CONCLUSION
Face à la montée en puissance et à la
permanence de l'insécurité dans le monde, en Afrique en
général, dans le Golfe de Guinée et au Cameroun en
particulier, les Forces Armées camerounaises comme les Forces
Armées du monde, soumises à une redoutable épreuve, sont
mises en branle. C'est la « guerre contre le terrorisme
»57 ou « guerre contre la terreur »58
développée par l'administration américaine de George W.
Bush après les attentats du 11 septembre 2001. Mais, ce terme n'est plus
employé dans l'administration américaine depuis l'entrée
en fonction de l'administration Obama en 200959. La notion
émerge en réalité dès la présidence de Bill
Clinton confrontée à la montée du « terrorisme
international »602et sous forme de recommandations alarmantes
émises dès le mois de juin 2000 qui évoquent
déjà les menaces et le scénario qui devaient se
concrétiser l'année suivante.
Comme première mesure américaine après
le fameux 11 Septembre, le USA Patriot Act, une loi d'exception, limitée
dans le temps et votée par le Congrès à la
quasi-unanimité le 26 octobre 2001. Elle est destinée à
renforcer le pouvoir des agences gouvernementales des États-Unis. Les
adversaires du Patriot Act (notamment les associations de protection des
libertés individuelles) considèrent cette loi comme liberticide.
Le Patriot Act a été prolongé le 21 juillet 2005 (à
la chambre des représentants) et le 29 juillet 2005 (au Sénat
américain) de façon permanente pour 14 des 16
57 «War on Terrorism », «
War on Terror»
58 «Global War on Terror
»»
59L'expression "guerre contre le terrorisme"
abandonnée, France 24, 31 mars 2009 60
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme.
Thèse de Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011
Ernest Claude MESSINGA 254
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dispositions du Patriot Act et de 10 ans pour les deux autres
(sur les écoutes téléphoniques et l'accès au
fichier personnel).61
En France, dans le cadre des dispositifs prévus par
les plans Vigipirate, Biotox ou Piratox et des missions de la gendarmerie
nationale, les Forces Armées protègent la population et les
intérêts nationaux. Plus loin de leurs frontières, elle
lutte contre le terrorisme par l'engagement des Forces spéciales en
Afghanistan et participe à la force navale TF 150 dans l'océan
Indien. A l'extérieur du territoire, les Forces françaises sont
engagées sur de nombreux théâtres de crises
régionales : en Côte d'Ivoire, en Afghanistan, dans les Balkans.
Cette implication permanente des Armées est la partie la plus visible de
l'action de la France au service de sa sécurité nationale et de
la stabilité internationale. Mais, leur réponse aux défis
du moment va bien au-delà du seul engagement militaire : elle combine
des préoccupations stratégiques, économiques, sociales,
diplomatiques. Les menaces actuelles exigeant une réponse forte, globale
et surtout durable, elle va le concrétiser en conjuguant des moyens
renforcés et une coopération politique relancée.
Des moyens seront renforcés avec des
équipements à la pointe de la technologie, des nouveaux Rafale,
des hélicoptères NH90, du Tigre, de nouveaux bâtiments de
projection et de commandement, des systèmes Félin, la phase de
conception du deuxième porte-avions sera lancée, la modernisation
de la dissuasion nucléaire avec la mise en place du M51, deux programmes
majeurs pour la Marine ont franchi des jalons importants et
déterminants. Grâce à la loi de programmation 2003-2008 et
à son application rigoureuse, avec le soutien constant du
Président de la République, les Forces Armées
françaises sont de mieux en mieux
61
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme_cite-note-0-cite-note-0 Thèse de
Doctorat/Ph.D en Sce Po, UY2, 2011 Ernest Claude MESSINGA 255
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préparées aux exigences du contexte
stratégique. Dès lors, la Défense est redevenue une
priorité nationale.62
L'Organisation de coopération de Shanghai (OCS),
regroupant la Russie, la Chine et les nations d'Asie centrale, va
déclarer la guerre contre les « trois Forces du mal » : le
terrorisme, le séparatisme et l'extrémisme. Il s'agit de diverses
actions policières, politiques et militaires que réalise le
gouvernement des États-Unis (appuyé par différents
alliés dont l'OTAN) contre différentes organisations liées
au terrorisme islamiste appuyés par une coordination au niveau de
l'Organisation des Nations unies63de divers comités
crée par le Conseil de sécurité des Nations unies. Elle se
démarque de la lutte antiterroriste traditionnelle par des actions
militaires de grande ampleur à l'étranger et un interventionnisme
actif. Elle débouche sur le déclenchement de « guerres
préventives » contre les États suspectés d'abriter
des groupes terroristes et/ou susceptibles de leur fournir des armes de
destruction massive. Cette guerre combine la lutte directe, c'est-à-dire
le démantèlement des cellules terroristes, la destruction des
camps d'entraînement, et la lutte indirecte. Cette dernière
comprend les enquêtes et les pressions sur les gouvernements,
organisations et personnes soutenant les organisations terroristes, et le gel
des avoirs soupçonnés d'appartenir ou de servir à des
groupes terroristes. C'est aussi les aides financières aux pays
participant à la lutte contre le terrorisme, l'accroissement de la
coopération internationale au niveau du renseignement, de la police et
de la justice, la réorganisation politique du Moyen-Orient
décidée par l'administration Bush (projet du « Grand
Moyen-Orient » porté par les néoconservateurs). Des
unités militaires des États-Unis apportent un soutien logistique,
aide à la formation des Forces locales et offre des renseignements
à plusieurs pays d'Afrique du Nord et l'Ouest (Algérie, Tchad,
Tunisie, Mauritanie, Maroc,
62Alloction du Ministre de la Défense,
Mme Michele Alliot-marie, Nouvelles menaces, nouvelles
réponses, 12ème rencontres parlementaires "Paix et
Défense", Lundi 31 Janvier 2005.
63
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme_cite-note-0-cite-note-0
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Mali entre autre) pour lutter contre divers groupes
Armées (terrorisme et grand banditisme) qui se trouve dans le Sahel dans
le cadre de la Trans Sahara counter Terrorism Initiative (TSCT) (anciennement
Initiative Pan-Sahel lancé en 2002). 1400 soldats américains sont
installés dans la corne de l'Afrique dans le cadre de la Force mixte
dans la corne de l'Afrique du Commandement Central (Combined Joint Task
Force-Horn of Africa). Leur mission consiste à mener des
opérations et à organiser des entraînements visant à
« combattre le terrorisme, à sécuriser la zone et à
établir la stabilité régionale ». Afin de s'acquitter
de cette mission, il organise des opérations civilo-militaires, des
opérations relevant des affaires civiles, et des cycles de formation en
collaboration avec l'Union africaine. La zone d'opération de cette force
combinée comprend les Comores, Djibouti, l'Érythrée,
l'Éthiopie, le Kenya, la Somalie, le Soudan, la Tanzanie, l'Ouganda et
le Yémen. Un ensemble de mesures visant à lutter contre le
terrorisme de manière active ont été prise en l'occurrence
l'infiltration des mouvements, guerre de chasse, éliminations
préventives, etc.64
La " guerre de chasse " est l'une des méthodes du
contre-terrorisme. En ambiance de guérilla, il s'agit de traquer les
groupes terroristes afin d'empêcher leur implantation dans un secteur
déterminé. On crée ainsi une sorte de " guérilla de
contre guérilla ". Elle est pratiquée par des Forces
spéciales ou " irrégulières ". En ambiance de terrorisme
politique, marginal ou de guérilla urbaine, cette méthode a
souvent dérivé vers la constitution d'escadrons de la mort ".
L'Israël a créé en 1995 l'unité "
Egoz ". Egoz est une unité militaire clandestine, qui
opère exclusivement au Sud-Liban, dans la zone opérationnelle du
Hezbollah. Elle opère par raids aéroportés ou
terrestres contre des objectifs terroristes. Une autre unité
secrète, " Mista'aravim " issue de la fusion de l'unité " Shimson
" (qui opérait dans la bande de Gaza)
64
http://fr.wikipedia.org/wiki/guerre
contre le terrorisme
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et l'unité " Duvdevan " (Cisjordanie) opère
dans les territoires occupés. Ses membres sont vêtus comme des
arabes et évoluent au sein de la population palestinienne pour
assassiner leurs " cibles ".
En ex-Rhodésie, des opérations de combat
clandestines dans les zones occupées par la Zimbabwe African
National Liberation Army (ZANLA) - surnommées " Pseudo Ops " -
étaient pratiquées par les Selous Scouts. Une variante de la
guerre de chasse, menée par des spécialistes, est de mettre sur
pied des organisations autochtones de résistance contre les terroristes.
Les Français, puis les Américains ont mis sur pied de tels
mouvements de résistance au Vietnam. Toutefois, ceci n'est possible que
lorsque la guérilla ou le mouvement terroriste ne
bénéficie pas d'un large appui populaire.
La Coopération internationale va s'accentuer avec le
Conseil de sécurité des Nations unies qui va renforcer la
coordination entre les trois Comités créés pour lutter
contre le terrorisme et chargés de surveiller l'application de ses
résolutions par les États membres. Les trois Comités
concernés sont : le Comité des sanctions contre Al-Qaïda et
les Talibans (créé par la résolution 1267 en 1999
appelé aussi Comité 1267)65, le Comité contre
le terrorisme (créé par la résolution 1373 en 2001), et le
Comité sur la non-prolifération des armes de destruction massive
(créé par la résolution 1540 en 2004). La
résolution 1624 en 2005 ouvre la voie à l'adoption de mesures
anti-terroristes au niveau mondial. Plusieurs accords ont lieu entre
États pour lutter contre le terrorisme et renforcer les textes existants
tel la convention interaméricaine contre le terrorisme signé par
les 34 États de l'Organisation des États américains le 3
juin 200266 et la Convention européenne pour la
prévention du terrorisme du Conseil de l'Europe signé en
65
http://www.cicte.oas.org/Rev/en/Documents/Conventions/AG%20RES%201840%2020
02%20francais.pdf.
66Texte intégral de la convention
interaméricaine contre le terrorisme
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2005 et entré en vigueur le 1er juin
200767. En 2005, Interpol créé la Notice
spéciale Interpol - Conseil de sécurité des Nations Unies
concernant des personnes associées à Al-Qaïda et aux
Talibans qui figurent sur la liste du Comité 1267 du Conseil de
sécurité des Nations-Unis et font l'objet de sanctions telles que
le gel de leurs avoirs, une interdiction de voyager et un embargo sur les
armes. Les services de sécurité américains multiplient les
contacts et les centres de coordination de lutte antiterroriste avec leurs
homologues à travers le monde tel l'Alliance Base à Paris. Quel
serait donc le bilan de cette croisière contre cette menace « sans
visage » ?
672005 : Convention européenne pour la
prévention du terrorisme
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CHAPITRE V :
UNE ÉVALUATION OPÉRATIONNELLE DE LA LUTTE ANTI-MENACES
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Conduite sous le leadership des Etats-Unis après la
tragédie du « mardi noir », « la guerre contre le
terrorisme » a été un échec cuisant ; en
témoigne la prolifération des attentats meurtriers à
l'échelle planétaire, notamment à Bali, Djakarta, Madrid,
Istanbul, Islamabad, Bombay, en Afghanistan et en Irak, mais également
à Djerba, Casablanca, Mombasa et Charm el cheikh, pour ne citer que ces
exemples. C'est la preuve irréfutable que l'Afrique n'est pas
véritablement en marge de ce phénomène de propagation de
la terreur. Dans ce sens, il est loisible de relever que tant certains de ces
actes sont perpétrés par des africains eux-mêmes,
expression d'un ras-le-bol incoercible et d'un tissu social en
déliquescence, que d'autres, en fait, sont facilités par la
fragilité des systèmes sécuritaires, poreux aux incursions
extérieures déstabilisatrices.
Le phénomène est en effet très largement
répandu en Afrique sous une forme interne aux Etats. Il y est
pratiqué par des mouvements rebelles (Union Nationale pour
l'Indépendance Totale de l'Angola UNITA en Angola, Résistance
Nationale Mozambicaine RENAMO au Mozambique, Lord's Resistance Army LRA en
Ouganda, Patriotes résistants Maï Maï Parema en
République démocratique du Congo, Libériens Unis pour la
Réconciliation et la Démocratie LURD et Mouvement pour la
démocratie au Liberia Model au Liberia, etc.)(Ahouanye M.L 2009 :
26-27). Mais aussi des Forces gouvernementales (Liberia, Zimbabwe, notamment
durant la répression dans le Matabeleland des années 1980,
Angola, Soudan, etc.), les uns comme les autres recourant largement aux moyens
de la terreur et de l'effroi.
Le terrorisme apparaît aujourd'hui comme le
symptôme d'une société internationale malade ; malade de
ses injustices, de ses disparités et de ses exclusions. Dans des
sociétés africaines marquées par des systèmes
démocratiques dont la construction reste déficitaire, une
inégale répartition des richesses économiques disponibles,
l'existence de bidonvilles géants, cimetières vivants de tant
d'espoirs déçus, réceptacles de
générations
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entières frustrées et en mal d'être, en
mal de devenir, bref, en défaut d'avenir, et en fin de compte, creuset
idéal pour les sergents recruteurs de l'internationale terroriste, le
terrorisme ne peut que y faire son lit. C'est d'ailleurs l'argument majeur qui
a été mis en avant lors des attentats de Casablanca au Maroc le
16 mai 2003 où les 14 terroristes étaient marocains, tous issus
du bidonville de Sidi Moumen où la police ne pénétrait
plus ; ou encore de la prise d'otages au Nigeria le 31 juillet 2004 de 165
travailleurs de la société américaine Mallard Bay, qui
opère en sous-traitance avec SHELL, par une trentaine de ravisseurs
autochtones qui réclamaient des emplois et une meilleure
répartition des revenus issus du pétrole local (Ahouanye M.L.
2009 : 30). L'aspect technologique de la mondialisation reste un facteur
important de diffusion de ce terrorisme international : Internet, les
téléphones portables et les moyens de transport modernes ont
fourni à ce dernier un environnement favorable.
L'URSS retirée d'Afghanistan, la contagion
apportée par les anciens combattants afghans se répandit
très rapidement en Afrique du Nord (Algérie, Egypte, Soudan).
Pour l'Algérie seule, de 600 à 1000 anciens combattants
islamistes aguerris regagnèrent le pays entre 1986 et 1989, constituant
dès cette époque la base d'une expansion terroriste sur une
assise de fondamentaliste islamique. Quant au financement de celle-ci, il fut
d'abord assuré par l'Arabie Saoudite, puis par Oussama Ben Laden et
d'autres contributeurs privés. C'est ainsi que fut revivifié un
extrémisme local prônant la violence, mais en se tournant
désormais plus vers l'extérieur. A la fin de la décennie,
l'on en verra les effets jusqu'en Afrique du Sud avec l'organisation People
Against Gangsterism and Drugs (PAGD) ou dans la partie orientale du continent
par une série d'attentats. Mais le détonateur fut bien
l'annulation des élections législatives de 1992 en
Algérie. Des milliers de personnes furent tuées ou
blessées dans l'espèce de guerre civile qui s'ensuivit,
dérivant d'une radicalisation favorisée par la stagnation
économique et le chômage massif dans les banlieues et les
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bidonvilles. 412 hommes, femmes et enfants furent
horriblement taillés en pièces dans trois villages de la
région d'Elizane pendant la nuit du 29 décembre 1997 (Ahouanye
M.L. 2009 : 32).
En Tunisie, en Libye, en Egypte et dans certains Etats
subsahariens, seules des mesures de sécurité rapides et efficaces
colmatèrent la situation. Malgré cela, 58 touristes
étrangers furent massacrés à Louxor en novembre 1997 et
les deux ambassades américaines de Nairobi et de Dar es-Salaam furent
détruites simultanément le 7 août 1998 (sans parler d'une
tentative avortée à Kampala et d'autres à Bangkok et
Tirana). Le caractère international du phénomène
était souligné, dès le 20 août 1998, par une attaque
de représailles américaine près de Khartoum contre une
usine chimique incriminée. Précédemment, la tentative
d'assassinat de l'été 1995, contre le président
égyptien Hosni Moubarak à Addis-Abeba, avait déjà
fait monter la tension entre l'Egypte, le Soudan et l'Ethiopie (Ahouanye M.L.
2009 : 33).
Rétrospectivement, les attaques terroristes dans cette
région du monde apparaissent comme une esquisse des
événements du 11 septembre 2001. Les attentats
anti-américains du Kenya et de Tanzanie avaient surpris, et pourtant des
signes inquiétants apparaissaient bien dès la guerre du Golfe :
le 25 janvier 1991, par exemple, le département d'Etat américain
invitait les familles de ses diplomates et les personnels non indispensables
à quitter la Tanzanie en raison de menaces terroristes liées
à ce conflit. Parallèlement au recours local ou régional
à la terreur, une vague mondiale de terrorisme prenait corps, en fait,
depuis plusieurs décennies, et ce, bien avant les attaques dont le World
Trade Center fut par deux fois l'objet, en 1993 puis en 2001, pour incarner les
nouveaux dangers de l'après-guerre froide. Ces derniers
événements ne font, en réalité, que refléter
l'aggravation d'un problème mondial de sécurité, qui exige
une réaction également de portée mondiale, dans laquelle
devront s'inscrire l'Afrique et les différents Etats qui la
composent.
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Comme le reste du monde, le Cameroun connaît son lot de
menaces de divers ordres, entre autre le phénomène des coupeurs
de route responsable de la criminalité transfrontalière et les
« loups de mers » responsables des risques et pratiques illicites en
mer : piraterie, terrorisme, trafic divers, pêche illicite, immigration
illégale et pollution.
I- LES « COUPEURS DE ROUTE » ET LA
CRIMINALITÉ TRANSFRONTALIERE
Dans les régions septentrionales, le
phénomène a trouvé un terrain particulièrement
fertile dans certaines parties du territoire national notamment là
où les populations estiment se trouver dans quelque obligation morale de
participer au rayonnement de l'administration traditionnelle locale par le
paiement d'une dîme reconnue de fait et estimée indispensable au
fonctionnement des structures de la cour. Des comportements qui mettent parfois
en complicité plus ou moins ouverte les populations et les coupeurs de
routes.
Le phénomène devient très complexe quand
il peut éclater à l'intérieur d'un territoire donné
et avoir des répercussions regrettables sur un ou plusieurs autres,
rendant ainsi difficile l'identification des assaillants. Ses manifestions sont
variées. Ici, certains chefs traditionnels se croient investis de
l'obligation d'organiser des razzias pour devoir assurer leur autorité
et leur droit à la dîme... Ailleurs, des groupes de bandits
s'organisent plus ou moins professionnellement et opèrent aussi bien
à l'intérieur qu'à l'extérieur d'un territoire. Le
pire est constitué des bandes de milices, voire de rebelles qui
opèrent occasionnellement pour chercher des subsides là où
elles croient pouvoir les trouver pour vivre et parfois survivre. Les attitudes
ainsi affichées ont partout entraîné la mise en oeuvre et
l'usage sans foi ni loi d'une vaste panoplie d'armes, allant des armes blanches
(couteaux, machettes, lances, flèches, arbalètes...), aux armes
de
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guerre (AK47, PA, MP5) ainsi qu'un éventail notable
des moyens de communication modernes et puissants, causant çà et
là au patrimoine humain et matériel des Etats des
préjudices très importants et souvent inestimables (Nkoa Atenga
2007 : 18).
La période allant de novembre à décembre
est généralement considérée comme la haute saison
pour les « coupeurs de route ». La fête du mouton, principale
célébration religieuse dispendieuse, suivie de la fête de
Noël et du Nouvel An fait monter la menace. 15 morts, 20 attaques pour le
seul mois de novembre 2009. L'attaque la plus meurtrière aura
été celle du campement de Mbororo de Bloho, dans le parc national
de Waza ou les assaillants ont froidement abattu 5 bergers, le 21 novembre
2009. L'accalmie observée, ces dernières semaines a
été heureusement imposé par le déploiement
impressionnant des Forces de Défense sur le terrain. Selon diverses
sources, plus de 5 milliards de francs de rançon ont été
versé, ces dernières années, aux « coupeurs de route
». Près de 300 personnes ont été tuées et plus
de 50.000 têtes de bovins ont disparus. Ce triste bilan des attaques des
« coupeurs de route » ne concerne que les régions du
septentrion.
Cagoulés et armés à point et toujours
promptes à tuer, les « coupeurs de route » ont semé la
terreur ces dernières années le long des frontières qui
lient le Cameroun à la République Centrafricaine, au Nigeria et
au Tchad. En une dizaine d'année, ces bandits de grand chemin ont
délesté de leurs biens, des populations déjà
écrasées par le poids des difficultés de la vie
quotidienne. Dans la région septentrionale frontalière aux trois
pays voisins, ces attaques plombent les activités économiques,
aggravant la misère des populations. Elles hypothèquent
l'éclosion de l'activité touristique alors que le septentrion
possède d'énormes potentialités.
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1) MODES ET MECANISMES OPÉRATOIRES EN PERPETUELLE
MUE
La porosité des frontières et surtout la
prolifération des armes de guerre et de petits calibres provenant des
pays en instabilité récurrente, ont dopé l'activité
de ces criminels qui écument les zones frontalières. En quelques
années, leur modus operandi a énormément
évolué, les moyens d'attaque aussi. Au Cameroun, le
phénomène des coupeurs de route se manifeste principalement
à travers trois modes :
· Des embuscades classiques sur les axes routiers contre
des convois, même si ceux-ci sont escortés ne faisant plus
recette;
· Les bouclages des villages, des prises d'otages avec
demande de rançon dans les villes ou les localités rurales sont
dans l'air du temps;
· Des rapts de bétail avec détournement
d'itinéraire des troupeaux ;
Toujours à base des renseignements et des
reconnaissances préalables sur le terrain retenu, le mécanisme
des coupeurs de route s'articule en six phases :
> Se regrouper ;
> Frapper par surprise ;
> Arracher ou rapter (tuer éventuellement) ;
> Eclater ;
> Se regrouper à un endroit fixé à
l'avance (en vue du partage du butin et de la cache des armes utilisées
éventuellement) ;
> S'évanouir dans la nature ambiante après
avoir planifié une nouvelle action (Nkoa Atenga 2007 : 19).
a) EMBUSCADES SUR LES AXES ROUTIERS
Il s'agit d'attaques perpétrées sur les
convois, même escortés. Le phénomène bancaire
n'étant pas encré dans les mentalités locales, le jour du
marché, les malfrats tentent des embuscades pour s'approvisionner de
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l'argent des commerçants et autres agriculteurs avant
de s'évanouir dans la nature à l'intérieur ou à
l'extérieur du territoire. Toute résistance ou tentatives de
reconnaître un assaillant est synonyme de suicide instantané. Ces
attaques, souvent sur renseignement et de très courtes durées
dans leur déroulement, sont plutôt rares sur les grands axes,
fréquentes par contre sur les pistes rurales et axes secondaires.
Signalons cependant ici que les véhicules de transport
des fonds et même des transports publics ne sont pas toujours
épargnés (Nkoa Atenga 2007 : 18).
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