2.4 Acteur D-04
L'acteur D-04 est un cadre de première ligne et
siège au comité de gestion de la Direction. Il a passé
plus de 13 ans à Hydro-Québec dans la gestion des projets majeurs
de construction. Avant de rejoindre la société d'État, il
a oeuvré 12 ans avec des entrepreneurs du secteur privé. Ses
opinions sont appréciées pour ce projet de recherche en raison de
sa position et de son expérience dans le secteur public comme donneur
d'ouvrage et dans le secteur privé comme fournisseur
d'Hydro-Québec.
2.4.1 La perception du partenariat
Selon l'acteur D-04, dans le domaine de la construction des
grands travaux, les objectifs communs partagés entre le donneur
d'ouvrage et l'entrepreneur sont perçus à un certain égard
comme une relation commerciale normale plutôt qu'une relation de
partenariat : << Avec les entrepreneurs, je considère que ce sont
des relations commerciales dans lesquelles on devrait éviter de parler
de partenariat; on devra plutôt parler d'objectifs communs. »
(Acteur D-04) Ce qui amène cet interviewé à adopter une
position prudente quant à la définition même du partenariat
que l'entreprise souhaite mettre de l'avant dans ses politiques d'acquisition :
<< Je pense qu'il faut faire attention avec la définition du
partenariat, j'entends beaucoup parler du partenariat par les années qui
courent. » (Acteur D-04)
Il ajoute qu'étant donné que, dans un appel
d'offres public, le donneur d'ouvrage ne participe pas à la prise de
décision du fournisseur, la relation du partenariat cède la place
à une relation commerciale où les intérêts des
parties ne sont pas toujours convergents. << Lorsqu'on entre dans une
relation d'affaires avec un entrepreneur dans le cadre d'un appel d'offres
public, c'est difficile de parler de partenariat. On est dans une relation
commerciale, on n'est pas dans une relation de partenariat. » (Acteur
D-04) À cet effet, selon lui, dans le domaine des contrats de
construction, il est important de bien définir les objectifs communs
entre l'entrepreneur et Hydro-Québec afin d'orienter et d'harmoniser les
actions et les décisions au cours des travaux : << On devra mettre
sur la table des objectifs communs du projet. » (Acteur D-04)
Ces objectifs communs peuvent être le respect des dates
clefs d'un échéancier ou la qualité de l'ouvrage
construit. Il est à remarquer que cet acteur n'a pas mentionné
les coûts, ce qui démontre que dans la réalisation de ses
projets, Hydro-Québec attache plus d'importance à la
qualité et à l'échéancier d'un projet en raison du
manque à gagner important en cas du non qualité ou du retard dans
la mise en service de l'ouvrage qui s'intègre dans un réseau
complexe et interdépendant : << Ces objectifs-là, on les
partage d'une façon commune entre l'entrepreneur et le donneur
d'ouvrage, que se soit au niveau de l'échéancier, que ce soit au
niveau de la qualité. » (Acteur D-04)
Selon la conception de ce décideur oeuvrant dans le
domaine de la construction des grands projets, le vrai partenariat
réside surtout dans la relation horizontale entre deux acteurs
économiques ou sociaux plutôt que dans la relation verticale
client-fournisseur :
<< À mon avis, par exemple, le partenariat que
l'on vit, c'est le projet EASTMAIN A-1 avec la signature de la Paix des braves.
La relation de partenariat qui se met en place avec les CRIS, la façon
que ça déroule présentement, c'est réellement un
partenariat. Parce que HQ/SEBJ ont décidé avec les CRIS d'un
commun accord de réaliser le projet EASTMAIN. Il y avait des
intérêts d'un coté comme de l'autre, pas
nécessairement sur la même base. Alors, je pense, le plus bel
exemple du partenariat selon moi, c'est le projet EASTMAIN A-1 avec les
autochtones.» (Acteur D-04)
Ainsi, les ententes avec les communautés qui ne sont
pas sous forme des contrats de fourniture et qui ne sont pas
considérées comme une relation client fournisseur, sont
perçu comme une vraie relation de partenariat motivée par des
objectifs communs partagés qui sont dans le cas du projet EASTMAIN A-1,
le développement d'un projet hydroélectrique d'envergure.
Associer les communautés locales comme promoteur d'un projet de
développement économique, est un virage qu'Hydro-Québec a
pris pour atténuer les critiques négatives, faire face à
l'opposition non constructive à ses projets et pour mieux concilier ses
objectifs avec ceux des communautés locales directement touchées
par le projet.
De même, cet acteur influant dans le domaine de
réalisation des grands ouvrages hydroélectriques perçoit
le partenariat avec un gain mutuel entre le donneur d'ouvrage et l'entrepreneur
: << Pour qu'un partenariat se tienne, il faut qu'il y ait des gains d'un
côté comme d'un autre des partenaires. » (Acteur D-04).
Toutefois, cet interviewé persiste et rappelle que les
projets de construction ne requièrent pas de la recherche et du
développement de la part de l'entrepreneur et par conséquent il
ne considère pas qu'un entrepreneur en construction des grands travaux
puisse contribuer à la création de la valeur : « Avec les
fabricants, peut-être on s'est rapproché un peu du partenariat.
Mais avec nos entrepreneurs, je ne sens pas que nous sommes là. »
(Acteur D04) Cette opportunité peut se traduire par le raffinement du
design en fonction des conditions du chantier .
Ce gestionnaire considère que la relation avec
l'entrepreneur en construction ne peut pas être une vraie relation de
partenariat car il n'y a pas de partage des bénéfices entre le
donneur d'ouvrage et le fournisseur : « L'entrepreneur est là pour
faire du profit et dans sa tête il n'est pas question de partager ces
profits avec le donneur d'ouvrage. Donc il n'y a pas de partenariat là
car il n'y a pas de partage. » (Acteur D-04)
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