5. Conclusion.
Le Droit à l'éducation est un droit
inaliénable reconnu par la Déclaration Universelle des Droits de
l'Homme86 à tout être humain, sans distinction de sexe,
de race ou de religion et relayé par des textes et traités
internationaux comme la Charte africaine des droits de l'homme et des Peuples
adoptée en 1981 par l'Organisation de l'unité africaine, la
Convention des droits de l'enfant, adoptée à New York par
l'Assemblée générale des Nations unies en 1989, etc.
Au terme de notre travail, il est apparu que tous les êtres
et habitants des nations ne bénéficient pas de ce droit tel qu'il
est souhaité et largement exprimé.
Au Bénin, le taux d'analphabétisme avoisine les
67,4% ; 7 personnes sur 10 âgées de 15 ans et plus sont
analphabètes ; 6 personnes de 15 ans et plus sur 10 n'ont jamais
été à l'école. Pour les enfants de 6 à 14
ans en 2002, le taux brut de scolarisation est de 57,8% et le taux net est de
51,1%. Avec seulement une personne sur deux âgées de six à
quatorze ans en cours de scolarisation, le Bénin est loin de
l'universalité de la scolarisation87.
Le développement durable se fondant « sur la mise
en oeuvre d'une utilisation et d'une gestion rationnelles des ressources
(naturelles, humaines et économiques), visant à satisfaire de
manière appropriée les besoins fondamentaux de l'humanité
», pour y parvenir, il faudra l'implication active et rationnelle de
toutes les ressources disponibles ; ressources humaines au premier chef ;
d'où la nécessité de l'instruction maximale ou de
l'ignorance zéro à faire prévaloir.
Tout Etat a le devoir de prendre toutes les dispositions afin
que tous les enfants sans exception et les adultes soient éduqués
et alphabétisés. Il faudra pour cela tout d'abord éviter
les déperditions scolaires, les exclusions classiques et les
échecs liés à l'institution scolaire elle-même. Or,
les investigations menées ont fait ressortir, au nombre des handicaps
à l'atteinte de ces objectifs, que la langue d'enseignement (langue
étrangère) représente dans beaucoup de cas un obstacle
à l'évolution de l'enfant et contribue à la hausse du taux
d'échec observé en milieu scolaire.
De plus, toutes les démonstrations ont abouti à
la conclusion que les études primaires en langues nationales (langues
premières des écoliers africains en général)
représentent un avantage certain au point de vue scientifique et
technique.
86 Texte adopté le 10 décembre 1948 par
l'Assemblée générale des Nations unies.
87 Ce taux représente " le rapport des
personnes qui savent lire, écrire et comprendre une langue quelconque,
étrangère ou nationale, à la population en âge
d'être alphabétisée (15 ans et plus) " (INSAE 2003, RGPH
3).
Pourtant, malgré l'avalanche des déclarations et
actes politiques pour reconnaître la valeur et l'utilité des
langues nationales dans le développement, la situation est restée
inchangée.
« Dans un pays où la grande majorité est
analphabète, l'alphabétisation est un élément du
droit à l'éducation et un indicateur de bonne démocratie.
Elle favorise de fait l'émergence d'un véritable Etat de droit
qu'on peut définir comme un Etat où les droits humains sont
garantis et promus »88
Les langues nationales pour supports
d'enseignement/apprentissage dans le contexte des programmes par
compétence sont plus bénéfiques. En effet, en se servant
d'une langue maternelle pour l'enseignement/apprentissage, « il y a
continuité entre les savoirs du milieu et les savoirs scolaires : le
maître aide l'apprenant à mieux dire le monde, avec plus de
précision et d'originalité, mais il ne détient pas tous
les savoirs »89 cela permet plus de laisser la « place
à l'esprit critique, au doute, à la formulation
d'hypothèses, à l'erreur » et le développement
méthodique et ordonné de l'esprit scientifique, comme le
prône si bien les nouveaux programmes d'études en vigueur
actuellement au Bénin. En un mot, l'enseignement/apprentissage en
langues nationales développe une théorie
école-milieu/milieu-école90
Avec cette méthode à expérimenter,
enseigner/apprendre ne sera plus « assimiler des contenus sous forme de
mots, [mais plutôt] organiser des informations (ou des demandes
d'information) sous forme d'opérations »91, ou autres
activités pédagogiques à la disposition de l'enfant.
Le développement à la base aujourd'hui
nécessite la formation des populations à leur auto-prise en
charge et leur permettant d'assurer leur participation efficiente à
l'animation de la vie publique, sociale, économique et politique et
à leur participation aux prises de décisions de façon
responsable dans la cité.
Dans un pays où plus de 80% de la population est
analphabète, l'enseignement / apprentissage en langues nationales, fait
de façon rationnelle et structurée, accompagnée d'une
formation à la citoyenneté responsable se trouve une alternative
avantageuse capable de soutenir l'école traditionnelle dans ce nouveau
contexte de vaste réforme du système éducatif et de
développement durable.
88 AHANHAZO GLELE, M., 1999, « L'Etat de droit
et droits de la personne humaine sont intimement liés... Ils
entretiennent des liens dialectiques », in L'Etat de droit, les droits
de la personne humaine et les libertés publiques dans la Constitution du
11 décembre 1990 », Actes du Colloque sur l'évaluation
critique de la mise en oeuvre des droits de la personne humaine et de la
pratique de la démocratie au Bénin, Cotonou, 17-18 septembre
89 BAUDIN, André, 1992, Le laboratoire des
jeunes années. La langue de la construction des savoirs", in
Diagonales n° 21, p. 38.
90 Idem, ibid.
91 Idem, ibid.
L'enseignement/apprentissage en langues nationales n'est pas
un discours pour la valorisation des langues et cultures africaines ; c'est un
outil scientifique d'éducation de fond, un moyen sûr et efficace
de développement efficient et durable ; c'est de cela que les pays
africains ont d'abord besoin pour mieux décoller sur tous les plans.
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