3.2.2 Les faiblesses du mode usuel
Malgré la satisfaction au sujet du processus usuel
manifestée par six acteurs rencontrés, il n'en demeure pas moins
que, selon eux, ce mode présente toutefois des limites et des
faiblesses. Ainsi, les acteurs manifestent leur insatisfaction par rapport au
délai jugé trop long pour régler une réclamation
comportant un important impact financier. Cette situation s'explique par le
fait que les réclamations de cette nature traversent toutes les
procédures incluant celles de la justice avant qu'un règlement
aboutisse. Par exemple, les récentes poursuites de près de 200
millions $ déposées contre Hydro-Québec et sa filiale SEBJ
par les entrepreneurs du projet Eastmain-1 à la Baie
James131, qui démontrent bien les limites du mode usuel
à régler les conflits dans des délais acceptables.
D'autre part, l'accumulation des dossiers non
réglés fait l'unanimité des acteurs comme étant
l'irritant le plus courant de la pratique actuelle en raison des
priorités des administrateurs des contrats où on met plus
d'effort à réaliser les travaux selon les
échéanciers prévus que sur les règlements des
réclamations. Ce phénomène est dû au fait que les
dates clefs du projet sont très importantes, car souvent, le projet
s'inscrit à l'intérieur d'un programme stratégique d'une
importance capitale pour Hydro-Québec. Souvent on demande à
l'entrepreneur d'exécuter les travaux avant même d'avoir conclu
une entente sur le volet financier de compensation relative aux changements
contractuels. Ainsi, l'accumulation de dossiers non
réglés devient, à la fin du chantier, une source
importante de conflits dont la négociation d'un règlement devient
plus ardue et plus difficile en raison des documents manquants ou des personnes
affectées ailleurs sur d'autres projets.
Il existe également une convergence d'opinions des
personnes interviewées où quatre acteurs sur sept sont d'avis que
le mode actuel présente une déficience relativement à la
compétence de la tierce personne qui intervient dans le processus de
règlement. Or, selon ces acteurs, on risque de se retrouver devant un
juge qui, dans la plupart des cas, ne
131 Grammond, Stéphanie (2007). Poursuite de 200 millions
$ contre Hydro-Québec, Journal La Presse, Cahier La Presse
Affaires, Montréal, 14 septembre 2007.
possède pas les connaissances techniques
nécessaires pour comprendre les dossiers appartenant à des
domaines spécialisés et de plus en plus complexes. Ces opinions
expriment l'insatisfaction par rapport au mode judiciaire qui s'acharne sur la
normativité juridique en faisant passer au second plan la
normativité technique qui est plus accessible aux parties pour trouver
un sens au règlement du conflit ordonné par le juge. En plus, les
décideurs sont unanimes pour dire que le recours au mode judiciaire est
coûteux en frais de contentieux et d'experts engagés pour
préparer et défendre les dossiers en litige devant les tribunaux
de droit commun. Cette affirmation est démontrée par le cas
présenté au chapitre 1 concernant la Banque de Montréal
contre Hydro-Québec.
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