2. Sur la finalité propre de l'entreprise,
La chambre sociale a employé pour la première
fois l'expression « finalité propre de l'entreprise »
pour désigner l'un des éléments pouvant contribuer
à justifier un licenciement fondé sur le comportement du
salarié dans un arrêt devenu célèbre dit du
sacristain60de Saint Nicolas du Chardonnet : « il peut
être procédé à un licenciement dont la cause
objective est fondée sur le comportement du salarié qui, compte
tenu de la nature de ses fonctions et de la finalité propre de
l'entreprise a créé un trouble caractérisé au sein
de cette dernière ». Jusque là, on se
référait au « caractère propre » de
l'entreprise et cela, seulement pour désigner la
spécificité de ce qu'il est convenu d'appeler « les
entreprises de tendance ».
La finalité propre de l'entreprise renvoie à la
protection de ses intérêts et à sa «
bonne marche »61, notion qui intègre des
considérations liées à plusieurs éléments,
à savoir des
59 CA Toulouse, 7 juin 2001, n° 00-4707 Cau c/ Sarl
Escaliers Dumas
60 Cass.soc.17 avril 1991, n° 1704 P, Painsecq c/
Association Fraternité Saint-Pie X : RJS 5/91 n° 558, Bull. civ. V
p. 122 n° 201
61 CA Montpellier 21 juin 1990, n°89-845, ch.soc.A, SARL DMG
Intersport c/ Clemens.
impératifs d'hygiène et de sécurité,
le contact avec la clientèle, ou encore la décence et les bonnes
moeurs.
2.1. Impératifs d'hygiène et de
sécurité
Concernant les impératifs d'hygiène et de
sécurité, les restrictions à la liberté de choisir
ses vêtements et son apparence sont autorisées par l'article
L.4221-1 du Code du travail quidispose que « les
entreprises doivent être aménagés de manière
à garantir la sécurité des travailleurs ».
L'employeur a une obligation de résultat de garantie de
sécurité et de santé du salarié sur le lieu de
travail, aussi, il a non seulement le droit mais également l'obligation
de fournir aux salariés les tenues vestimentaires appropriées.
Ainsi, dès lors que la société
démontre que ces restrictions sont conformes à cette
finalité, les refus des salariés de se conformer à ces
exigences doivent être sanctionnés62
62 CA Paris, 17 juin 1992, n° 92-31363, 18e ch. C, Millot c/
Sté AM Chaudronnerie Serrurerie Générale.
2.2.Contact avec la clientèle,
En ce qui concerne le contact avec la clientèle, cette
notion s'est peu à peu imposée dans la jurisprudence comme une
cause objective de licenciement d'un salarié dans les contentieux
où la liberté vestimentaire du salarié est en jeu.
Imposer une tenue au salarié peut en effet être
tout à fait utile afin, premièrement, que le client puisse
repérer son interlocuteur, mais aussi afin de véhiculer au mieux
l'image de marque de l'entreprise.
Ainsi, une salariée qui refuse de porter la tenue de
travail imposée par un article du règlement intérieur d'un
magasin d'une enseigne de la grande distribution au motif que celle-ci
était affectée à la salle des coffres du magasin et
qu'elle n'était ainsi amenée que rarement à entrer en
contact avec la clientèle, peut être licenciée car
l'article litigieux du règlement intérieur « en ce qu'il
a pour but notamment de permettre aux clients d'identifier immédiatement
le personnel du magasin et d'améliorer ainsi l'image de marque de
celui-ci n'apporte aux droits et libertés de Melle X aucune restriction
qui n'est pas justifiée par la nature de la tâche à
accomplir et proportionnée au but recherché
»63.
De la même manière, véhiculer une mauvaise
image de marque de l'entreprise auprès des clients de en raison d'une
tenue vestimentaire jugée inconvenante peut être une cause
objective de licenciement.
Dans l'arrêt de la chambre sociale du 28 mai
200364, l'examen des décisions de première et seconde
instance montre que les juges ont considéré que le port d'un
bermuda, inhabituel pour un administratif, donnait une image de marque
négative de l'entreprise auprès des clients. Il apparaît
que le salarié travaillait dans un bureau paysagé ouvert et
vitré et était amené à se déplacer dans des
locaux où circulaient également des clients.
63 CA Versailles, 21 septembre 1992, n° 91-6646 Syndicat du
commerce 78 et a. c/ Sté Carrefour Montesson
64 Cass.soc.28 mai 2003, n°1507 FS-BPRI, Monribot c/ Sagem,
JurisData n°2003-019205
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