Les garanties d'impartialité du juge dans le code de procédure pénale( Télécharger le fichier original )par Christian Engo Assoumou Université Yaoundé II - Soa - D E A 2008 |
CHAPITRE II : UN PARTI PRIS EN QUALITEDE PARTIE A L'INSTANCELe juge est un Homme dans la société, il entretient des liens de différentes natures avec les membres de la communauté. Ainsi peut-il être membre d'une association sportive, religieuse ou sectaire. Dans ce dernier cas, un auteur s'est posé la question de savoir si "l'alliance spirituelle peut donner lieu à récusation ?"192(*). Le législateur a prévu des techniques pour pallier à des situations où le juge est appelé à trancher un litige dont l'une des parties entretient des liens particuliers avec lui. En effet, si le juge ne voulait pas ou ne pouvait pas équilibrer la balance, s'il était l'instrument d'une rancune, ou le débiteur d'un bienfait, ou le prisonnier d'une amitié ou le serviteur des puissants, il ne jugerait pas il paierait sa dette ou il rendrait un service193(*). Ainsi, le droit accordé à une partie au procès de pouvoir demander de ne pas être jugé par tel juge n'est pas seulement connu des civilisations occidentales. Dans la tradition africaine et plus particulièrement dans la tradition Fang Beti il était accordé à une partie au procès de refuser d'être jugé soit par le chef traditionnel parce qu'il avait des relations avec son adversaire, soit alors qu'un notable siégeant parmi les membres du conseil des sages qui devait se prononcer sur son sort avait des liens particuliers avec une des parties au procès cette pratique est connu sous le vocable de "TSÖ" (a tsô nkukuma) c'est-à-dire récuser le chef. 51* Placé dans une telle position, le juge qui doit être neutre pour pouvoir arbitrer, et dont l'attitude consubstantielle est d'être impartial revêt plutôt la qualité ou le statut de partie liée à l'instance. Cette seule qualité parait exprimer le sens de la décision qu'il prendra au terme de sa mission. Elle s'interprète donc comme un parti pris dores et déjà arrêté par le juge. Ainsi commande t-elle une mise en "quarantaine"194(*).Ainsi donc la loi commande l'exclusion d'un tel juge par la procédure de récusation (section 1) qui est une garantie d'impartialité (section 2). SECTION1 : L'EXCLUSION DU JUGE, PARTIE LIEE A L'INSTANCE52* Cette exclusion est rendue possible par le mécanisme de la récusation qui est la procédure par laquelle le plaideur demande que tel magistrat s'abstienne de siéger, parce qu'il a des raisons de suspecter de sa partialité à son égard195(*). Le vocabulaire juridique donne une définition plus complète et voit en la récusation un acte par lequel un plaideur refuse d'être jugé par, ou en présence d'un juge (...) dont il conteste l'impartialité et introduit pour ce faire une demande incidente déterminée qui aboutit, en la cause, à écarter le juge récusé et à le remplacer, soit à la suite d'un acquiescement de sa part, soit par l'effet de la décision qui tranche sans débat ni délai la contestation196(*). Il ressort ainsi, au regard de la jurisprudence que la technique de récusation (§1) est souvent assimilée au renvoi d'une juridiction à une autre (§2) et même au privilège de juridiction qui sont également des procédures particulières permettant d'aboutir à une décision indépendante et impartiale. §1 : La récusationMontesquieu est l'un des premiers auteurs à parler de manière nette de la récusation. Il défendait ainsi l'idée d'un jugement de l'accusé par ses pairs : "il faut même que dans les grandes accusations, le criminel, concurremment avec la loi, se choisissent ses juges ou du moins qu'il puisse en récuser un grand nombre..."197(*). Après l'étude de la typologie de récusation consacré par le législateur Camerounais dans le code de procédure pénale, (A) nous analyserons les différentes causes qui sont des éléments que doit produire le récusant dans sa demande (B). * 192 - ASTAING (A), Droits et garanties de l'accusé dans le procès criminel d'ancien régime (XVIe-XVIIIe S) audace et pussilanité de la doctrine pénale française, Paris, Puam 1999 P221 * 193 - SIRE (P), "les problèmes du juge" in, La revue des deux mondes, 1964 P86 cité par NERAC Philippe * 194 - JOSSERAND op. cit.P221 * 195 - GUILLIEN (R) et Vincent (J), Dir, Lexique des termes juridiques Paris Dalloz 13e ed 2001 P466 v° Récusation * 196 - CORNU (G), Dir vocabulaire juridique, Paris Puf, 7e ed 2007 P762 v° Récusation * 197 - MONTESQUIEU, De l'esprit des lois, livres XI, VI, tome 1, P297 cité par ASTAING op cit P224. Il faut souligner que dans ce cas, la récusation n'est plus le "refus" d'un juge suspect, mais le choix d'un juge que l'on estime impartial |
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