Chapitre Premier
LA PRÉCISION DES CONDITIONS DE RECOURS À
DES CONTRE-MESURES
Le projet de la Commission du Droit International
entamé depuis les années 1959 avait pour objet de
réglementer la responsabilité des Etats pour fait
internationalement illicite. La Commission en a profité pour soumettre
le recours aux contre-mesures au respect de différentes conditions, la
finalité étant de limiter l'arbitraire des Etats et la tendance
à l'autodéfense de ces derniers.
A part les conditions posées généralement
par le droit international général, la CDI a introduit d'autres
conditions renforçant ainsi le régime des contre-mesures. La
précision de ces conditions consiste à leur poser des freins,
à restreindre leur recours généralisé par les Etats
dans le règlement des conflits, mais également, à limiter
le risque de débordement qu'elles présentent pour la
stabilité de l'ordre juridique international. La démarche est
intéressante d'un point de vue pratique notamment la protection de
certains Etats dits faibles contre l'arbitraire des superpuissances.
Si on voulait laisser les Etats recourir aux
représailles sans conditions comme dans la pratique coutumière,
certains feraient d'elles leur instrument de négociation même.
Le problème qui se pose est de savoir la
réalité de ces conditions et leur portée dans la pratique
des contre-mesures. En d'autres termes, en quoi peut-on affirmer que le projet
de la CDI pose véritablement des limites au recours à des
contre-mesures ?
Il s'agira de préciser ici en quoi consistent ces
conditions et quel est leur impact dans l'usage des contre-mesures.
L'étude de la réglementation des contre-mesures passe en effet
dans l'analyse des différentes dispositions mises en place par le projet
de la CDI et celles posées antérieurement par le droit
international général telles que les deux conventions de Vienne
et la Charte de l'ONU. Nous distinguerons deux types de conditions
posées aux contre-mesures. On fera remarquer avant tout que tout Etat
qui décide de prendre des contre-mesures doit d'abord respecter
certaines conditions de forme relatives à la procédure (Section
1). Mais, comme ces seules conditions ne suffiraient pas à canaliser les
risques de débordement des contre-mesures, d'autres conditions sont
prévues qui tendent, quant à elles, à limiter la
qualification du fait illicite imputable et sa sanction (Section 2).
Section 1
La précision des conditions formelles
La limitation du recours à des contre-mesures passe
d'abord par la précision de ces conditions formelles. Les conditions
formelles sont celles relatives au respect des procédures de mise en
oeuvre des contre-mesures, c'est-à-dire aux différentes
étapes de la sanction, de l'intention de prendre la contre-mesure
à sa décision. Il s'agit, dans ces conditions, d'encadrer
minutieusement l'Etat qui va prendre des contre-mesures afin d'éviter
que celui-ci ne dénature pas leur finalité.
Le respect des conditions formelles suppose la soumission de
l'Etat lésé à un formalisme rigoureux qui consiste, d'une
part, à le décourager dans son projet et, d'une autre part,
à recourir à un moyen institutionnel de règlement des
conflits. L'Etat qui décide de prendre des contre-mesures doit, avant
tout, remplir certaines conditions préalables (Paragraphe 1), s'assurer
de l'inexistence d'un moyen de règlement de conflit prévu
à cette fin (Paragraphe 2).
Paragraphe 1
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