Le renouveau du contrat de travail( Télécharger le fichier original )par Kokou ALEKE Université de Lomé - DEA Droit privé fondamental 2006 |
B/- L'INTERDICTION DES DISCRIMINATIONS À L'EMBAUCHELe contrat de travail est un contrat conclu en fonction de la personne. A cet effet, il appartient au chef d'entreprise de choisir celui qui est plus apte à servir les intérêts de l'entreprise. L'exercice de cette mission n'est pas aisé. L'employeur peut facilement verser dans la discrimination en fondant son choix sur des motifs étrangers aux attentes de l'entreprise. Il peut par exemple fonder sa décision sur l'appartenance ethnique, raciale, religieuse ou sur le sexe. En le faisant, le choix du chef d'entreprise serait constitutif de discrimination et tomberait sous le coup de la loi. La liberté contractuelle se trouve limitée et doit s'exercer sous le contrôle de la loi. Ainsi, la loi fondamentale togolaise en son art. 37 dispose que « L'Etat reconnaît à chaque citoyen le droit au travail et s'efforce de créer les conditions de jouissance effective de ce droit. Il assure à chaque citoyen l'égalité de chance face à l'emploi ». Ce texte consacre un droit essentiel et il n'appartient pas à un employeur, un citoyen de surcroît, de porter atteinte à ce droit en prenant appui sur la liberté contractuelle. La liberté contractuelle ne rime pas avec illicéité. L'article 6 du code civil oblige les parties contractantes au respect de la loi et des règlements. En effet, « on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et les bonnes moeurs ». Fort de cette disposition constitutionnelle, le code togolais du travail a interdit toute discrimination à l'emploi. La formule de ce texte est claire. Il dispose que « toute discrimination directe ou indirecte en matière d'emploi et de profession est interdite »99(*). Que faut-il entendre par discrimination et quelle est la sanction applicable ? Le deuxième alinéa de l'article 3 du code togolais de travail définit la discrimination comme « toute distinction, exclusion ou préférence fondée sur le sexe, la race, la couleur, la religion, l'appartenance ethnique, l'opinion politique ou philosophique, l'origine sociale, le statut juridique, l'ascendance nationale, l'état de santé ou le handicap et qui a pour effet de réduire ou d'altérer l'égalité de chance ou de traitement en matière d'emploi ou de profession ». Le législateur togolais a donné une liste extrêmement longue des actes constitutifs de discrimination. Le chef d'entreprise a toujours un moyen pour opérer des discriminations dans le choix de son personnel. C'est le cas par exemple d'un migrant à qui on ne veut pas donner de l'emploi en insérant dans le formulaire d'embauche une clause relative au domicile. La clause de domicile est certes neutre mais en réalité, constitue une mesure discriminatoire. Le chef d'entreprise qui se prévaut de la liberté contractuelle pour discriminer s'expose aux sanctions de la loi. Cette situation est rare. Les employeurs n'exhibent jamais la discrimination. Il appartient au candidat de faire la preuve de la discrimination. Lorsqu'elle est prouvée, il faut alors sanctionner. Le code togolais du travail prohibe ces pratiques. Ce code ne fixe pas le juge sur la sanction à prendre. Le juge peut - il exiger de l'employeur qu'il engage le candidat discriminé ? Pour Bernard BOSSU, cette « solution est dépourvue de toute crédibilité sur le plan pratique et ce d'autant que l'employeur a probablement retenu un autre candidat sur le poste à pourvoir »100(*). L'auteur préconise une réparation pécuniaire. L'évaluation du préjudice se fera alors selon les règles du droit commun. On appliquera l'article 1382 du code civil et la perte d'une chance réelle et sérieuse d'accéder au poste convoité. Cette solution pourrait être retenue par le juge togolais. La liberté contractuelle du chef d'entreprise n'est pas seulement limitée à l'embauche. Même après l'embauche, le respect de la vie personnelle du salarié constitue une limitation des pouvoirs de l'employeur. * 99 Article 3 al. 1er du code togolais du travail. * 100 BOSSU Bernard, La protection des droits fondamentaux du candidat à l'emploi, http : //www.juripole-fr/colloques/embauche/Bossu.html |
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