3.2. Axe d'interprétation lié à la
première question de recherche
Notre première question spécifique de recherche a
été ainsi formulée: « Comment fonctionnent les
écoles de l'AMA?»
Le constat qui se dégage des données recueillies
auprès des participants est que l'AMA au Burkina a voulu proposer aux
populations une école musulmane qui facilite à terme
l'intégration sociale et économique des sortants. Cette
école calquée sur le modèle nationale utilise le
français comme langue d'enseignement en y ajoutant une initiation
à la langue arabe, pour maintenir le gout des enfants à
l'apprentissage de cette langue, dans un pays ou son enseignement exclusif
à des milliers d'enfants n'a pas amélioré leurs conditions
de vie. Cette vision nous parait assez positive en ce sens qu'elle traduit la
volonté de l'organisation à tenir compte dans ses interventions
de l'environnement dans lequel il évolue. C'est du reste ce que
préconise la théorie des systèmes. L'école de l'AMA
va donc chercher à s'intégrer dans le système qui
l'inclut, l'éducation nationale tout en gardant ses
spécificités d'école confessionnelle musulmane. Et dans ce
contexte Burkinabé, elle peut constituer le point de départ d'une
école musulmane soucieuse de s'adapter aux réalités du
milieu. De ce point de vue, l'initiative a prouvé ses capacités
et est en passe de s'inscrire dans les innovations réussies en
matière d'éducation au Burkina. Les écoles de l'AMA sont
en outre destinées à accompagner l'Etat dans la scolarisation des
enfants en donnant la possibilité aux parents de scolariser leurs
enfants à moindre coût. Ces ambitions affichées se
traduisent par des faits perceptibles à plusieurs niveaux. Les
écoles sont ouvertes à toutes les populations sans distinction et
leur nombre va en croissant; les conditions d'accès incluant les frais
de scolarité sont accessibles au plus grand nombre. Les tendances
indiquent méme qu'avec une bonne reforme dans l'affectation des
ressources, l'ONG pourrait se passer des frais de scolarité; les
résultats scolaires sont appréciables et les écoles
rivalisent même quelques fois avec les meilleures écoles
publiques, ce qui suscite une satisfaction des parents. Aussi bien dans les
centres, que dans la structuration méme de l'ONG, la multiplicité
des services et la diversité des missions témoignent de la
complexité de l'AMA. D'où la nécessité pour elle de
s'approprier les principes de gestion de l'approche systémique qui
magnifient l'intercommunication, l'interaction et l'interdépendance qui
ne sont pas suffisamment perceptibles dans les rapports de ses responsables
avec les acteurs de terrain.
En effet sur le plan administratif, il est ressorti des
entretiens que les écoles manquent de coordination centrale à
méme d'assurer un suivi efficace et une uniformité des pratiques.
Par conséquent chaque école se présente comme une
entité isolée, ignorant l'existence des autres
alors qu'elles appartiennent à une méme
structure. On note aussi que ni les directeurs ni les enseignants ne sont
suffisamment formés pour devenir des partenaires actifs de l'ONG. Et
cela se laisse constater à travers le mauvais traitement des archives,
les difficultés qu'ont les directeurs à apporter une assistance
pédagogique aux maîtres. A cela s'ajoute le fait que les
enseignants affirment gagner difficilement leur vie avec les salaires qu'ils
reçoivent. Ce qui du reste explique les démissions massives.
. Par ailleurs on peut affirmer que entre les résultats
satisfaisants engrangés et le
manque de qualification des enseignants et leur insatisfaction
vis-à-vis des salaires, il y a un contraste que les encadreurs
pédagogiques mentionnent et redoutent. Ces derniers craignent de voir
les résultats chuter par un effritement progressif de la conscience
individuelle et collective des enseignants. Mais au-delà de ces
inquiétudes qui se justifient dans leur contexte, nous pensons que si
nous soumettons la situation à la théorie des relations humaines,
ces résultats satisfaisants peuvent s'expliquer par le fort sentiment
d'appartenance cultivé et entretenu par la majorité des
enseignants.
On peut donc dire que les écoles se
caractérisent d'une part, par une parfaite intégration au
système éducatif national, matérialisée par un
respect strict des contenus et programmes d'enseignement et soutenu par un fort
sentiment d'appartenance des enseignants et qui justifie en partie les bons
résultats. Mais d'autre part par un déficit organisationnel
suffisamment grave pour relativiser la satisfaction des acteurs et des
bénéficiaires.
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