Prenant en compte l'insécurité grandissante dans
les eaux côtières du Golfe de Guinée, et les
éventuelles conséquences pour les économies et la
stabilité des zones côtières des Etats concernés, la
deuxième réunion du Conseil des Ministres du COPAX (Conseil de
Paix et de Sécurité en Afrique Centrale) tenue le 26
Février 2008 à Libreville instruit le Secrétariat
Général de la CEEAC à diligenter une étude visant
à proposer une « stratégie de sécurisation des
intérêts vitaux en mer des Etats de la CEEAC du Golfe de
Guinée, articulée autour du COPAX et favorisant une synergie avec
la Commission du Golfe de Guinée et la CEDEAO ». Les termes de
référence de la dite étude seront validés lors de
la huitième réunion de la Commission de Défense et de
Sécurité (CDS) du COPAX tenue le 02 Mai 2008 à
Yaoundé, et la stratégie qui en ressort positivement
censurée le 05 Décembre 2008 à Kinshasa
à l'occasion de la neuvième réunion de la Commission de
Défense et de Sécurité.
C'est donc en toute logique que la troisième
réunion du Conseil des Ministres du COPAX tenue à Brazzaville le
27 Février 2009 valide la stratégie communautaire proposée
et adopte le projet de protocole d'accord y relatif (Atonfack Guemo 2010 :
140).
La stratégie de sécurisation des
intérêts en mer des Etats riverains du Golfe de Guinée et
membre de la CEEAC est prévue pour être mise en oeuvre par un
organisme dédié tout spécialement à la tâche
: le CRESMAC (Centre de Coordination Régionale pour la
Sécurité Maritime de l'Afrique Centrale). Rattaché au
secrétariat de la CEEAC, cet organisme aura la particularité de
mettre en commun les compétences civiles et militaires. Les axes de
cette stratégie sont les suivants :
- Gestion communautaire de l'information par la mise en place
des mécanismes de recherche et d'échange des informations entre
les Etats ;
- Surveillance communautaire par la mise en place de
procédures opérationnelles conjointes et des moyens
interopérables de surveillance et d'intervention ;
- Harmonisation de l'action des Etats en mer au plan juridique et
institutionnel ;
- Acquisition et entretien des équipements majeurs
dédiés à la stratégie pour garantir une
capacité opérationnelle minimale à chaque Etat
concerné ;
- Institutionnalisation d'une conférence Maritime au
niveau de la CDS afin de maintenir la mobilisation de tous les
opérateurs du milieu marin.
Une fois la stratégie adoptée et prenant en
compte l'immensité de la zone maritime à protéger, les
stratèges de la CEEAC vont diversifier l'espace maritime en 4 zones
géographiques (3 zones actuellement : A, B, et D) allant de la
frontière angolaise au Sud aux limites nord de la zone avec le Nigeria.
La réalité qui sort de ce découpage est que la zone «
D » relative aux Etats du Gabon, du Cameroun, de la Guinée
Equatoriale, de Sao Tome et Principe est la plus en proie à
l'insécurité maritime.
Compte tenu de l'urgence d'une réaction imposée
par la situation de cette zone, le Conseil des Ministres du COPAX du 27
Février 2009 à Brazzaville recommandera aux ministres des Etats
CEEAC de la zone D de se retrouver à Yaoundé pour signer un
accord technique et lancer les premières opérations du plan de
surveillance de ladite zone sous l'égide du Secrétariat
Général de la CEEAC. La suite des actes posés auront
obéit au chronogramme suivant :
· Démarrage symbolique des patrouilles conjointes le
07 Mai 2009 à Douala ;
· Signature du premier plan de surveillance
dénommé SECMAR1 par les Chefs d'Etat Majors
généraux de la Zone D : le 11 Août 2009 à Malabo
;
· Regroupement des patrouilleurs du Cameroun, du Gabon
et de la Guinée Equatoriale, pour une mise en oeuvre
opérationnelle du Plan SECMAR 1 : le 16 Septembre 2009 à Malabo
;
· Signature du Protocole d'Accord relatif à la
sécurisation des intérêts vitaux des Etats de la CEEAC en
mer : 24 Octobre 2009 à Kinshasa ;
· Le Protocole d'Accord global est en fait l'instrument
général qui se devait d'être mis en oeuvre par un accord
technique relatif aux aspects pratiques de la sécurisation des
intérêts vitaux des Etats de la CEEAC en mer. Contrairement
à l'Accord technique « Zone D » qui a été
signé et mis en oeuvre suivant des procédés d'urgence, le
protocole d'Accord concerne tous les Etats de la CEEAC, de l'Angola le plus au
sud du Cameroun, limitrophe du Nigeria dans le Nord du Golfe de
Guinée.
Après la signature du Protocole d'Accord le 24 Octobre
2009 à Kinshasa, les Etats ont tenu à souligner que la mise en
oeuvre de la stratégie de sécurisation des intérêts
vitaux en mer des Etats de la CEEAC, du Golfe de Guinée devait rester
impérativement une prérogative régalienne des Etats et de
la communauté (Atonfack Guemo 2010 : 142-143).
d) L'EXERCICE OBANGAME EXPRESS 2011
L'exercice « OBANGAMA EXPRESS 2O11 » qui s'est
déroulé à la base navale de Douala du 21 au 23 avril 2011
est une application de la volonté des Etats de l'Afrique de l'Afrique
Centrale d'unir leurs efforts pour combattre la piraterie maritime dans le
Golfe de Guinée, partant d'un
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
vers une Armée « d'avant-garde » 1960-2010
accord technique sur la sécurité maritime de
cette zone d'influence géostratégique signé à
Yaoundé le 6 mai 2009 par les pays qui le partagent. « OBANGAME
» l'équivalent de « tous pour un, un pour tous »
en langue Fang, parlée au Cameroun, au Gabon et en Guinée
Equatoriale est un exercice de surveillance maritime visant au renforcement des
capacités procédurales et opérationnelles des Etats de la
zone D du Golfe de Guinée. Il avait pour but d'après le
communiqué de presse du Ministre Délégué à
la Présidence chargée de la Défense, Edgard Alain MEBE
NGO'O de « contribuer au renforcement du dispositif de
sécurité au sein du Golfe de Guinée ». Le Ministre de
la Défense a rappelé à cette occasion la
nécessité d'une mutualisation continue des moyens des Etats
concernés par la sécurité maritime dans la
sous-région.
La simulation était conduite par une dizaine de pays
dont ceux de la Communauté Economique des Etats de l'Afrique Centrale
(CEEAC) constituant la zone D en partenariat avec le Commandement des Forces
Navales américaines pour l'Afrique (Africom) et des pays de l'Union
Européenne (UE). Elle s'est déroulée en deux phases :
- La première, entièrement théorique,
était consacrée à l'élaboration d'une
procédure de travail commune aux parties prenantes. Les parties se sont
par exemple accordé sur l'impérative
interopérabilité des matériels de communication, et
l'anglais aurait été retenu comme langue de communication. Il
était aussi question d'harmoniser les chronogrammes d'activités
du Centre multinational de coordination, avec des Etats riverains de la zone
maritime D.
- Les opérations pratiques quant à elles, ont
enregistré la participation des navires du Cameroun, du Gabon, de la
Guinée Equatoriale, du Nigeria, des Etats-Unis d'Amérique, de
l'Espagne, de la France et de la Belgique. Les deux groupes de manoeuvre
constitués à cet effet ont simulé les diverses techniques
d'un contrôle de zone.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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Au menu de cette phase, le repérage, l'identification,
l'interprétation et la fouille de navires ou d'embarcations
suspects51.
Figure N°21 :
opérations pratiques de l'exercice OBANGAME EXPRESS 2O11 à la
base navale de Douala.
![](Les-forces-armees-camerounaises-face-aux-nouvelles-formes-de-menaces--la-securite--dune-arm35.png)
Source : Magazine des
Forces de Défense Honneur et Fidélité, Numéro
spécial du 20 mai 2011, Page 28.
51 Magazine des Forces de Défense Honneur et
Fidélité, Numéro spécial du 20 mai 2011, Page
27-28.
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à la sécurité : d'une Armée « de garde »
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2) LE SOUTIEN INTERNATIONAL
Il repose sur la Convention de SUA de 1988 et les protocoles
de 2005, le code international pour la sûreté des navires et des
installations portuaires (CODE ISPS).
a) LES CONVENTIONS DE SUA DE 1988 ET LES PROTOCOLES
DE 2005 : DES MESURES ESSENTIELLEMENT
REPRESSIVES.
La Convention pour la répression d'actes illicites
contre la sécurité de la navigation maritime de 1988, dite
Convention SUA (Suppression of Unlawful Acts), et son protocole pour la
répression d'actes illicites contre la sécurité des
plates-formes fixes situées sur le plateau continental a le double
mérite de requalifier les différentes atteintes à la
sécurité et la sûreté maritime, en y incluant des
actes qui jusque-là échappaient au contrôle juridique des
Etats, du fait de leur exclusion automatique du champ de compétence de
la Convention de Montego Bay. La Convention de SUA est cependant loin
d'être satisfaisante, car comportant des lacunes non négligeables.
D'où l'urgence de protocoles adoptés à Londres en 2005.
S'agissant de la requalification des actes illicites contre la
sécurité de la navigation, l'article 3 de la Convention de SUA
énumère les infractions qui rentrent dans le champ de
compétence de cette Convention. Selon cet article, commet une infraction
pénale toute personne qui :
· s'empare d'un navire où en exerce le
contrôle par violence ou menace de violence ;
· accomplit un acte de violence à l'encontre
d'une personne se trouvant à bord d'un navire si cet acte est de nature
à compromettre la sécurité de la navigation du navire ;
· détruit un navire ou cause à un navire
ou à sa cargaison des dommages qui sont de nature à compromettre
la sécurité de la navigation du navire ;
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· place sur un navire un dispositif propre à
détruire le navire ou à causer au navire des dommages qui
compromettent la sécurité de la navigation du navire (Atonfack
Guemo 2010 : 125).
L'article 3 de la Convention SUA interdit aussi de
détruire ou d'endommager gravement des installations ou services de
navigation maritime, de communiquer intentionnellement de fausses informations
susceptibles de compromettre la sécurité de la navigation du
navire, de blesser ou tuer toute personne lorsque ces faits présentent
un lien de connexité avec l'une des infractions
susmentionnées.
La Convention de Rome pour la répression des actes
illicites contre la navigation maritime oblige les Etats contractants à
prendre des mesures pour garantir que les terroristes soient
appréhendés et jugés dans n'importe quelle région
du monde où ils tenteraient de se cacher. Elle permet donc à tout
Etat de réprimer par des peines appropriées les actes illicites
(article 5), et d'assurer la détention de leurs auteurs.
Mais, la Convention de SUA et son protocole ne donne pas le
droit aux Etats parties d'arrêter et d'inspecter un navire, même
s'ils le soupçonnent d'être impliqué dans des
activités terroristes ou pirates commises dans les eaux territoriales.
De plus, elle ne procure pas une vraie compétence universelle sur les
infractions car les Etats parties doivent avoir un lien direct avec celles-ci
afin de pouvoir établir leur compétence. Dans les faits, elle
n'autorise notamment pas les navires de guerre à intervenir en haute mer
sur un navire ne battant pas le même pavillon et qui aurait à son
bord des terroristes. Il s'agit du maintien des privilèges de l'Etat du
pavillon. Ce qui dans ce cas ne laisse aux Etats, que les possibilités
d'arraisonnement couvertes soit par l'article 110 de la Convention de Montego
Bay s'agissant des navires à la nationalité douteuse, soit par
extension de l'application de certaines Résolutions de l'ONU, telles les
résolutions 1267, 1368 et 1390 du Conseil de Sécurité. La
résolution 1390 ouvre la possibilité d'intervention sur des
navires suspectés d'entretenir un
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lien avec des « personnes, groupes, entreprises ou
entités associées à Oussama Ben Laden, Al-Qaida ou
Talibans », bien que l'accord de l'Etat du pavillon reste à
obtenir (Atonfack Guemo 2010 : 126-127).
b) LE CODE INTERNATIONAL POUR LA SURETÉ
DES NAVIRES ET DES INSTALLATIONS PORTUAIRES (CODE ISPS) : DES MESURES SURTOUT
PRÉVENTIVES
Le code International pour la Sûreté des navires
et des Installations Portuaires (Code ISPS) a pour objectif de fournir un cadre
cohérent et normalisé pour l'évaluation des risques,
permettant aux gouvernements de compenser l'aggravation des menaces en rendant
moins vulnérables les navires et les installations portuaires. A la
base, il part de l'idée que garantir la sûreté des navires
et des installations portuaires est essentiellement une activité de
gestion des risques et que pour déterminer les mesures de
sûreté appropriées, il convient d'évaluer les
risques dans chaque cas particulier.
Le code ISPS ne s'applique qu'à un certain type de
navires effectuant des voyages internationaux et aux compagnies maritimes
propriétaires ou exploitation de ces navires. Sont ainsi
concernés les navires à passagers, y compris les engins à
grande vitesse à passagers, les navires de charge, y compris les engins
à grande vitesse à cargaison, d'une jauge brute égale ou
supérieure à 500 tonneaux, les unités de forage mobiles au
large, et les installations portuaires fournissant des services à de
tels navires qui effectuent des voyages internationaux.
La mise en oeuvre du code comporte ainsi un certain nombre de
mesures spéciales et d'obligations pour les Etats contractants
s'agissant de la définition des niveaux de sûreté ; la
vérification des navires et la délivrance des certificats de
sûreté et désignation des organismes de sûreté
reconnus. Elle comporte aussi des obligations pour les armateurs et
affréteurs exigeant de disposer à bord de chaque navire d'un plan
de sûreté du navire. Enfin, il incombe aux gestionnaires
d'installations portuaires de désigner un agent de sûreté
de l'installation portuaire, d'élaborer un plan de
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sûreté de l'installation portuaire, et de
prévoir un protocole de mise en application échelonnée des
mesures de sûreté, en cas de nécessité (Atonfack
Guemo 2010 : 129-130).
Pour José Yumba, Directeur de l'Autorité
Portuaire du Cameroun, le Code ISPS permet d'identifier à temps toute
menace terroriste et de prévenir les autorités52. Le
Cameroun face à sa position géographique doit jouer un rôle
important pour la sécurité sous-régionale
indépendamment de quelques pratiques régionales en l'occurrence
l'Opération ATALANTA53, la TASK FORCE 15054,
l'Africa Partnership55 Station et la mission CORYMBE56.
Ces actions multiformes fondent l'architecture sécuritaire nationale
contre la menace maritime. Leur efficacité avérée est
appelée à se renforcer avec le déploiement progressif de
ses différents segments, afin que la mer reste et demeure cette aire
essentielle au développement et à la
52 Déclaration au cours d'un entretien
à nous accordé.
53 La mission EUNAVFOR Atalanta est une mission
militaire et diplomatique mise en oeuvre par l'Union Européenne, dans le
but de lutter contre l'insécurité dans le Golfe d'Aden et
l'Océan indien, une zone maritime mise à sac par des pirates qui
lancent leurs attaques depuis les côtes somaliennes. La mission s'est
déployée à partir du 8 décembre 2008. Elle a
à sa disposition, selon les moments, entre quatre à treize
bâtiments appuyés par des avions de patrouilles maritime et
commandos embarqués à bord des navires du Programme Alimentaire
Mondial ravitaillant la Somalie ou navires de commerce traversant la zone.
54 La Combined Task Force 150 est une force
opérationnelle navale basée sur une coalition multinationale
opérationnelle depuis Novembre 2002. Elle est basée à
Djibouti. Elle est coordonnée par l'opération Enduring Freedom et
intègre une partie des navires de la cinquième flotte
américaine. Cette force opérationnelle a été
créée afin de surveiller, d'inspecter et d'arrêter les
entités suspectées de terrorisme. Elle réalise des
opérations dans le nord de la mer d'Arabie et dans l'océan indien
dans le cadre de la guerre informelle contre le terrorisme.
55 Mise en place par la Marine des Etats-Unis en
partenariat avec plusieurs nations européennes et les pays du Golfe de
Guinée, l'APS est un instrument dédié à la lutte
contre l'insécurité maritime en Afrique Centrale et de l'Ouest.
Il se traduit en mer, par la présence dans la Golfe de Guinée
d'un Bâtiment américain servant d'Etat-Major multinational et de
base d'entrainement flottante pour les personnels des marines riveraines.
56CORYMBE est une mission française de
présence maritime dans le Golfe de Guinée. Au cours de celle-ci,
des exercices conjoints et un entraînement des équipages sont
conduits en vue de renforcer les capacités des marines de cette
région.
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paix sociale. Pour toute détresse en mer, ce centre
répond aux numéros suivants :
Canal VHF 16 Marine
- 33-01-25-77
- 33-43-82-35 (Njonou Akoutou 2009 : 29).