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Les défis de la sécurité routière en milieux urbain au Cameroun: le cas des motos taxis a Yaounde

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par Guy Rostand DJIEPMO NDJOUKYA
Université de Yaoundé - Master Economie des transports et logistique des échanges 2008
  

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Section 2 : Impacts socio-économiques de l'usage de la route

L'une des raisons de l'intervention de l'Etat dans le secteur des transports est l'existence des dysfonctionnements liés à la présence des externalités positives et négatives. D'après l'économiste A. C. Pigou (1920), Les externalités représentent l'effet de la diffusion par un agent économique vers l'ensemble de l'économie d'un effet positif ou négatif, mais non intégré dans ses calculs économiques. L'étude des différents coûts liés à l'activité routière nous permettra de déterminer l'impact économique de la sécurité routière sur la société. Ainsi, la maîtrise des coûts économiques de la mise sur pied des infrastructures routières, de la mise en circulation des véhicules, et de la formation des usagers de la route sont des facteurs déterminants de la sécurité routière, ceci dans la mesure où il est indispensable de construire les routes conformes, et de veiller à l'entretien de celles-ci dans une optique de sécurité routière. La faiblesse des moyens financiers et matériels dans les pays en développement limite la capacité des pouvoirs publics à intervenir dans le secteur des transports et accroît l'insécurité routière.

2.1 : Analyse des coûts de l'usage de la route

La mise sur pied des infrastructures routière est déterminante pour le développement économique. Le Professeur Frits Voigt déclarait déjà en 1967 que « le transport est le moteur de la croissance économique11(*) » ; bien que le transport représente un ensemble assez vaste, l'atteinte de l'idéal pour ce qui est du transport routier nécessite la mise sur pied d'un système de transport assez fluide et sécurisé ; car l'insécurité routière engendre des coûts importants pour un pays et freine le développement économique. La notion de coût de transport ne prend pas seulement en compte ce que l'usager paie, notamment les dépenses du véhicule ou le coût monétaire (prix du taxi ou ticket de bus), elle fait aussi appel aux coûts non monétaire supportés par les usagers (temps de transport), aux coûts occasionnés par le reste des utilisateurs à la collectivité toute entière (dépense d'infrastructure, coûts d'insécurité et d'environnement), aux dépenses d'exploitation pour les travaux publiques.

La sécurité routière représente ici l'ensemble des mécanismes juridiques, économiques, politiques et sociaux mis sur pied par les pouvoirs publics afin de prévenir, d'atténuer, ou de gérer les différentes défaillances issues du trafic routier. La mise sur pied de ces mécanismes, qui pour la plus part sont constituer des infrastructures de transport et de la réglementation y afférente nécessite des coûts important. Ces coûts sont répartis en coûts internes et externes.

2.1.1 : Les coûts internes de l'usage de la route

Les coûts internes de l'usage de la route sont ceux directement rattachés au système ou aux activités de transport (Peden M. et al. 2004 p.2). On trouve ici les coûts liés aux financements des infrastructures de transport, les coûts privés ou individuels, composés des coûts d'acquisition d'un véhicule personnel, ou des coûts de création et d'exploitation d'une entreprise de transport, les coûts de formation des usagers, les coûts de mise en circulation, et d'entretien des véhicules. Ces derniers coûts sont généralement les plus perceptibles par les usagers.

2.1.1.1 : Les coûts de financement des infrastructures de transport

Les coûts de financement des infrastructures de transport représentent l'ensemble des investissements nécessaires, visant à mettre à la disposition des usagers, des infrastructures de transport permettant de faciliter leurs déplacements, tout en assurant leur protection. Ces coûts sont généralement supportés par les pouvoirs publics, et aussi souvent par les opérateurs privés dans le transport routier. Il est important de noter que, supporter ces coûts par les opérateurs privés est une opération assez délicate dans la mesure où les infrastructures de transport possèdent les caractères de biens collectifs, d'où la difficulté pour les opérateurs privés de rentrer en possession de leurs fonds après un tel investissement.

2.1.1.2- Les coûts privés de l'usage de la route

Ceux-ci sont les coûts supportés par les agents économiques de type privés ou individuels, on peut citer entre autre, les usagers et exploitants pour le transport public et propriétaires pour le transport privé (Peden M. et al. 2004 p.18). Ainsi, dans une optique de sécurité routière, les agents économiques doivent investir dans l'achat de véhicules respectant tous les critères de sécurité routière, dans le paiement des taxes imposées par les pouvoirs publiques et qui constituent la source de financement des infrastructures et de la régularisation des activités de transport. Egalement les usagers de la route doivent investir dans leur formation pour l'obtention d'un permis de conduire, et aussi pour l'obtention d'une police d'assurance.

2.1.2 - Les coûts externes

Les coûts externes sont principalement les coûts issus des effets négatifs dus aux activités de transport (Peden M. et al. 2004 p.16). Ces effets qui en général sont les accidents de circulation et la pollution font supporter des coûts énormes aux individus et à la société toute entière. A titre d'exemple, d'après le Ministère des Transports, au Cameroun, les accidents de la circulation impliquent un coût humain, économique et social lourd. Il y a 1200 morts par an sur les routes pour un coût évaluer à 22 milliards de Francs CFA, soit 45 Millions USD, d'après la Banque Mondiale ce coût représente 1% du PNB en moyenne pour les pays africains, d'où la nécessité de s'investir dans la lutte contre l'insécurité routière afin de réduire ces effets externes. Les coûts externes de sécurité routière sont repartis en coûts sociaux et environnementaux.

2.1.2.1- Les coûts sociaux

Les accidents de circulation engendrent des coûts qui sont souvent ignorés, ou difficile à prendre en compte par les calcules économiques, car ceux-ci sont distincts des coûts liés aux soins médicaux et aux indemnisations par les compagnies d'assurances, et sont qualifiés de coûts indirects ou de coût sociaux. Le coût social est supporté de près ou de loin par toute la collectivité. Ainsi, d'après la Banque Mondiale et l'Organisation Mondiale de la Santé12(*), pour chaque personne tuée, blessée ou rendue infirme par un accident de circulation, tout un ensemble d'autres personnes, y compris la famille et l'entourage de l'intéressé, sont profondément affectées. A l'échelle mondiale, des millions de personnes doivent faire face au décès ou à l'incapacité des membres de leur famille à la suite d'accidents de la route. Il est impossible d'attribuer une valeur à chaque vie humaine perdue ou à chaque souffrance endurée, et d'additionner ces valeurs pour calculer un chiffre rendant compte du coût social global des accidents de la circulation et des traumatismes qu'ils occasionnent. Il est très important de mener des actions visant à limiter au maximum les accidents de circulation.

C'est dans le même ordre d'idées que le Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation de 2004 stipule que le coût économique des accidents de la circulation et des traumatismes qu'ils engendrent sont estimés à 1 % du produit national brut (PNB) dans les pays à faible revenu, 1,5 % dans les pays à revenu intermédiaire et 2 % dans les pays à revenu élevé13(*). Ces statistiques dénotent le fait que les accidents de circulation grèvent lourdement, non seulement les économies mondiales et nationales, mais aussi les finances des familles. De nombreuses familles sombrent dans la pauvreté à la suite du décès du soutien de famille ou du surcroît de dépenses qu'entraîne la prise en charge de membres de la famille rendus infirmes par un accident de la circulation.

Au Cameroun, dans les grandes agglomérations telles que Yaoundé et Douala, les propriétaires et les usagers de véhicules ne tiennent en générale compte que des coûts privés (acquisition du véhicule, coût monétaire du transport, etc.), mais, les piétons et les autres usagers respirent les gaz d'échappement, supportent le bruit, la pollution atmosphérique engendrée par la poussière, et les encombrements. Ainsi donc, l'action de sécurité routière devant internaliser les effets externes de l'usage de la route que sont les accidents et la pollution, serrait d'après Pigou (1920), l'instauration d'une taxe devant alourdir les coûts de l'usage de la route et, minimiser les différentes causes d'accident et de pollutions.

La représentation graphique ci dessous illustre le mécanisme d'internalisation de ces effets externes.

Coûts sociaux S

Graphique n°1 Courbe de coûts sociaux.

Prix

PoS

P1

Po

B

A

D

Coûts privés

Qté

Q1 Qo

Source: Stuart cole (2005)

D'après ce graphique l'équilibre, sans tenir compte de l'effet externe sus cité, est obtenu en PoQo c'est-à-dire au point A (lieu de confrontation entre l'offre et la demande de services). Mais, en prenant en compte les accidents de circulation et la pollution atmosphériques. L'équilibre optimale est atteint en P1Q1, c'est-à-dire au point B ce qui traduit une diminution de cette insécurité routière, consécutive à une augmentation des charges liées à l'activité, visant à minimiser les risques (de Qo à Q1 avec Qo>Q1) et une augmentation des prix (de Po à P1 avec Po<P1)

De même, pour une production optimale, (celle qui prend en compte le coût social) d'une quantité Qo, il faudrait un prix PoS > P1 > Po.

Dans le domaine des transports routiers, les coûts liés aux externalités négatives sont spécifiquement ceux issus de la pollution de l'environnement et des accidents de circulation.

2.1.2.2 - Les coûts environnementaux

Les transports sont source de nombreux dégâts sur le plan de l'environnement : le bruit, la pollution de l'air, des eaux, les conséquences esthétiques.

- le bruit ou pollution sonore : c'est l'effet externe le plus direct provoqué par la circulation des véhicules, il est ressentis comme un gène par la population ; ce bruit causé par la circulation routière varie selon les types, et l'état des véhicules.

- La pollution chimique (pollution de l'air): La pollution atmosphérique causée par les transports se caractérise par le dégagement de gaz et d'odeurs. La route intervient pour une bonne partie dans cette forme de pollution, surtout en milieu urbain. En effet, ce sont les petits trajets quotidiens en milieu urbain qui font consommer proportionnellement le plus de carburant et, aussi le soulèvement de la poussière, puisque plusieurs de ces routes ne sont généralement pas goudronnées dans les pays en développement. Par conséquent, rejettent le plus de gaz nocifs dans l'atmosphère. Les effets nocifs de ces différents gaz contribuent à dégrader la santé des riverains, ou de toute la population, et aussi à renchérir le coût de la vie, par l'accroissement de la morbidité.

L'étude effectuée par le Ministère de l'Environnement de l'Habitat et de l'Urbanisme du Bénin14(*) sur la régulation de la pollution atmosphérique d'origine motocycle donne le tableau suivant:

La répartition de la pollution atmosphérique par mode de transport et par différents éléments chimiques.

PARAMÈTRES (TONNES)

NOX

N2O

CH4

COVNM

COV

CO

CO2

Pb

Motos

1133

28

2158

-

221495

316043

1306531

612

Voitures

11440

25

302

-

23426

255482

1352253

5716

Camions

610

7

2

-

179

669

121177

-

Avions

6,62

-

0,0050

0,41

-

2,7

1622,3

-

Navires

218,81

0,25

0,650

15,88

-

69

10333,3

-

Total

13408,42

60,25

2462,7

16,29

245100

572265,7

279191,6

6328

Tableau n°1 : Emissions des gaz à effet de serre dues aux transports dans la ville de Cotonou

Source : MEHU (2000)

Les données du tableau précédent montrent à quels points la pollution atmosphérique liée au transport terrestre est importante; marquant ainsi, en plus des accidents de circulation, le niveau d'insécurité qu'engendre le transport routier. Cette importance pouvant se déterminer par régression linéaire dans l'équation ci-dessous, qui représente en générale l'effet des différents facteurs entrant de façon générale dans le coût de transport. Ainsi, d'après ses modalités de calcule, le coût de transport prend en compte le prix à payer par l'usager, les facteurs qualitatifs de confort, les facteurs qualitatifs de sécurité auxquels ont été attribués des valeurs monétaires, et le temps passé dans le véhicule ou durant l'attente du véhicule de transport.

L'expression de ce coût généralisé est la suivant.

Cg = ã + hè + ?X + mõ + å avec :

· ã : coût monétaire du transport

· è : Temps de transport

· X : indicateur de condition de confort

· õ : indicateur de condition de sécurité

· h, ?, m, paramètres ayant la dimension de valeur unitaire

· å représente tous les éléments et détails entrant dans le coût de transport, et de sécurité non spécifiés et non pris en compte par cette représentation, il peut s'agir des erreurs d'approximation de la forme de la relation fonctionnelle, le nombre choisit de variable explicatives du coût généralisé de transport, et aussi du comportement aléatoire des usagers de la route, qui peut avoir une incidence considérable sur le coût finale du transport.

Une telle équation permet d'établir l'impact de l'insécurité routière dans le coût de transport ou encore la part du coût final de transport liée à la sécurité des usagers de la route et oriente les décideurs sur le niveau d'intervention à appliquer pour assurer la sécurité des usagers de la route.

Ce chapitre nous a permis de passer en revue le concept de sécurité routière, par les différentes approches de la sécurité routière et les impacts socio-économiques de la sécurité routière. Ainsi, ce concept met en exergue les mécanismes de protection des usagers de la route, ceci étant l'élément essentiel, pris en compte lors de la construction des infrastructures routières, des véhicules, et aussi dans la formation des usagers de la route. Nous avons ainsi constaté dans ce chapitre que lorsque la prise en compte de l'homme dans l'organisation du trafic routier est mal assurée, les conséquences économiques sont très lourdes.

Pour atteindre l'objectif de sécurité routière, un certain nombre d'instrument est généralement utilisé.

* 11 Frist Voigt Rapport à la commission économique de l'ONU pour l'Afrique. Addis-Abeba. (1967)

* 12Banque Mondiale et OMS. Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation. 2004. P 2

* 13Pedem et al. Banque Mondiale et OMS. Rapport mondial sur la prévention des traumatismes dus aux accidents de la circulation. 2004

* 14 F. A. VIAGANNOU. (2002) La régularisation de la pollution atmosphérique d'origine taxis moto «Zémidjans» dans la ville de Cotonou. Mémoire de DEA PTCIE

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld