Employabilité des jeunes en Côte d'Ivoire( Télécharger le fichier original )par Antoine N'Gratier Université d'Abidjan - DEA 2007 |
II) L'entreprenariat des jeunes.II.1) Entreprendre et développer la micro-entreprise.La relance du secteur productif ainsi que le rétablissement des grands équilibres macroéconomiques constituent pour la plupart des pays africains des objectifs prioritaires, en vue de l'accroissement de l'emploi et de la diminution de la pauvreté. Le secteur informel étant le secteur amortisseur de la majorité des jeunes diplômés comme non diplômés, les acteurs dudit secteur ont besoin de connaître l'environnement législatif et réglementaire concernant leurs activités et d'être informés sur les formalités et obligations (sociales, fiscales) relatives à l'exercice d'une quelconque activité. Il est aussi souhaitable qu'ils aient connaissance des actions de promotion initiées par les pouvoirs publics en leur faveur (appui à la conception et à l'exécution des projets, aux financements, aux exonérations fiscales et au perfectionnement technique et en gestion). Les jeunes entrepreneurs se doivent de bien gérer les relations avec les fournisseurs fondées sur la confiance et la fidélité. Ils ont aussi intérêt à être vigilants sur le suivi et l'évolution du marché de leurs intrants en terme de changement de prix et de qualité, de même que le marché des biens d'équipement. La politique à l'égard de la clientèle doit être dynamique, c'est-à-dire qu'il faut s'informer en permanence sur l'évolution de la demande et s'y ajuster en étant exigeant et compétitif sur la qualité et le prix des produits et services offerts. La mauvaise gestion des approvisionnements dans le secteur informel (rupture fréquente des stocks, faible capacité à satisfaire des commandes importantes) entraîne souvent des pertes importantes de marché et un manque de confiance de la part de la clientèle. L'absence d'un entretien régulier des équipements et d'une politique d'amélioration de la qualification professionnelle influent négativement sur la qualité et la compétitivité des produits du secteur informel. Les négligences dans la tenue d'une comptabilité régulière ne permettent pas aux acteurs du secteur informel d'assurer un bon suivi de l'évolution de leurs recettes et dépenses, et de faire des projections à moyen terme. Les actions menées dans ces différents domaines ont pour objectif de développer l'esprit d'entreprise chez les jeunes s'engageant dans une activité informelle et d'améliorer leurs productivités. En particulier, elles devraient leur permettre d'améliorer la gestion interne de leurs entreprises dans les domaines comme l'approvisionnement, l'organisation de la production, la gestion des équipements de la production, la gestion des ressources humaines et enfin la tenue d'une comptabilité. Ainsi, bien que l'esprit d'initiative ne soit pas la panacée contre le chômage, il peut contribuer à réduire et à améliorer l'employabilité des jeunes. Pour être efficaces, les programmes axés sur l'entreprenariat des jeunes devraient viser des éléments clés nécessaires à la création et au développement de nouvelles entreprises viables, notamment un financement approprié, l'acquisition de nouvelles compétences, le soutien à l'expansion des entreprises, la création de réseaux d'assistances, des conseils en matière d'entreprise et un soutien d'encadrement. Une approche de l'entreprenariat des jeunes dans le cadre d'une région mérite une attention particulière de la part des décideurs. L'OIT a mis au point un kit de formation « Know About Business », qui s'adresse aux jeunes en formation dans des instituts professionnels ou techniques. Ce kit est destiné à encourager les jeunes à faire des choix de carrière comme l'entreprenariat ou l'auto-emploi. Il donne des indications sur les atouts à réunir et sur les défis à relever pour réussir à créer ou à gérer une entreprise. Ce kit a été utilisé dans bon nombre d'instituts de formation professionnelle et technique en Afrique, en Asie et Pacifique, en Europe de l'Est, Asie Centrale, Amérique Latine et Caraïbes. L'exemple suivant de Monsieur Galaye GUEYE, achèvera de nous persuader que l'on peut partir d'une petite entreprise dans l'informel pour aboutir à une grande entreprise dans le formel. Encadré n°3 : De SANDAGA à la SODIDA2(*). C'est l'itinéraire de l'informel au formel de Monsieur Galaye GUEYE, Directeur Général de la Société des Produits Kaftan (SOPROKA), spécialisée dans la fabrication des produits d'entretien et d'embellissement des habits. Originaire de la région de Louga (Sénégal), l'intéressé, après une courte scolarité primaire, franchit le pas de l'exode rural et se retrouve à Dakar en instance d'émigration vers l'Europe ou les Etats-Unis. Locataire en 1976 de la cantine n°46 au marché SANDAGA, Monsieur GUEYE y tenait un petit commerce de produits naturels de cueillette ou de traitement artisanal primaire (gomme arabique, gomme en vrac, gomme pressée, karité, encens, etc.) Les tentatives de diversification de ses activités avec des produits manufacturés importés ont échoué face à un mur de protectionnisme dressé par les diverses administrations et les banques en faveur de l'industrie locale. C'était l'époque où la répression des activités informelles tenait lieu de politiques sous pression des entrepreneurs du secteur formel. La perspective obstruée, M. GUEYE se ressaisit en 1989, interroge son expérience des produits locaux, focalise sa réflexion sur la gomme arabique et entreprend d'en revaloriser l'utilisation à partir de tests d'amélioration et de modernisation des procédés artisanaux de traitement. Cet exercice de créativité aboutit à la mise au point d'un nouveau produit intitulé " la gomme amidon, le KAFTAN". La Société Nationale d'Etudes et de Promotion Industrielle (SONEPI) apporte son concours et introduit l'inventeur auprès du Fonds de Promotion Economique et de la Société de Domaine Industrielle de Dakar (SODIDA) qui acceptent d'octroyer en 1990 un financement de 39.000.000 FCFA et de mettre à la disposition du promoteur un terrain (lot n°102) pour l'édification des ateliers et bureaux de la SOPROKA. L'entreprise emploie actuellement 30 permanents et fait travailler en moyenne décemment 100 journaliers par mois. Très ambitieux, mais aussi organisé, M. GUEYE, qui a bénéficié d'un perfectionnement en gestion et en marketing après une formation en comptabilité en cours du soir, a crée avec son équipe de recherche de nouveaux produits très compétitifs et qui s'imposent de plus en plus sur le marché de l'UEMOA.
Pour réduire les charges de production à partir de la diminution des coûts d'importation et de dépendance par rapport au marché de l'amidon, M.GUEYE a initié, avec l'appui de la Fondation de Secteur Privé, un programme de culture et de transformation industrielle de manioc en amidon et autres produits comme «l'attiéké», un aliment de base en Côte d' Ivoire. Toutes ces initiatives ont influé sur la progression du chiffre d'affaire de la SOPROKA, lequel est passé de 23.000.000Fcfa en 1990 à 700.000.000Fcfa en 2000, permettant ainsi à la société de se classer parmi les moyennes entreprises de la SODIDA. Pionnier dans son domaine d'activités, la SOPROKA commercialise à l'exportation des produits de qualité qui lui ont valu d'être couronnés en 1997 du premier prix de l'Oscar National de la Qualité. Source : Soulèye Kanté : le secteur informel en ASS francophone * 2 SANDAGA : Grand marché central de Dakar SODIDA : Espaces aménagés pour l'installation des PME. |
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