3.3. Axe d'interprétation lié à la
deuxième question de recherche
Notre second axe d'interprétation s'appuie sur la
deuxième question spécifique ainsi
formulée:«Comment les acteurs et les
bénéficiaires de ces écoles apprécient-ils l'offre
d'éducation de l'AMA?»
La contribution de l'AMA donne satisfaction aux acteurs sur
plusieurs plans. En effet l'AMA à travers ses programmes et par rapport
à l'importance de ses investissements est une expérience unique
dans le milieu musulman au Burkina. Son apport à l'offre
éducative national est substantiel et participe de la diversification
des sources éducatives. Aussi. Les autorités perçoivent
cette initiative positivement car elle réduit les limites de
l'éducation publique en matière d'éducation pour tous. Il
y a aussi que l'école musulmane de façon générale a
très souvent posé des problèmes à l'Etat. Les
écoles de l'AMA participent à redorer l'image de l'enseignement
islamique qui jusque là éprouve des difficultés à
allier la quantité des structures à la qualité de leurs
produits. Les acteurs en sont conscients et vont au-
delà de l'apport présent pour envisager le futur
en terme de changement. En effet, les actions posées par l'ONG peuvent
susciter une nouvelle vision de l'école par la communauté
musulmane du Burkina.
Les autorités semblent avoir compris l'importance de
l'enjeu et veulent que les écoles de l'AMA servent d'exemples. Par
contre les dirigeants de l'AMA, auront besoin d'être sensibilisés
sur le nouveau rôle de précurseur dans ce domaine porteur
d'avenir.
Mais à voir de près, l'espoir que suscite l'AMA est
soumis à des contraintes réelles relevées par les acteurs
et que nous interprétons dans le dernier axe.
3.4. Axe d'interprétation lié à la
troisième question de recherche
Ce point se fonde sur la troisième question
spécifique à savoir: «Comment se présentent les
difficultés que rencontrent les acteurs?»
La première grande difficulté qui a retenu notre
attention c'est la trop grande distance qui sépare les différents
acteurs. À l'image des donateurs qui apportent leur argent mais en
restant loin des réalités locales, tous les premiers responsables
et les chefs de centres au Burkina sont des expatriés. Entre ces
responsables et la grande masse des travailleurs n'existe aucune exigence de
redevabilité. Les principes d'intervention du siège et ses
méthodes ne cadrent pas nécessairement avec les
réalités du terrain. Aussi, certains responsables très
fermes traduisent ces principes par une gestion bureaucratique avec un manque
de relations horizontales, un déficit de communication entre plusieurs
acteurs de l'ONG. En réalité, ces faits traduisent les
compétences limitées de certains responsables en gestion qui se
contentent d'exécuter sans prendre des initiatives. Dans les
écoles et les autres structures, les travailleurs et les
bénéficiaires n'ont pas la possibilité d'échanger
avec les responsables. Comment peuton s'imaginer assurer une bonne
fonctionnalité à une organisation complexe si tous les acteurs ne
sont pas impliqués dans les décisions et les recherches de
solutions aux difficultés de l'organisation? Les responsables de l'AMA
doivent donc faire leur ce principe du systémisme qui préconise
que lorsqu' une situation pose problème, il est pertinent dans sa
résolution de construire un schéma relationnel intégrant
les flux, les diverses causalités multiples et les rétroactions.
Cette démarche inclut nécessairement l'autorité en charge
du système global représentée ici par les responsables du
MEBA. Avec eux, l'étude a révélé que le
déficit de communication n'est pas toujours imputable à l'ONG. En
effet la lenteur que l'administration publique observe souvent dans les
réponses à donner aux requêtes des ONG peut être
source d'incompréhension. En exemple, le MEBA dans la recherche d'une
meilleure formule n'a pas
répondu à la demande d'accord de collaboration
de l'AMA. L'AMA qui ignore la raison conclut à un refus. Il se trouve
pendant ce temps que les nouveaux dirigeants de l'ONG n'avaient pas reconduit
l'appui ponctuel dont bénéficiaient les services de la DEB
privée. Conséquence, l'autorité soupçonne une
protestation sans qu'il y ait eu de communication entre les deux
partenaires.
Toujours au plan des faiblesses administratives existe la
question de la langue arabe. Son enseignement bien que faisant partie des
objectifs de l'école selon les proportions qui lui sont
réservées n'est soumis à aucune contrainte administrative.
Il est assuré par des enseignants qui ne sont pas suffisamment
formés en pédagogie, ce qui pose un problème de suivi,
surtout que tous les directeurs ne sont pas qualifiés pour le suivi. A
cela, il faut ajouter la rupture avec le système qui s'installe à
partir du CM2 à cause des possibilités très
limitées des élèves d'avoir une école secondaire
appliquant les mémes programmes. Il est donc à craindre que des
parents qui attendaient donner une double instruction à leurs enfants ne
finissent par déchanter.
A cela s'ajoute les problèmes non moins cruciaux des
salaires et de manque de formation surtout en ce qui concerne les directeurs.
Par rapport aux salaires, nous déduisons des analyses, que le
problème se pose plus en terme d'équité dans le traitement
des travailleurs que par rapport à l'importance des sommes
perçues. En effet lorsque les enseignants disent qu'ils sont mal
payés, ils ne font généralement pas de comparaison avec
les enseignants du public qui ne sont pas forcement mieux traités, ils
font le lien avec le salaire dû aux autres travailleurs de l'AMA
(gardiens, chauffeurs~):«les enseignants sont les plus mal
payés à l'AMA» ont affirmé nombre d'entre
eux.
Tous ces problèmes et difficultés
évoquées font courir des risques à l'ONG dans son
fonctionnement. Le manque de communication par exemple peut engendrer des
suspicions et méme des conflits entre les acteurs. Toute chose qui peut
être préjudiciable à l'image de l'ONG. La mauvaise
administration des structures, notamment des écoles peut entraîner
la suspension de certaines initiatives salutaires pour l'éducation
nationale.
Il y a donc lieu pour l'ONG de mettre sur pied un
système de gestion efficace, à la hauteur de ses ambitions et de
sa notoriété. C'est du reste pour apporter notre contribution
à un tel projet que nous consacrons les lignes suivantes aux
suggestions.
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