Paragraphe 1 : Les différentes acceptions de
l'intégration régionale
Elles s'assimilent aux grandes théories qui
régissent les regroupements régionaux dans le temps et dans
l'espace. Le concept d'intégration présente divers contours, qui
se définissent à la fois par la forme et la dimension qu'on lui
donne. On distingue ainsi l'intégration économique de
l'intégration politique. En réalité, ce sont les travaux
de VINER J. portant sur les effets de l'union douanière sur
l'échange international qui ont donné un sens classique de la
notion. Selon lui, deux conséquences peuvent découler de
l'institution d'un tarif extérieur commun. Il s'agit d'une part du
détournement des échanges au détriment des non membres de
l'union et d'autre part d'un effet de création qui se perçoit
à travers le développement des échanges au
bénéfice des pays membres de l'union. Ce paragraphe sera
axé autour de la diversité des théories de
l'intégration (A) et de leur application à l'UEMOA (B).
A. Une diversité de théories
HASS E. lui, définit l'intégration comme «
le processus par lequel les acteurs politiques dans plusieurs cadres nationaux
distincts sont amenés à transférer leurs
obédiences, attentes et activités politiques vers un nouveau
centre dont les institutions possèdent ou
5 La Communauté Economique et Monétaire
de l'Afrique Centrale (CEMAC) est créée en 1994 et regroupe le
Cameroun, le Tchad, la République Centrafricaine, le Gabon, la
Guinée Equatoriale et le Congo-Brazzaville.
exigent une juridiction sur les Etats nationaux
préexistants». Dans une approche plus économique de
l'intégration, LINDBERG L. définit l'intégration
économique comme un « acte traduisant le consentement entre deux ou
plusieurs nations sur des objectifs communs et sur les politiques qu'elles se
sont assignées».
De ce qui précède, l'on peut déduire que
l'intégration économique est à la fois un processus et un
état6. Dans ce même ordre d'idées, on peut dire
que l'intégration régionale n'est pas seulement un simple acte de
construction d'un espace politique ou économique, encore moins d'un
marché, mais un profond processus de modification et de
transformation structurelle qui s'opère au sein d'un espace
régional formé de plusieurs pays, et qui est en mesure de
déclencher le développement social et économique de ces
pays de manière durable.
A l'évidence, l'intégration ou la
régionalisation a un caractère multiforme et multidimensionnel.
On peut ainsi différencier une entente ou une coopération
(politique, économique, commerciale, diplomatique, ...) d'une
véritable intégration qui résulte des pratiques des
acteurs économiques, financiers, commerciaux, culturels ou
technologiques. En lien direct avec cette dernière approche, on peut
identifier selon HUGON P. quatre principales conceptions de la
régionalisation : libérale, volontariste ancienne, nouvelle
économie industrielle, d'économie géographique.
La conception libérale s'articule autour de la
dimension commerciale de l'intégration. Sur cette base,
l'intégration commerciale est assimilée à la
libéralisation des échanges et des facteurs de production au
regard de la concurrence mondiale. Dans cette optique, intégrer, c'est
réduire les barrières nationales et se rapprocher du
marché mondial.
La conception volontariste ancienne ou protectionniste prend
forme autour de la dimension économique. Les tenants de cette conception
considèrent l'intégration régionale comme un processus de
déconnexion visant à protéger les économies
intégrées de la concurrence mondiale. Elle revient à
protéger un système de production régionale par la mise en
place de politiques convergentes.
La conception de la nouvelle économie industrielle met
l'accent sur la dimension productive. Elle conçoit l'intégration
productive comme la mise en place d'interconnexions par les acteurs en termes
de projets sectoriels, de réseaux transnationaux, d'internationalisation
des relations dans un espace régional.
6 Lire BALASSA B. & STOUTJESDIJ K. (1978):
Economic integration among developing countries in Journal of Common
Markets studies, Vol. 14.
L'économie géographique, de son
côté, met l'accent sur la dynamique spatiale de
l'intégration. Selon cette conception, l'intégration se
caractérise par les effets d'agglomération et de polarisation. Du
fait de la mondialisation, c'est un processus qui permet d'une part de
réduire les distances géographiques en rapport avec les nouvelles
technologies de l'information et de la communication, et d'autre part, de
construire un marché régional compétitif. La
réduction des distances géographiques favorise le
développement des échanges intracommunautaires. Pour que ces
échanges soient effectifs, il faut des infrastructures de communications
intégratrices.
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