PARTIE I
L'aménagement des droits du patient soigné
sous
contrainte
Les patients disposent désormais de droits issus de la
loi du 4 mars 2002. Mais pour certains d'entre eux, ces droits n'ont que peu
d'effectivité en raison de la particularité de leur
pathologie.
On ne peut prétendre appliquer à la lettre la
loi Kouchner de 2002 au patient psychiatrique, parce qu'elle ne lui garantirait
pas une protection effective. En effet, dans ce texte, priorité est
donnée à l'information et au consentement du malade ; mais
demander son consentement à un patient qui n'est pas capable de
l'exprimer valablement reviendrait à nier son état de
vulnérabilité et à ne pas lui apporter la protection
particulière dont il a besoin.
Ainsi, l'information qui est donnée aux patients
soignés en psychiatrie est ajustée à leur état de
santé (Section I). Tel est le cas dans la
situation où le malade n'est pas apte à recevoir l'information
parce que son discernement est altéré.
De manière générale, l'objectif de
l'information est de permettre au patient de comprendre son état de
santé ainsi que les soins proposés afin qu'il puisse y
consentir.
La contrainte en psychiatrie n'est en effet acceptable que si
l'on a vainement tenté d'informer la personne pour recueillir son
consentement, et si son refus ou son silence résultant de sa maladie est
susceptible de le mettre en danger. On comprend bien que lorsque le malade ne
dispose pas de toutes ses facultés mentales, son consentement est lui
aussi sujet à un aménagement indispensable (Section
II).
Section I. L'ajustement de l'information du patient en
psychiatrie
L'obligation d'information du médecin est non seulement
une obligation professionnelle posée par le Code de déontologie
médicale, mais également un devoir légal.
Il s'agit d'une obligation très large qui a fait
l'objet de nombreuses décisions jurisprudentielles. L'information doit
porter tant sur le diagnostic et la maladie dont est atteint le patient, que
sur les traitements et soins envisagés ainsi que sur leurs risques.
Depuis la loi Kouchner, l'obligation d'information du
médecin à son patient s'est déployée pour devenir
un droit fondamental du patient (A) à laquelle
on ne peut déroger que dans des cas très précis, notamment
en psychiatrie (B).
A -- Le droit fondamental a l'information
L'information est un droit affirmé dans de nombreux
textes, nationaux et internationaux : elle est consacrée notamment dans
la déclaration des droits des patients en Europe, la Convention de
bioéthique du Conseil de l'Europe, le Code de déontologie
médicale et le Code de la santé publique.
Au fil du temps, l'information médicale est devenue un
droit fondamental auquel on ne peut déroger que dans de rares cas. Il
s'agit donc d'un principe général applicable dans toute relation
médicale (1) et certains patients, tels que
les personnes hospitalisées sous contrainte, bénéficient
d'ailleurs d'une information particulière
(~).
1) Le principe de l'obligation d'information
L'obligation d'information est prévue par l'article
L.1111-2 du Code de la santé publique : « toute personne a le droit
d'être informée sur son état de santé ».
Cette information est très large puisqu'elle «
porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de
prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence
éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou
graves normalement prévisibles qu'ils comportent ». Il
résulte de cet article que le patient est devenu un véritable
coauteur des décisions concernant son état de santé,
grâce à son droit à l'information qui lui permet de
comprendre sa pathologie et de connaitre les thérapeutiques
possibles.
L'information est donnée au patient dans le cadre d'une
relation de soins et de confiance entre le médecin et son patient. Elle
prend la forme de renseignements, d'appréciations ou de réponses
à des interrogations.
Il résulte de l'article 35 du Code de déontologie
médicale que l'information doit être donnée de
manière « loyale, claire et appropriée ».
L'exigence de loyauté induit que le médecin doit
donner l'information dans l'intérêt exclusif du patient ; elle ne
doit pas être volontairement orientée par incitation,
dissimulation ou mensonge.
De même, l'information doit être claire,
c'est-à-dire intelligible pour le patient. Le médecin ne doit pas
utiliser de termes techniques en informant un patient qui n'est pas capable de
les comprendre. L'information donnée dans un langage trop complexe
équivaut à une absence d'information car l'enjeu est la
compréhension du patient.
Enfin, et c'est ce qui nous intéresse plus
particulièrement, le médecin doit apprécier les
facultés de compréhension de son patient et tenir compte de sa
personnalité pour lui communiquer une information adaptée.
Il devra notamment informer le mineur et le majeur sous tutelle
de manière adaptée à leur degré de maturité
ou à leurs facultés de discernement.
Il en est de même pour le patient soigné sous
contrainte qui recevra une information adaptée à ses
facultés mentales.
En raison de la contrainte qu'il subit, celui-ci recevra
même une information spécifique et renforcée.
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