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De l'immunité pénale des vols commis entre parents et allies en droit rwandais

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par Richard KAYIBANDA
Université nationale du Rwanda - Licence en droit 2008
  

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Section première : Domaine de l'immunité quant aux personnes

Le bénéfice de l'immunité pour des vols dans le cadre de la famille n'est pas reconnu à toute personne fut-elle un parent ou un allié. C'est ainsi qu'il s'avère nécessaire de préciser les bénéficiaires de l'immunité parmi ces derniers. En outre, ces vols peuvent être commis avec le concours des personnes qui ne sont pas des parents ou alliés de la victime. Il convient alors de voir le sort qui leur est réservé. Enfin, une fois les poursuites engagées, il peut surgir la question de prouver que la personne poursuivie bénéficie de l'immunité. Il faut alors préciser à qui incomber la charge de la preuve et quels sont les modes de preuve.

§1. Les personnes jouissant de l'immunité

La jouissance de l'immunité de l'article 397 al. 1 du Code pénal résulte de trois rapports à savoir le mariage, la parenté et l'alliance. Cette immunité est toujours réciproque, en ce sens qu'elle est reconnue entre deux personnes et qu'elle peut être invoquée indifféremment par chacune d'elles pour l'infraction commise au préjudice de l'autre.

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A. Vols commis par les époux au préjudice de leurs conjoints

L'immunité s'applique au vol commis par un époux au préjudice de son conjoint100. Elle suppose, d'abord, naturellement un mariage qui doit être célébré selon les règles du droit civil101et est exclue en matière de concubinage quelque stable qu'il soit102. Elle ne pourra pas non plus jouer au cas de fiançailles103. Pour l'application de cette disposition, il faut se placer au moment de la commission des faits. C'est ainsi que ne bénéficie pas de l'immunité l'individu coupable du vol qui épouse sa victime postérieurement à la consommation de l'infraction104.

Force est de souligner que l'immunité survit à la dissolution du mariage par le décès. Elle joue donc au cas où un époux survivant soustrait un objet qui avait appartenu à son conjoint décédé. Il est à noter qu'elle n'est pas réciproque : le conjoint survivant pouvant l'opposer aux héritiers de son époux prédécédé, mais ces héritiers ne peuvent, eux, l'invoquer contre le conjoint survivant105.

Cependant, il se pose la question de savoir si l'immunité survit au divorce. Qu'adviendra-t-il si les faits ont eu lieu pendant l'instance en divorce ou pendant que les époux sont séparés de corps?

Pour la première question la doctrine et la jurisprudence ont répondu par la négative. En effet, l'immunité est exclue quand le mariage est dissous par le divorce, celui-ci faisant perdre la qualité de conjoint106. Ainsi le vol commis par un époux au préjudice de son conjoint est punissable s'il l'a été depuis que le divorce a été admis par un jugement ou un

100 Cass. crim. 20 novembre 1991 en ligne sur

<< http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000007547931&fastReqId=2138910064 &fastPos=4&oldAction=rechJuriJudi», consulté le 25/05/2008.

101 B. MPANABANGA, Le vol et sa répression en droit rwandais, Mémoire, Butare, UNR, 1983, p. 73 (non publié).

102 M. L. RASSAT, supra, note 31, p. 196 et P. GATTEGNO, Droit pénal spécial, 5è éd., Paris, Dalloz, 2003, p. 225.

103 Cass. crim. 29 juill.1948, JCP 1949. VI. 137.

104 R. KINT, op. cit., p. 124; C. RAYMOND, op. cit., p. 170; B. MPANABANGA, op. cit., p. 74 et Cass. crim. 13 mars 1951, Bull. crim., no 90.

105 Encyclopédie Dalloz, Répertoire de Droit Pénal et procédure pénale, << Vol », par M. P. LUCAS DE LEYSSAC, no 309.

106C. RAYMOND, op. cit., p. 170, no 777; B. MPANABANGA, op. cit., p. 74 ; et Cass. crim. 12 mai 1970, Bull. crim., no 160.

arrêt passé en force de chose jugée et avant que l'officier de l'état civil qui en a reçu la signification en ait transcrit le dispositif dans ses registres107.

Pour les vols commis pendant l'instance de divorce le bénéfice de l'immunité reste applicable108. En effet, à notre avis, si l'immunité n'est exclue que par un jugement ou un arrêt coulé en force de chose jugée qui prononce le divorce, c'est qu'elle reste tant que ce dernier n'est pas encore prononcé.

L'immunité continue à jouer également en cas de séparation de corps109et a fortiori en cas de séparation de fait. En l'absence de disposition légale contraire, le bénéfice de l'immunité n'est perdu qu'avec le jugement prononçant le divorce comme il en est le cas en droit belge110.

Cependant, en droit français il n'en était le cas que sous l'empire du droit antérieur (art.380 ancien Code pénal français) où l'immunité continuait à jouer pendant l'instance en divorce, même s'il y avait eu autorisation à domicile séparé et n'était pas non plus atteinte par la séparation de corps111. Du vivant des époux, l'immunité avait une durée identique à celle de l'institution du mariage. Désormais, elle cesse si cette dernière est entamée par une séparation de corps ou une autorisation à résidence séparée (art.311-12 nouveau Code pénal français)112.

Enfin, force est de préciser que l'immunité couvre les infractions commises sur les biens propres, comme celles commises sur les biens communs113. Dès lors l'un des époux agissant comme administrateur de la communauté et non comme propriétaire unique peut disposer des biens de la communauté sans le consentement de l'autre; mais ce droit d'administration ne l'autorise pas à soustraire frauduleusement ces biens de communauté dont l'autre conjoint est copropriétaire114. A ce propos, il faut souligner qu'en droit rwandais l'accord des deux époux est requis dans les actes de donation d'un bien immobilier et d'un

107 C. RAYMOND, op. cit., p. 170, no 778.

108 B. MPANABANGA, op. cit., p. 74

109 R. KINT, op. cit., p. 124.

110 J. S. G. NYPELS et J. SERVAIS, op. cit., p. 428.

111 Cass. crim. 15 févr. 1956, Bull. crim., no 157.

112 Voy. aussi Cass. crim. 14 déc. 1999, Bull. crim., n° 303.

113 Encyclopédie Dalloz, Répertoire de Droit Pénal et procédure pénale, « Vol », par M. P. LUCAS DE LEYSSAC, no 305.

114 C. RAYMOND, op. cit., p. 169, no 774.

bien du patrimoine de la communauté ainsi que la reconnaissance d'un droit quelconque sur ces biens quel que soit le régime matrimonial et les modalités de gestion du patrimoine des époux115.

A notre avis, il faudrait apporter des exceptions au bénéfice de l'immunité quand les époux sont séparés de corps ou même de fait parce que dans cette situation les époux sont animés par des sentiments de haine de façon que l'un ou l'autre peut compromettre sciemment les intérêts de son partenaire. De surcroît, la crainte d'un divorce subséquent peut pousser l'un des conjoints à soustraire certains biens au préjudice de son partenaire.

Qu'en est-il maintenant des vols entre personnes unies par les rapports de parenté ?

B. Vols commis par ascendants au préjudice des descendants et vice versa

L'immunité de l'article 397 al. 1 du Code pénal est restreint à la parenté en ligne directe, à l'infini s'il y a lieu, mais les collatéraux ne peuvent y prétendre116. Ainsi elle n'est pas applicable ni entre oncle et neuve ni entre frères ou soeurs même s'ils vivent au foyer de la victime en raison de l'interprétation stricte117.

L'immunité entre ascendants et descendants est réciproque. Par conséquent, sont couverts par le bénéfice de l'immunité les vols commis par les enfants au préjudice de leur père ou mère, grands-parents ou aïeux, et inversement les vols commis par parents au préjudice de leurs enfants, petits-enfants ou arrière-petits-enfants.

La filiation, source de parenté, doit être légalement établie118 peu importe qu'elle soit légitime, naturelle ou adoptive119.

115 Art. 21 de la Loi no 22/99 du 12/11/1999 complétant le livre premier du code civil et instituant la cinquième partie relative aux régimes matrimoniaux, J.O.R.R., no 22 du 15/11/1999.

116 R. KINT, op. cit., p. 125.

117 Cass. crim. 15 juin 1983 en ligne sur

« http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007522463 &fastReqId=983625790&fastPos=41 », consulté le20/05/2008 et Cass. crim. 4 juin 2002 en ligne sur

« http://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do;jsessionid=0FF3B78D74012B51ACA043A45716A4.tpdjo0 7v_3?oldAction=rechJuriJudi&idTexte=JURITEXT000007590310&fastReqId=1445175805&fastPos=16 », consulté le 17/05/2008.

118 C. RAYMOND, op. cit., p. 167, no 761.

119 M. L. RASSAT, supra, note 31, p. 197.

Les enfants naturels, s'ils sont reconnus, bénéficient de l'immunité de l'article 397 al. 1 C.P. car la loi ne distinguent pas. Mais le lien de famille, pour l'enfant naturel, s'arrête au père ou mère qui l'a reconnu et le bénéfice de l'immunité ne va pas au delà de cette parenté120. Conséquemment, le bénéfice de l'immunité ne peut être invoqué par un fils naturel reconnu qui a commis un vol au préjudice d'un ascendant de sa mère ou de son père. L'immunité s'applique également à l'enfant naturel légitimé par un mariage subséquent de ses parents, qui commet un vol au préjudice du second mari de sa mère, cet enfant ainsi reconnu et légitimé ayant les mêmes droits qu'un enfant légitime121.

Quant à la parenté adoptive, il faut préciser que l'immunité de l'article 397 C. P. trouve application 122; mais elle ne s'étend pas au delà du premier degré123. Le bénéfice de l'immunité qui couvre les vols par les descendants au préjudice de leurs ascendants ne peut être invoqué par l'auteur d'un vol qui, sans avoir été adopté légalement par la victime, prétend avoir été par elle adopté de fait124.

La question qui se pose, enfin, est de savoir si l'immunité peut jouer pour des infractions commises avant l'établissement de la filiation.

La réponse à la question semble dépendre en réalité de la nature de l'acte ou du jugement qui établit la filiation. Si le jugement est constitutif comme en matière d'adoption, la filiation n'existe qu'à compter du jugement et ne fait donc pas obstacle à la poursuite des vols commis avant son établissement125. Au contraire, si le jugement ou l'acte qui établit la filiation est déclaratif (ainsi en est-il de la reconnaissance de l'enfant naturel), la filiation est considérée comme ayant existé avant l'acte ou le jugement qui ne fait que la constater126, et empêche donc en application de l'article 397 al. 1 du Code pénal la poursuite des infractions commises entre les personnes reliées par ce lien de filiation.

120 J. S. G. NYPELS et J. SERVAIS, op. cit., p. 429; B. MPANABANGA, op. cit., p. 74 et R. KINT, op. cit., p. 124.

121 C. RAYMOND, op. cit., p. 168, no 763 et art. 323 de la Loi n° 42/1988 du 27 Octobre 1988 portant titre préliminaire et livre premier du code civil, J.O., 1989 (ci-après CCL I).

122 Article 363 al. 2 in fine CCL I

123 Ibid.; B. MPANABANGA, op. cit., p. 74 et R. KINT, op. cit., p. 124.

124 C. RAYMOND, op. cit., p. 168, no 764.

125 V. MALABAT, op. cit., p. 276.

126 Ibid.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld