RESULTATS ET DISCUSSION
1. EVOLUTION DE LA
CONDUCTIVITÉ ET DU PH
1.1. La
conductivité
La figure suivante présente l'évolution de la
conductivité dans les solutions de hachis des filets du poisson
utilisé pour l'étude salé à 10, 15 et 20%.
Figure 9 :
Evolution de la conductivité dans les solutions de hachis de
Pseudotolithus senegalensis salé à différents
pourcentages et à 20#177;2°C (1er lot)
En observant cette figure 9 représentant
l'évolution de la conductivité dans des solutions de hachis de
filets de ce poisson salé et exposé sous climatisation à
20#177;2°C, on peut constater qu'elle présente trois phases
distinctes :
- une phase de croissance exponentielle ;
- une phase de décroissante ;
- une phase relativement constante ou faiblement croissance
selon le cas.
Pendant les premières heures qui suivent le salage, la
conductivité augmente de façon remarquable dans les filets. Ce
qui voudrait dire que le degré d'ionisation est significatif dans le
filet. Autrement dit, il se forme suffisamment d'ions (cations et anions) qui
s'accumulent dans la chair et seraient à la base de la montée de
la conductivité. En effet, lorsque le sel est en contact avec la chair,
il se produit une diffusion qui se traduit par la migration d'eau et du sel
dans le produit. Le phénomène est d'autant plus marqué que
la concentration en sel et la durée du salage sont importantes. Kechaou
(2007) démontre dans ses travaux que plus le temps se salage se
prolonge, plus l'enrichissement de la chair en sel et sa déshydratation
sont prononcés. Notons par ailleurs que nos échantillons
renferment suffisamment d'eau environ 80%. Une fois dans cette eau, le sel ce
dissocie fortement mais progressivement en Na+ et Cl- car
ils appartiennent au groupe d'électrolytes forts (Dossou-Yovo, 2002).
Nous pouvons imaginer que c'est la concentration de la chair en Na+
et Cl- qui est responsable de l'augmentation de la
conductivité. Car, en utilisant l'eau disponible dans la chair du
poisson pour se dissocier, et par là, accroître la
conductivité, le NaCl réduit la teneur en eau des filets. Notons
cependant que cette première phase dure plus longtemps pour la courbe de
salage à 10%. Ce qui porte à croire que la dissolution du NaCl
n'est pas la seule responsable de l'augmentation de la conductivité dans
ces filets.
En fait, les protéines sont des colloïdes
hydrophiles et, dans les solutions aqueuses, autour de chaque molécule
protéique, il se forme des enveloppes aqueuses composées de
molécules d'eau ayant une orientation particulière dans l'espace.
L'eau d'une telle enveloppe est appelée «eau liée» ou
«eau saturée». Cette eau ne gèle pas à basse
température ; ce qui augmente la stabilité des
protéines dans une solution. Mais à fortes concentrations de sel,
cette eau est affectée par le Na+ et le Cl- et la
molécule protéique peut précipiter, parce que leurs
groupes carboxyliques et aminés sont ionisés.
Ainsi donc cette forme ionique augmente avec l'apport
grandissant en sel, ce qui engendre la conductivité (électrique)
du milieu. Mais, à la longue, il s'ensuit la précipitation.
Pendant la 2nde phase, on observe une
décroissance de la conductivité. On peut expliquer cet
abaissement par la réduction du degré d'ionisation dans la chair.
Les ions Na+,
Cl- et les protéines du muscle entrent en compétition
pour la faible quantité d'eau restant dans les filets car tous ont une
affinité pour l'eau. Mais les ions Na+ et Cl- qui
sont en forte concentration et ont une plus grande affinité que les
protéines déshydratent celles-ci qui précipitent. Ce qui
est en accord avec l'affirmation de plusieurs auteurs comme Linden et Lorient
(1994) et Jeantet et al. (2006) qui pensent qu'aux valeurs
élevées de force ionique, les charges de surface de la
protéine sont écrantées et l'hydratation diminue pendant
que les protéines précipitent.
Au cours de la troisième phase, on note une
légère différence dans le comportement des trois courbes.
§ La courbe représentant le salage à 20%
semble se stabiliser, signe que le système est en équilibre c'est
à dire qu'il n y'a plus de mouvement d'ions : agrégation ou
régénération.
§ Celle à 15% aussi s'est stabilisée,
seulement après une faible élévation. La
légère remontée de la conductivité pourrait
s'expliquer par une nouvelle régénération d'ions dans les
filets. Or de part la littérature, le maximum de solubilité des
protéines se situerait entre les concentrations en sel de 3 à 12%
(selon la température et le type de poisson). Donc normalement au
delà de 12%, les protéines précipitent. Puisque le salage
est fait à 15% sur les filets de poissons, nous pensons que :
- soit cette brève élévation de la
conductivité représente la solubilisation des protéines
restantes après le temps de salting-out. Dans ce cas, il y
aurait une insuffisance d'électrolytes entraînée
certainement avec le liquide exsudatif.
- Soit que l'élévation est due à une
autre forme d'ionisation que la protéolyse. Peut être qu'il s'agit
aussi d'une lipolyse avec libération des radicaux d'acides gras
libres.
§ Par contre la courbe illustrant le salage à 10%
est en croissance. Ce qui veut dire que les réactions d'hydrolyses ne
sont pas stoppées et donc qu'il continue de se former des ions dans les
filets d'où l'augmentation de la conductivité. Autrement dit, les
filets salés à 10% sont soumis à deux types
d'altérations : l'oxydation de la faible quantité des
lipides qu'ils contiennent et la modification de la texture et de la
structure.
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