé est une intervention se
déroulant sur toute la saison (mi-octobre à mi-mars),
comprenant une série d'entretiens individuels en face
à face d'environ 1 heure. Le travail auprès des athlètes
appartenant aux deux groupes s'est effectué dans le bureau de la
psychologue de l'équipe. Il s'agissait d'une série d'entretiens
semi-directifs, suivies d'une séance de passation du TAT et de l'EMS.
Semi directif, car nous avons tenté de laisser au sujet un espace
d'expression à la fois libre mais contrôlé. Nous avons
essayé via la grille d'entretien de Morgues (2004) et les deux tests,
d'apprécier la nature de la motivation subjective et ceci selon deux
critères : Selon l'importance et le retentissement de la motivation
spécifique (intensité et fréquence) et selon la
qualité des interactions des différents processus psychiques dont
son alimentation et sa régulation.
1.4. Outils d'évaluation de la motivation
inconsciente :
Afin de répondre aux objectifs de notre recherche, nous
avons eu recours à deux outils d'évaluation et à une
grille d'entretien semi-directif ; Il s'agit du TAT, de l'EMS, et de la
grille de Moragues ( Vu que nous allons nous baser sur l'interprétation
uniquement qualitative du TAT). Avant de les décrire, il serait
préférable de justifier les raisons pour lesquelles nous avons
opté pour ces outils d'évaluation.
1.4.1. Justification du choix de
l'outil :
Le test d'Appréciation
thématique (TAT), est l'un des outils projectifs les plus
populaires permettant au mieux d'étudier les motifs inconscients. Sa
passation et son analyse comme l'a bien indiqué Moragues (1997), lors de
l'évaluation des motivations des candidats d'admission au centre
national de Volley Ball de Montpellier, permet de repérer les
inhibitions et les blocages majeurs. Les éléments de ce test
sont surtout utilisés en vue de mesurer l'écart pouvant exister
entre les rationalisations des discours conscients et la nature conflictuelle
des projections inconscientes. Le plus important, c'est que le TAT sollicite
différents registres de représentations de relations (relation
d'objet), dans un contexte d'investissement objectal et/ou narcissique, ainsi
qu'une représentation de soi selon les axes d'identité et
d'identification (Moragues 2004).
Le stimulus TAT est caractéristique des épreuves
projectives. Figuratif et ambigu il permet une analyse à la fois
objective de type perceptif et une interprétation subjective mettant en
jeu des associations d'ordre projectif en lien avec les sollicitations latentes
du contenu des planches. En construisant l'histoire, le sujet démontre
sa capacité à appréhender l'objet dans sa double vision
objective/perceptive et subjective/projective et donc à indiquer ses
capacités de reconnaissance d'un dedans et d'un dehors et d'un espace
psychique interne. (Fernandez, 2006). Shentoub et al (1998), affirment que le
discours TAT n'est ni pure rêverie, ni produit cognitif mais
plutôt un témoignage des relations intrapsychiques : il s'agit
d'une compénétration de la dimension fantasmatique et des
exigences de la réalité, traduisant ainsi une épreuve de
créativité. Il s'agit en effet de l'évaluation de la
qualité de l'intégration des opérations défensives
: ni trop rigide, ni trop coupé de l'imaginaire, ni trop fantasque,
débordé par les processus primaires et accompagné d'un
enrichissement conjoint entre processus conscient et inconscient. Le discours
TAT traduit un mode de résolution du conflit entre fantasme et
réalité. (Shentoub et al, 1998). Selon le même auteur, un
fonctionnement psychique souple et mature produit des histoires
structurées avec une résonance fantasmatique, autrement dit, des
histoires qui répondent à la consigne (en relation avec le
contenu manifeste) mais qui portent, en même temps, la marque de la
singularité du sujet (sollicitations latentes). Tandis qu'un
fonctionnement peu souple produit une histoire envahie par le processus
primaire (affects et représentations inconscients), mal
structurée, incohérente ou une parfois une histoire sèche,
contrôlée et sans affects. (Fernandez, 2006).
Cependant, à la différence de la majorité
des tests psychométriques, le TAT (et autres tests projectifs), n'est
pas utilisé d'une manière univoque. D'un point de vue
psychométrique, plusieurs faiblesses méthodologiques peuvent
apparaître: pas de méthode standardisée d'administration,
pas de méthode objective standardisée de cotation des
réponses et pas de cotations chiffrées permettant une
représentation. Le clinicien dépend de ses propres normes
subjectives basées sur son expérience professionnelle
personnelle. Pour cette raison, nous avons tenu à appuyer cette
évaluation qualitative par une autre quantitative et dotée d'une
validité psychométrique. Il s'agit de l'EMS 28.
L'échelle de motivation dans le sport
(EMS 28), est un test psychotechnique qui permet l'évaluation du
degré de la motivation du sujet sportif et plus
précisément l'évaluation des différentes (1)
Stratégies motivationnelles ; comme les pensées et les
comportements qui aident le sportif à négocier les
conséquences affectives de la situation sportive sont surtout en rapport
avec l'estime de soi du pratiquant. (2) Stratégies au service de la
valorisation de soi (besoin de se percevoir favorablement: se produire en
public, compétitionner). (3) Stratégies au service du
perfectionnement du soi (s'approcher de ce que l'on aimerait être:
s'investir, progresser, apprendre, modifier ses comportements). (4)
Stratégies au service de la connaissance de soi (la difficulté de
la tâche m'informe sur mes habiletés: besoin d'évaluer mes
habiletés) (Chevalier, 2003).
L'EMS 28 est souvent utilisé en raison de ses
propriétés psychométriques solides et ses coefficients de
fiabilité élevés. La consistance interne de l'ensemble de
cette échelle est supérieure à .75. Les études
montrent également que l'indice d'autodétermination
motivationnelle aux 3 formes de motivations intrinsèques et à la
motivation extrinsèque identifiée ont été
attribués les poids respectivement de +2 et +1, aux formes de
motivations extrinsèque introjectée et externe, le poids de -1.
Les études montrent également que les différents items de
l'échelle EMS 28 sont intiment liés à une observation
clinique, renforcement encore plus sa validité de mesure. (Laurin et al,
2008).
1.4.2. Contexte théorique du TAT et de l'EMS
28 :
C'est en 1935, aux Etats-Unis, que HENRI MURRAY a mis au point
le Thematic Apperception Test (T.A.T.). En 1943, la version définitive
fut publiée et composée de 31 planches. Autour des années
1970, les critiques concernant les tests projectifs, dues au manque de
méthodologie efficace et objective, se multipliaient. A la même
époque, VICA SHENTOUB (1970-1971) a essayé de dégager les
mécanismes en jeu ainsi qu'une méthodologie efficace. C'est
grâce à ses travaux et à ceux de ses collègues,
à l'École Française de 1955 à 1974, que les voies
de la codification du T.A.T. lui ont été tracées. Ceci a
donné lieu à la rédaction du «Manuel d'utilisation du
Thematic Apperception Test (Approche psychanalytique)» en 1990, sur lequel
nous nous sommes basés pour la cotation et l'interprétation de
nos protocoles de recherche. SHENTOUB (1987) retient ainsi seize planches des
trente, qu'elle juge les plus pertinentes et les plus significatives - et
réduit le temps de passation à une séance (qu'à
deux). (Fernandez, 2006).
Nous avons choisi le mode de passation et d'analyse du T.A.T.
proposé par VICA SHENTOUB ET COLL. (1990), car ils utilisent le test
dans une perspective de psychologie clinique et dynamique.
L'EMS 28, par contre, représente une des multiples
échelles de motivation construites par le laboratoire de recherche sur
le comportement sociale. Cet outil d'évaluation a été mit
en place au Canada, à partir de 1995 par, Brière, Vallerand,
Blais et Pelletier. Au cours des années, de nombreuses recherches ont
été menées, entre autres sur : la motivation
intrinsèque et extrinsèque; le rôle des théories
motivationnelles dans la compréhension de la participation sportive. Le
LRCS effectue jusqu'à aujourd'hui plusieurs recherches sur le
thème de la passion amoureuse envers l'activité sportive.
1.4.3. Description des outils :
a. Le Thematic Apperception Test (T.A.T.):
Planches représentant des conflits universels : avec un
contenu manifeste (scènes plus ou moins ambiguës) et un contenu
latent susceptibles de réveiller certaines problématiques. Sur 31
planches sont retenues les plus pertinentes : 1 ; 2 ;3 BM ; 4 ; 5
(proposées aux garçons et filles, hommes et femmes) ; 6 BM et 7
BM ; 8BM (proposées aux garçons et aux hommes) ; 6 GF et 7 GF ;
9GF (proposées aux filles et aux femmes) ;10 ; 11 ;12 BG ; 13 B ; 13 MF
; 19 et 16 (proposées aux garçons et aux filles (sauf 13 MF), aux
hommes et aux femmes). Certaines planches sont communes à tous les
sujets. D'autres sont particulières aux enfants ou aux adultes, à
l'un ou à l'autre sexe. Les initiales anglaises imprimées
derrière chaque planche, en précisent la destination : B : boy
(garçon) ; G : girl (fillette jusqu'à 14 ans) ; M : male (homme)
; F femelle (femme). Les planches sont constituées par des dessins, des
photographies, des reproductions de tableaux ou de gravures. Leur signification
est ambiguë. 12 planches représentent un être humain seul
à divers âges, les deux sexes étant également
représentés. 7 planches représentent deux personnages du
même sexe. 4 planches représentent deux personnages de sexe
différent. 1 planche représente trois personnages (deux femmes et
un homme), 1 planche représente plusieurs hommes ensemble. 2 planches
représentent un jeune homme ou une jeune fille évoquant ou
contemplant une scène à plusieurs personnages. 3 planches
représentent des paysages plus ou moins fantastiques sans êtres
humains. 1 planche est complètement blanche (elle favoriserait la
projection de l'image idéale que le sujet se fait de lui même).
Les planches s'administrent en une seule fois pour V. Shentoub. L'ordre de
passation des planches doit être respecté car le stimulus
évolue du plus structuré et figuratif (personnages sexués)
au plus ambigu (Fernandez, 2006).
· La consigne : Formulée
par Shentoub (1990), elle est énoncée une seule fois avant la
présentation de la première planche : «Imaginez une
histoire à partir de la planche». L'athlète est alors
invité à raconter librement une histoire sur chaque planche. Mais
lors de la planche 16 (carte blanche), et suite à son caractère
insolite, une nouvelle consigne est formulée : «Jusqu'à
présent, je vous ai montré des images qui représentaient
des personnages ou des paysages, maintenant je vous propose cette
planche qui est la dernière : vous pourrez me raconter
l'histoire que vous voudrez». Nous avons essayé durant la
passation d'être neutres, mais parfois nous nous somme sentie
menés à intervenir face à un sujet très
inhibé pour le soutenir tout en prenant en considération comment
cette intervention pouvait être vécue par l'athlète
(intrusion, renforcement des défenses, désorganisation...) et
tout en évitant tout type de suggestion et des jugements de valeur
(Shentoub, 1990)
· Durée de passation :
La passation est individuelle et se réduit à une
séance de 45 mn à 60mn et parfois plus, en fonction de la
souplesse ou des inhibitions au niveau du discours des athlètes.
· Dépouillement et Cotation :
Il s'agit (1) d'une évaluation de la lisibilité du
contenu (2) d'une analyse des récits planche par planche et de son
décryptage à l'aide d'une feuille de dépouillement et un
repérage de la problématique du sujet. (3) d'une Synthèse
des informations recueillies en regroupement sur la feuille de
dépouillement les différents procédés pour
apprécier la qualité du processus associatif en tenant compte des
relations entre affects, représentations et mécanismes de
défense. (4) d'un dégagement des modalités de
fonctionnement psychique : registres conflictuels, modalités
défensives ; propositions d'hypothèses concernant l'organisation
psychique du sujet ; et enfin (5) d'un regroupement des
procédés sur la feuille de dépouillement nous permettant
l'évaluation de la diversité des procédés
utilisés sur l'ensemble du protocole. Il nous facilite
l'appréciation de l'organisation défensive
privilégiée au sein du fonctionnement psychique. Ainsi remplir
cette feuille nous requiert une démarche à la fois quantitative
et qualitative.
b. L'Echelle de Motivation dans le Sport (EMS 28) :
L'Echelle de Motivation dans les Sports (EMS) de
Brière, Vallerand, Blais et Pelletier (1995) mesure les niveaux de
motivation intrinsèque et de motivation extrinsèque. Pour Deci
& Ryan (1985), ces deux types de motivation répondent aux deux
extrêmes d'un continuum d'autodétermination. Dans l'EMS de
Brière et al. (1995), ce continuum d'autodétermination est
représenté par sept sous-échelles. Trois de ces
sous-échelles ont trait à la motivation intrinsèque, trois
autres à la motivation extrinsèque et une dernière, en
marge du continuum, mesure l'absence totale de motivation
dénommée "amotivation". On y retrouve ainsi 28 items, soit 4
items pour chacune des 7 sous échelles. Ces 28 items reflétent
différentes raisons de pratiquer son sport favori (Vallerand et
al, 1995)
Motivation intrinsèque à la
connaissance : items 1, 11, 17, 24
Motivation intrinsèque à
l'accomplissement : items 5, 10, 15, 22
Motivation intrinsèque à la
stimulation : items 7, 12, 19, 26
Motivation extrinsèque
-identifiée : items 3, 9, 18, 25
Motivation extrinsèque
-introjectée : items 6, 13, 21, 27
Motivation extrinsèque- régulation
externe : items 2, 8, 16, 23
Amotivation : items 4, 14, 20, 28
· Durée de passation :
Vu que la passation a été orale, la durée s'est
étendue entre 20 et 30 minutes.
· Cotation : Chaque item est
suivi d'une échelle de type Likert allant de 1 ("ne correspond pas du
tout") à 7 ("correspond très fortement") sur laquelle le
participant peut juger le degré de correspondance entre l'item et ses
raisons de pratiquer. Ainsi nous avons 7 choix :
L'addition des scores varient de 1 à 175. Ce score est
d'autant plus élevé que le degré de motivation est plus
important. L'EMS 28 établit un score final se rapportant au type de
motivation ainsi qu'à un certain nombre de profils motivationnels
liés aux trois catégories de motivation.
Les notes brutes sont transformés en note Z où
pour chaque catégorie, faire le total et diviser par le nombre d'items :
4.
· Courbe d'échelle
motivationnelle : Vu que nous ne travaillons que sur les deux
premiers types de motivation (intrinsèque et extrinsèque), la
courbe ou le profil de l'athlète se limitera à ces
modalités visées.
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