Les compétences du juge étatique dans l'arbitrage OHADA( Télécharger le fichier original )par Francis NGUEGUIM LEKEDJI Université Catholique d'Afrique Centrale - Master en Contentieux et Arbitrage des Affaires 2007 |
V- INTERET DU SUJETPour une compréhension idoine de cette étude, il est important d'en dégager l'intérêt. Cet intérêt est à la fois scientifique et social. Le premier objectif est de contribuer à la vulgarisation du Droit de l'arbitrage OHADA. En effet, c'est un droit relativement jeune au regard des autres lois sur l'arbitrage en vigueur dans d'autres régions du monde. Certes, ce droit a fait l'objet de nombreuses recherches, mais notre étude permettra de prendre en considération les derniers développements survenus dans certains Etats membres après l'adoption des textes OHADA. On pourra alors émettre des critiques nécessaires afin de guider le législateur sur l'orientation idoine à donner à la collaboration du juge étatique à l'arbitrage OHADA ; laquelle collaboration est au coeur de notre problématique. En effet, le législateur camerounais a adopté une série de lois relatives à la collaboration du juge étatique à l'arbitrage49(*). Les évolutions qu'apportent ces lois seront prises en compte dans ce travail ; on évoquera le rôle trouble de la loi no 2007/001 du 19 avril 2007 qui institue le juge du contentieux de l'exécution. Ensuite, l'étude veut faire un point sur les prérogatives expresses ou tacites que reconnaît le Droit de l'arbitrage OHADA au juge étatique. L'atteinte de cet objectif permettra surtout d'éclairer les tribunaux, les arbitres et toute personne intéressée sur la portée de l'article 13 alinéas 1 et 2 AU.A. Cet article ne pose en effet qu'un principe qui admet de nombreux tempéraments. Ces exceptions sont alors utilisées, non pas pour dénaturer l'esprit de l'arbitrage, mais pour le rendre encore plus efficient surtout quand il s'agit par exemple de vaincre la mauvaise foi d'un contractant. VI- QUESTION DE RECHERCHEAu regard de ce qui vient d'être dit, on se demande alors quels sont les pouvoirs, les prérogatives du juge étatique dans l'arbitrage OHADA ? Quelle est la nature de ces pouvoirs : s'agit-il des pouvoirs concurrentiels, exclusifs, ou plutôt complémentaires ? De la problématique posée, nous pouvons formuler deux hypothèses : Ø D'une part, le juge étatique exerce certaines compétences en concurrence avec le tribunal arbitral. Ø D'autre part, le juge étatique exerce d'autres compétences de façon autonome et exclusive de toute intervention de l'arbitre. Nous les vérifierons, tout en ayant au préalable dévoilé les méthodes de recherche utilisées pour réaliser ce travail. Nous avons adopté deux méthodes principales pour la réalisation de notre travail : la méthode exégétique et la méthode stratégique. La méthode exégétique nous a permis d'analyser les différents textes juridiques de l'OHADA qui régissent l'arbitrage, particulièrement les dispositions relatives à la collaboration du juge étatique. Cette méthode se situe dans le droit fil de la recherche documentaire que nous avons effectuée aussi bien dans les revues spécialisées, les ouvrages du droit de l'arbitrage, que dans certaines bibliothèques. La méthode stratégique nous a, en revanche, permis de vérifier l'effectivité de cette collaboration. Nous avons pour cela effectué des descentes au sein de certaines juridictions étatiques dont celles de Yaoundé, Douala et Bafoussam où nous avons collecté une importante jurisprudence. Nous avons aussi bénéficié de la jurisprudence publiée dans certaines revues spécialisées. Nous nous sommes alors rendu compte que le juge étatique de la zone OHADA participe réellement à la procédure arbitrale. Ce travail préliminaire nous permet aussi de fixer notre chronogramme de recherche Il s'agit du plan du travail. IX- ARTICULATION ET JUSTIFICATION DU PLAN
Nous avons dit que l'arbitrage repose sur une convention dont l'application correcte entraîne l'incompétence des juridictions étatiques à connaître de l'affaire soumise à l'arbitrage. Cependant, certaines raisons militent en faveur de l'implication du juge étatique dans la procédure arbitrale. D'abord, l'arbitrage, contrairement à la justice étatique, est une justice ponctuelle, non permanente. Ensuite, l'arbitre est un juge institué par les particuliers et ne bénéficie pas à ce titre de l'imperium qui permet au juge étatique de rendre exécutoire sa décision. Par conséquent, les limites liées à la nature même de l'arbitrage rendent inéluctable la participation du juge étatique à sa procédure. Dans ce sens, le Droit OHADA sur l'arbitrage, à l'image d'autres lois50(*), réserve un certain nombre de prérogatives au juge étatique dans le déroulement de l'arbitrage. Certains auteurs ont d'ailleurs dénombré dix occasions expresses de recours au juge étatique dans l'AU.A51(*). Dans le cadre de cette recherche, nous avons identifié l'utilisation à douze reprises du groupe nominal « Juge compétent dans l'Etat-partie ». Cela témoigne amplement de la possibilité de recourir au juge étatique en matière d'arbitrage OHADA. Enfin, l'instance arbitrale, tout comme l'instance judiciaire, se déroule en plusieurs étapes. Il y a une phase d'introduction de l'instance ; une phase d'instruction et de jugement qui s'achève par le prononcé de la sentence arbitrale. Il y a éventuellement une phase d'exécution de la sentence qui se situe, en réalité, au-delà de la phase arbitrale. A chaque étape, l'arbitre exerce les fonctions juridictionnelles qui lui sont attribuées par les parties ou par la loi. A chaque étape aussi, l'arbitre ou les parties peuvent être confrontés à des difficultés dont la résolution nécessite l'intervention du juge étatique. Et de fait, une lecture attentive de l'AU.A permet de se faire la conviction que le juge étatique peut intervenir avant, pendant et après l'instance arbitrale. Il exerce, à l'occasion, des pouvoirs considérables qu'il est loisible de distinguer en deux catégories : PREMIERE PARTIE: LES COMPETENCES PARTAGEES DU JUGE ETATIQUE DANS L'ARBITRAGE OHADA. DEUXIEME PARTIE: LES COMPETENCES EXCLUSIVES DU JUGE ETATIQUE DANS L'ARBITRAGE OHADA. * 49V. supra, p.6. * 50L'article 5 de la loi type de la CNUDCI dispose par exemple que : « Pour toutes les questions régies par la présente loi, les tribunaux ne peuvent intervenir que dans les cas où celle-ci le prévoit ». * 51P.G. Pougoué et alliés, op. cit., no 318. |
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