3.8.5. Un environnement lettré en langues
nationales.
La promotion d'un environnement lettré en langues
nationales représente un moyen important pour le développement
des langues nationales.
L'environnement lettré suppose par exemple que dans les
marchés, les services administratifs, les différentes
institutions, les rues et différents artères, il y ait
possibilité de lecture dans les langues nationales ; que les produits
commerciaux, les actes et papiers administratifs, les messages d'information et
de communication soient transmis en langues nationales. C'est en fait, toute
action ou toute initiative pouvant favoriser le contact permanent des
populations avec les langues afin de permettre leur développement ;
c'est l'ensemble des actions concrètes pouvant permettre la lecture
systématique en langues nationales.
Dans le contexte béninois, la décentralisation
amorcée devrait être un soutien actif pour la promotion des
langues nationales. On devrait par exemple écrire en langues nationales
sur des documents élémentaires (notice d'utilisation de produits,
facturiers, actes de naissances, cartes nationales d'identités ou autres
papiers administratifs etc.) ou sur des plaques d'indication (écriteau,
panneaux, plaques de renseignements etc.). Cela pourrait progressivement
permettre l'apprentissage et la compréhension des langues nationales.
Pourquoi ne pas reconnaître [et admettre] que, dans un
pays africain, un fonctionnaire doit nécessairement avoir reçu
une formation bilingue. Dans ses rapports avec l'administration, il emploie le
français ; dans ses contacts avec le public, il s'exprime en langue
nationale. Il devrait donc être dit clairement que beaucoup de
métiers en Afrique exigent de leurs agents qu'ils soient bilingues. Il
faudra sensibiliser à cette évidence aussi bien les enseignants
que les parents d'élèves. Alors seulement les
élèves qui commenceront l'apprentissage de leur langue nationale
sauront que cette étude comporte des débouchés et les
aborderont comme une discipline à part entière81.
Diagonales n° 21, p. 38.
80 Idem, Ibid., p. 38
81 DIKI-KIDIRI, Marcel, 1992, "Bilingues,
réclamez !", propos recueillis dans Diagonales n° 21, p.
26.
3.9. En a-t-on les moyens aujourd'hui ?
Serait-ce si difficile aujourd'hui, techniquement et
scientifiquement d'enseigner les langues nationales véhiculaires
à l'école au Bénin ou ailleurs en Afrique ?
Cela ne date pas d'aujourd'hui ; même si l'option
était faite il y a plusieurs décennies ce ne sont pas les moyens
techniques, intellectuels ou même matériels ou financiers qui
pourraient faire blocage à une nécessité de
développement. La question est de savoir définir ses
priorités.
Au plan continental, les documents pédagogiques
existent dans les principales langues véhiculaires : yoruba, peul,
bambara, wolof, haussa, ewe, malinke, more, etc. Toutes possèdent des
manuels d'alphabétisation, des grammaires, des lexiques etc.
Au plan national, beaucoup de langues véhiculaires
possèdent des documents pédagogiques, des manuels
d'alphabétisation, des guides etc. ; des langues comme le yoruba, le
fon, le gun, le aja, le baatonum, le ditammari, le dendi ne manquent pas de
documents élémentaires d'enseignement/apprentissage qu'il faudra
enrichir.
Une politique rigoureuse et orientée pour soutenir les
instituts pédagogiques, les centres de linguistique appliquée et
les structures chargées de la promotion de l'alphabétisation
pourrait très rapidement permettre de compléter les ouvrages
déjà existants en vue de renforcer le parc bibliothécaire
et pédagogique des ouvrages et documents en langues nationales.
Il serait redondant de chercher à démontrer
l'existence de compétences intellectuelles et techniques parce
qu'à notre sens ce serait une pure injure à l'élite
africaine et béninoise que de vouloir polémiquer sur la
disponibilité de cadres capables de conduire des programmes en
matière d'enseignement/apprentissage/évaluation en langues
nationales. Et personne, nous osons le croire, ne nous contredirait.
Les moyens existent donc. Il suffit d'oser appliquer ce sur quoi
tout le monde s'entend. Il faut oser entreprendre, oser commencer.
Chapitre 4. Pistes pour l'enseignement/apprentissage en
langues nationales au Bénin.
Au terme de notre travail, il est judicieux de proposer eu
égard à toutes les expériences passées en revue,
des pistes concrètes pour le démarrage effectif de
l'enseignement/apprentissage en langues nationales.
Ces propositions se situent globalement dans le contexte de la
décentralisation au Bénin.
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