2. Liberté de se vêtir et lutte contre les
discriminations illicites fondées sur l'apparence physique37 ;
L'article L 1132 -138 du Code du travail s'est enrichi
d'une nouvelle hypothèse de discrimination depuis la loi du 16 novembre
2001 : l'apparence physique.
35 Cass.soc.12 novembre 2008, n°07-42.220, F-D, Monribot c/
Sté Sagem défense sécurité , JurisData n°2008-
046041.
36 Cass.soc. 28 mai 2003, n°1507 FS-BPRI, Monribot c/ Sagem,
JurisData n°2003-019205.
37 Voir Danielle Corrignan-Carsin, « la liberté de se
vêtir au temps et au lieu du travail n'est pas une liberté
fondamentale », La Semaine Juridique Edition
Générale, n°30, 23 juillet 2003.
Or, une partie de la doctrine considère que la
liberté corporelle se manifeste par le choix de son apparence et,
notamment, de ses vêtements39
Dans l'arrêt de la chambre sociale du 28 mai
200340, on retient que les juges de la Cour d'appel de Rouen n'ont -
implicitement - pas retenu cette assimilation en estimant qu'aucune disposition
n'autorise d'étendre la liste fixée par L.1132-1 à
d'autres libertés.
Dans son arrêt de rejet, la Cour de cassation s'est
bornée à écarter la liberté de se vêtir du
champ des libertés fondamentales sans se prononcer sur ce point
À l'époque des faits, l'article L 1132-1 ne
visait et ne sanctionnait par la nullité que certaines
différenciations illicites fondées sur l'origine, le sexe, les
moeurs, la situation de famille, l'appartenance à une ethnie, une nation
ou une race, les opinions politiques, les activités syndicales ou
mutualistes, les convictions religieuses, l'état de santé ou le
handicap et l'exercice normal du droit de grève.
38 Article L.1132-1 du Code du travail : « Aucune
personne ne peut être écartée d'une procédure de
recrutement ou de l'accès à un stage ou à une
période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut
être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure
discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à
l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses
dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte
contre les discriminations, notamment en matière de
rémunération, au sens de l'article L. 3221-3, de mesures
d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de
reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion
professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son
origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation sexuelle, de son
âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses
caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa
non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou
une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou
mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son
nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son
handicap ».
39 Voir Pr. Lyon-Caen, les libertés publiques et
l'emploi, éd. La Documentation Française, 2003.
40 Cass.soc. 28 mai 2003, n°1507 FS-BPRI, Monribot c/ Sagem,
JurisData n°2003-019205.
En première instance, le salarié avait
effectivement dénoncé la discrimination sexuelle à
l'égard des hommes, les femmes, selon lui, bénéficiant
d'un sort meilleur puisque le port du bermuda était autorisé pour
les femmes41.
Le Conseil des Prud'hommes a estimé, invoquant les
usages vestimentaires, que la pratique discriminatoire n'était pas
établie car le droit de l'intéressé de se vêtir
comme bon lui semble ne bénéficiait pas à l'époque
de la protection de l'article L.1132-1 du Code du travail.
L'article ayant été modifié par la loi du
16 novembre 200142, il importe de savoir si la tenue vestimentaire
est ou non susceptible de relever de l'apparence physique, nouveau motif de
discrimination interdite.
Il est intéressant, à ce sujet, de noter qu'au
cours des débats parlementaires ont été seulement
envisagés à ce titre la taille, le poids et
l'esthétique.
Le maquillage, la coiffure, les bijoux, les vêtements
doivent-ils cependant être exclus de la notion d'apparence physique ?
Si la réponse devrait être positive, la sanction
prévue serait celle de la nullité du licenciement prononcé
et l'intervention du juge des référés ordonnant la remise
des choses en leur état antérieur serait alors parfaitement
justifiée.
C'est d'ailleurs en ce sens que, interprétant la notion
d'apparence physique, le Conseil des Prud'hommes de Paris, le 17
décembre 200243, par voie du référé, a
prononcé la nullité du licenciement et ordonné la
réintégration d'une salariée portant un foulard islamique
: « si le législateur avait entendu limiter l'apparence
physique au corps, il pouvait évoquer, simplement, l'apparence
corporelle ou même, de manière plus restrictive, la physionomie
» ; « lorsqu'un salarié se présente, c'est son
aspect général qui est vu, c'est-à-dire aussi bien
sa
41 C.prud.Rouen 30 août 2001, Monribot c/ SA Sagem.
42 Loi n°2001-1066 du 16 novembre 2001 relative à la
lutte contre les discriminations, NOR :MESX0004437L
43 C.prud.Paris 17 décembre 2002, Dallia Thari c/
Sté Téléperformance
physionomie, sa constitution physique et sa tenue
vestimentaire. Il y a donc lieu de considérer que la notion d'apparence
physique renvoie à l'ensemble de ces éléments
».
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