Conclusion :
Cette partie a permis de préciser la réalité
du contexte réunionnais en matière d'habitat.
L'intérêt était de replacer la défiscalisation dans
ce contexte. Effectivement, la défiscalisation apparait comme un moyen
d'alimenter deux segments du marché, l'accession privé et le
locatif privé. Dans ce sens, la défiscalisation a en partie
répondu { ses objectifs.
Toutefois, comme l'a montré cette partie, les besoins
s'orientent davantage vers le logement social étant donné les
caractéristiques économiques et sociales de la population. Or,
les premiers dispositifs de défiscalisation n'étaient pas
prévus pour s'orienter vers du logement social bien que les besoins
soient si importants.
La question qui se pose est relative aux limites d'une telle
politique. Nous l'avons vu, elle entraine des effets pervers. En effet,
contrairement au logement social qui est lié { une décision de
l'Etat, la défiscalisation fonctionne de manière libre sur le
marché.
A cela s'ajoute le fait que la défiscalisation ne
recouvre pas uniquement un enjeu en termes de production de logement mais aussi
et surtout un enjeu économique majeur pour l'ile. A ce titre, le risque
est que cette diversité d'enjeux puissent nuire { l'efficience de
l'action en matière de logement tant la question de l'emploi est
également majeure { la Réunion.
Il est par conséquent important de considérer
l'exposé suivant comme traitant d'une politique qui n'a pas comme seul
objet la question de l'habitat et du logement mais qui renvoie a des enjeux
plus larges.
51 Homme politique réunionnais qui a été
membre du conseil général et régional, maire du Tampon et
député.
52 Assemblée nationale - séance du 31 octobre 1997,
compte rendu intégral, p 17
PARTIE 2:
DU LOCATIF INTERMEDIAIRE AU LOCATIF SOCIAL: LOGER LES REUNIONNAIS
LES MOINS SOLVABLES
La question du logement { la Réunion relève
d'enjeux sociaux primordiaux. Il s'agit d'offrir { tous dans un contexte
économique difficile la possibilité de se loger dignement.
L'offre locative joue { cet effet un rôle primordial. En effet, dans le
parc locatif social sont accueillies les personnes les plus démunies
tandis que le parc privé lui joue un rôle essentiel pour assurer
à la fois la mobilité des ménages et constituer une
étape clé dans leur parcours résidentiel.
Ces dernières années, nous avons assisté
à un accroissement considérable de l'offre locative portée
par le secteur privé. Cela est le résultat de nouvelles
incitations fiscales qui ont su mieux que par le passé attirer les
investisseurs. Dans le même temps, la production de logements sociaux a
considérablement ralenti. En cause, différents facteurs qui ont
conduit à entrainer de grandes difficultés pour les bailleurs
sociaux. Les besoins des réunionnais en matière de logements
sociaux sont pourtant considérables. C'est donc la pertinence de l'offre
locative développée ces dernières années qui est {
interroger au regard des besoins de la population.
Nous tenterons de montrer dans cette partie dans quelle mesure
l'accroissement du parc locatif qu'il soit intermédiaire ou social a
permis d'apporter ou pas des réponses aux besoins de la population. Pour
cela, nous reviendrons sur l'offre produite grâce à la
défiscalisation Girardin, puis sur la production de logements sociaux
pendant cette même période pour enfin nous questionner sur la
pertinence de la défiscalisation au regard des besoins réels de
la population réunionnaise.
I) PRODUIRE DU LOCATIF INTERMEDIAIRE GRACE A LA
DEFISCALISATION : UNE REUSSITE ?
Depuis 1986, la Réunion a vu se mettre en place une
succession de dispositifs redéfinissant chaque fois les modalités
de défiscalisation des investissements immobiliers. Nous avons
présenté les premiers dispositifs et l'offre en logement qui en a
découlé. Toutefois, l'objet de ce mémoire est
d'étudier plus précisément la période qui va de
2003 jusqu'{ nos jours.
C'est en effet en 2003 qu'a été mise en place la
loi Girardin sur la défiscalisation des investissements en outre-mer.
Cette loi marque un tournant dans l'histoire des dispositifs d'incitation
fiscale { la fois dans tous les territoires concernés et plus
particulièrement { la Réunion parce qu'elle a entrainé un
volume de production de logement qui n'avait jamais été atteint
auparavant.
La production de logements destinés à la
location privée a été redynamisée alors même
que ce secteur ne constituait pas un marché très
développé sur l'ile. Nous allons voir ce que le succès de
ce dispositif a induit en termes de réponse aux besoins en logements
d'une des catégories visées par ce dispositif: les ménages
intermédiaires.
Nous reviendrons pour cela dans un premier temps sur
l'importance de la production de logements défiscalisés puis nous
nous intéresserons à la concordance entre cette production et les
besoins des populations intermédiaires.
I-1) UNE PRODUCTION EXPONENTIELLE ENTRE 2003 ET 2008
Les modifications apportées par la loi
Girardin53 ont permis de relancer de manière
considérable le marché de la construction neuve. Ce dispositif
présentait en effet des avantages supplémentaires aux lois Pons
et Paul qui lui ont permis un succès sans précédent. La
production de logements neufs s'est faite { destination du secteur locatif et
dans le cadre d'opérations de logements collectifs ce qui entraina une
dynamique nouvelle sur l'ile que nous allons ici présenter.
53 Cf Annexe n°3 pour d'avantages de précisions sur
les modalités de fonctionnement du dispositif en 2011
Pour cela, nous reviendrons dans un premier temps sur le
principe de la loi Girardin. Puis dans un second temps nous évoquerons
l'importance de la relance du marché entrainée par ce
dispositif.
I-1-A) LA LOI GIRARDIN : UN DISPOSITIF PLUS INTERESSANT POUR LES
INVESTISSEURS
La défiscalisation Girardin54 pour
l'investissement locatif ne concerne pas uniquement les particuliers. En effet,
elle concerne également les entreprises au titre de l'impôt sur
les sociétés55 et les particuliers au titre de
l'impôt sur le revenu56 comme les précédents
dispositifs.
Elle concerne également les investissements immobiliers
à usage de résidences principales. L'avantage de la
défiscalisation pour ce type d'investissement reste toujours le
même, c'est-à-dire qu'il facilite l'accès { la
propriété de sa résidence principale, et concerne toujours
les mêmes catégories de ménages qui disposent de bons
niveaux de revenus et donc d'un taux d'imposition suffisamment
élevé. La seule différence se trouve dans l'allongement de
la durée de l'avantage fiscal qui est d'autant plus intéressant
pour les ménages bénéficiaires. Une fois de plus
l'accession { la propriété ne constitue pas l'objet de notre
étude et c'est toujours la défiscalisation des investissements
locatifs dans ce nouveau dispositif qui mobilise notre attention.
La loi Girardin si elle marque autant l'histoire de la
défiscalisation, c'est bien parce qu'elle offre des avantages fiscaux
qui ont d'autant plus attiré les investisseurs. Ces avantages se
démarquent donc de la loi Paul qui venait d'être mise en place en
2001. C'est ainsi que la loi Girardin a augmenté les avantages fiscaux
passant de 25 { 40% le taux de défiscalisation pour le locatif libre et
de 40 à 50% pour le locatif intermédiaire.
L'augmentation des avantages fiscaux de base semble avoir
entrainé une attractivité de ce dispositif bien
supérieure aux précédents. Cette attractivité a
largement dépassé les
54 Issu de la loi de programmation pour l'outremer LOPOM du 21
Juillet 2003
55 article 217 indecies du CGI
56 article 199 indécies A du CGI
frontières de l'ile puisque les investisseurs sont
venus majoritairement de métropole. C'est ainsi qu'entre 70 et
80%57 des ventes d'appartements neufs se sont effectuées
auprès d'investisseurs métropolitains ce qui marque une rupture
avec les dispositifs précédents qui concernaient davantage des
investisseurs réunionnais.58
Ces investisseurs ont privilégié à
90%59 le secteur du locatif intermédiaire étant
donné l'avantage fiscal supplémentaire que cela entrainait. Dans
la continuité des dispositifs préexistants depuis 1992 et
199660, la défiscalisation devait servir ici à
contribuer à la mise sur le marché d'une offre de logements
locatifs destinés { des catégories de ménages
intermédiaires ne pouvant ni prétendre au logement social, ni
pouvoir supporter l'effort financier { consentir dans le locatif
privé.
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