2.3 Acteur D-03
L'acteur D-03 est un avocat de formation, il fait partie de
l'équipe du service juridique d'Hydro-Québec. Il a
déjà été mandaté pour régler des
litiges dans des dossiers provenant des activités de construction des
projets de l'entreprise. Il est à l'emploi d'Hydro-Québec depuis
plus de 8 ans; il a passé 13 ans dans le secteur privé
auparavant. Ses opinions sont importantes car le service juridique agit comme
conseiller du premier choix pour les gestionnaires qui ont à traiter des
conflits avec les fournisseurs.
2.3.1 La perception du partenariat
Selon l'acteur D-03, il arrive des fois où on
s'interroge si le mode de réalisation d'un certain projet est
considéré comme du partenariat ou comme une simple relation
d'affaire entre deux acteurs économiques oeuvrant dans un marché
particulier : « Je ne sais pas si on peut qualifier ce projet du
partenariat. » (Acteur D-03)
Il explique que de plus en plus pour réaliser des
projets spécialisés on laisse les appels d'offres publics pour
des appels de propositions où on invite un nombre très restreins
de fournisseurs spécialisés en mesure de réaliser des
projets particuliers dans des conditions propres à Hydro-Québec.
Il s'agit souvent des travaux dans des installations en services
avec tous les impératifs de la présence des courants
électriques de haute tension : « Je ne sais pas si on peut
qualifier ça de partenariat. Contractuellement ce sont des appels de
propositions. » (Acteur D-03) Aussi, selon lui, d'autres
risques peuvent être associés aux développements
technologiques qui parfois n'aboutissent pas aux résultats attendus
malgré les efforts investis : << Tu me parles de partenariat dans
le contexte de recherche et de développement. C'est sûr il y a
toujours des risques de part et d'autre, dépendamment des conditions du
marché. » (Acteur D-03)
2.3.2 La perception du mode de règlement des
différends
2.3.2.1 Les modes usuels de règlement des
différends civils et commerciaux à Hydro-Québec
L'acteur D-03 confirme que le mode usuel de règlement
des différends est décrit dans les clauses
générales de l'appel d'offres. Ce mode ne fait pas mention d'une
clause de médiation ou d'arbitrage : << Donc il n'y a pas des
clauses d'arbitrage obligatoire comme on peut rencontrer ailleurs à
l'occasion. Pas des clauses de médiation obligatoire. Il y a une clause
des procédures en cas de différends qui prévoit un
processus d'appel au supérieur hiérarchique. » (Acteur
D-03)
Toutefois, l'acteur D-03 mentionne que si l'entrepreneur
n'arrive pas à s'entendre avec l'administrateur désigné du
contrat, la procédure inscrite dans le contrat lui permet de s'adresser
à un niveau hiérarchique plus haut avec un dossier complet
justifiant sa demande dans le but de trouver une entente et changer la
décision de l'administrateur. Ainsi, le supérieur
hiérarchique reçoit le dossier de l'entrepreneur comme un appel
de la décision de son employé et tente de trouver un
règlement, mais toujours en se basant sur la normativité
juridique du contrat : << Il y a une clause de procédures en cas
de différends qui prévoit un processus d'appel au
supérieur hiérarchique. » (Acteur D-03)
Selon sa conception, les négociations avec
l'entrepreneur et l'analyse du dossier de réclamation
présenté par l'entrepreneur sont faites en équité
et avec transparence en s'appuyant sur des critères objectifs où
le dossier doit être bien fondé en droit. Les clauses
contractuelles, les lois et règlements demeurent la source de toute
justification pour la prise de décision. À cet effet, un avis
préalable du contentieux de la société d'État est
nécessaire pour conclure toute entente concernant le règlement
d'une réclamation par un gestionnaire. Le fardeau de la justification
incombe à l'entrepreneur où il doit présenter sa demande
de
compensation avec une bonne argumentation détaillée
et basée sur le contrat qui lie les parties :
<< C'est sûr il y a toute une phase de
présentation et d'analyse de la réclamation. Il arrive des
situations où on dit à l'entrepreneur, qu'il faut qu'il refasse
ses devoirs parce que la réclamation telle que présentée
n'est pas justifiée. Elle n'inclut pas les pièces justificatives.
[...] Quand il s'agit d'un dossier qu'on peut qualifier de réclamation
selon le pouvoir des décisions. L'affaire juridique est consultés
à ce niveau là on va intervenir. » (Acteur D-03)
Toutefois, il est d'avis que dans la plupart des cas, on fini
par s'entendre et par trouver une solution sans qu'il soit nécessaire de
se rendre devant les tribunaux. Selon les procédures, s'il n'y a pas
d'entente après avoir fait appel au Directeur, usuellement le dossier
sera transmis au contentieux afin de se préparer de le débattre
devant les tribunaux de droit commun. Mais l'interviewé s'entend pour
dire que la poursuite d'un dossier en justice est très rare car il
préfère trouver une solution avant d'en arriver à se faire
dicter une décision par un juge : << À défaut
d'entente, on va aux tribunaux de juridiction de droit commun. » (Acteur
D-03)
Les forces des modes usuels de règlement des
différends civils et commerciaux à
Hydro-Québec
Selon l'acteur D-03, il existe un rapport des forces favorable
à la société d'État qui peut servir comme force
dissuasive pour inciter les belligérants à se rapprocher et
trouver une solution au lieu de se lancer dans un processus périlleux et
coûteux. À cet effet, HydroQuébec dispose des ressources
financières et humaines importantes en mesure de supporter les
coûts et le délai d'une poursuite devant les tribunaux où
peu des fournisseurs peuvent le faire :
<< Puisque les tribunaux ont juridiction, la force dans
le fond est une force dissuasive. Parce que les tribunaux sont coûteux et
imposent des délais importants de telle sorte que souvent les parties
vont tenter de se rapprocher pour éviter de s'en aller dans ce processus
là (judiciaire) dont l'issue est incertaine. Car la décision du
tribunal des premières instances, par exemple à la cour
supérieure, tu as un droit d'appel. Ce qui peut prolonger encore
d'avantage. Alors, c'est d'une certaine manière dissuasive. »
(Acteur D-03)
Le discours de l'acteur D-03 laisse entendre que la gestion des
deniers publiques impose un rendre compte au corps social. Ce qui n'est pas
le cas dans la gestion des affaires privées.
Il paraît plus facile de faire de compromis lorsqu'on
gère des intérêts privés que des fonds publics. Ce
qui laisse entendre que la gestion des compromis dans les négociations
des affaires de la société d'État est très
fastidieuse en raison des justifications qui doivent supporter chaque
décision ou chaque entente conclue pour un règlement : <<
Dans la vaste majorité des cas, je vois dans la négociation des
compromis. Je remarque une recrudescence des dossiers qui se judiciarisent.
Pourquoi ? » (Acteur D-03)
Les faiblesses des modes usuels de règlement des
différends civils et commerciaux à
Hydro-Québec.
Une des faiblesses du mode usuel est le problème
d'accès à la justice qui se pose en raison de délais long
et des coûts de plus en plus importants pour supporter un procès :
<< Parce que les tribunaux sont coûteux et imposent des
délais importants, [...], la décision du tribunal des
premières instances, par exemple à la cour supérieure, tu
as un droit d'appel. Ce qui peut prolonger encore d'avantage. » (Acteur
D-02)
Malgré la satisfaction du mode usuel, il en demeure pas
moins que l'acteur D-03 est d'avis que la façon de faire actuelle en
matière de règlement des différends est longue, surtout
lorsque la valeur de la réclamation provenant d'un fournisseur est
importante : << L'autre faiblesse est le recours aux tribunaux qui est
long. » (Acteur D-03) L'interviewé souligne que le mode judiciaire
est coûteux en frais de contentieux et d'experts engagés pour
préparer et défendre les dossiers en litige devant les tribunaux
de droit commun : << Ce ne sont pas des mécanismes qui favorisent
le rapprochement. C'est l'antithèse de la médiation et de la
négociation. » (Acteur D-03)
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