PREMIERE
PARTIE : ANALYSE DES DETERMINANTS DE LA FAIBLE
EMPLOYABILITE DES JEUNES.
L'employabilité des jeunes
dans la vie active constitue depuis un certain nombre d'années un
problème de société récurrent, souvent vécue
difficilement par les jeunes et leurs familles.
Selon le BIT, le taux de
chômage a atteint la barre des 10% de la population active ; les
jeunes de moins de 25 ans étant les plus durement touchés avec
près de 23% de chômage(en termes de proportion) en augmentation de
deux points par rapport à 2003.
Traiter de l'employabilité des
jeunes nécessite d'identifier les différents freins et obstacles
à leur accession à l'emploi ; c'est là l'objet de
cette première partie qui se divise en deux chapitres.
Le chapitre I se consacre à
l'analyse de l'inadéquation entre le système éducatif
(formations et acquisitions des demandeurs d'emploi) et le système
productif (offreurs d'emploi) avec passage en revue des théories
appropriées.
Le chapitre II analyse l'inefficience
du dispositif d'insertion professionnelle des jeunes qui n'est pas de nature
à favoriser une amélioration de leur
employabilité.
Chapitre I :
L'inadéquation entre le système éducatif et de
formation et le système productif.
Dans ce chapitre nous exposons les facteurs explicatifs de la
faible probabilité des jeunes à trouver un emploi.
L'inadéquation entre les différents
systèmes (éducation et de formation, productif) se traduit par un
faible niveau de capital humain en terme d'expérience professionnelle
(exigée par les employeurs) ; un mauvais signalement de la part des
demandeurs d'emploi ; par la discrimination à l'embauche et des
diverses méthodes de recherche d'emploi.
I) Les approches
théoriques.
I.1) Le problème de la
faiblesse du capital humain.
La question du niveau et de la composition du capital humain
est cruciale, étant donné que ces deux éléments
(composition et niveau) déterminent une éventuelle
insertion ; un faible niveau ainsi qu'une composition incomplète
(inexpérience professionnelle) du capital humain offrant peu de
perspectives d'embauche. La théorie du capital en fait un large
exposé.
Le concept de capital humain est constamment utilisé en
économie depuis les travaux de Schultz (1961) et Becker (1964) ;
certains auteurs le font remonter à Adams Smith au XVIIIième
siècle. On peut définir le capital humain comme l'ensemble des
capacités productives d'un individu (ou d'un groupe d'individus),
incluant les aptitudes opératoires au sens plus large :
connaissances générales ou spécifiques, savoir-faire et
savoir-être, expérience,... Il s'agit donc d'un stock que l'on
peut constituer, accumuler et user.
La théorie du capital humain est née devant un
double phénomène (Gambier) et (Verniers) (1985) :
ü incapacité des fonctions de production
traditionnelles où le travail est perçu uniquement sous l'aspect
quantitatif à expliquer une partie de la croissance ;
ü incapacité du modèle standard à
expliquer les disparités de salaires puisque les individus sont
considérés homogènes.
La théorie du capital humain établit une
relation positive entre l'éducation, la productivité et le
salaire. Ceux qui investissent y gagnent. Sur ce point de vue, ceux qui ont les
niveaux de formation les plus élevés ont plus de chance de
trouver un emploi, risquent ainsi d'être moins au chômage et
reçoivent en moyenne des rémunérations
supérieures.
Selon Gazier (1992), le capital humain comprend trois
composantes principales :
ü l'éducation et la formation au sens le plus
large ;
ü la santé, élément clé du
développement et du bien-être physique et mental des
individus ;
ü tous les autres facteurs qui permettent de mettre
concrètement les individus en position de produire. Exemple : la
migration.
Toutes ces composantes entraînent des coûts pour
chaque individu, coûts financiers, sociaux, psychologiques. Pour
l'employeur, la formation a pour effet d'accroître la productivité
du capital qui lui est associée d'où le lien entre la
rémunération offerte et le capital humain du salarié.
Cette situation va pousser les individus à investir dans
l'éducation ; et la rentabilité de cet investissement
réside dans l'inégalité des rémunérations
qui correspond aux différences de capital humain de chaque travailleur.
Partant de là, on peut calculer le
bénéfice net actualisé (), c'est-à-dire le
bénéfice escompté ramené à une date
donnée.
Soit et la recette
et la dépense prévisibles à la date
.
Rt - Dt
On a : = - I
(1+r) t
L'équilibre est atteint quand . Ce qui permet de
déterminer le Taux de Rendement Interne (TRI), lequel sert à la
comparaison des investissements alternatifs.
Des objections et prolongements ont
été développés à la suite de ce
modèle. En effet, si l'hypothèse suscitée est vraie, on ne
devrait pas observer par exemple de différences systématiques au
niveau des demandes (études longues et difficiles) d'individus
également doués.
Outre cette objection, on peut aussi avancer que
l'éducation, comme le soulignait déjà Schultz (1963) n'est
pas seulement demandée à des fins d'investissement, contrairement
à ce que suggère le modèle de demande, mais aussi comme un
bien de consommation durable (pour accroître son utilité future),
ou non durable (accroître son utilité immédiate).
Par ailleurs, le modèle ne prend pas en
compte l'influence du système éducatif sur la demande. Ces
critiques vont conduire aux prolongements du modèle de demande
originelle. Ainsi Pscharopoulos et Woodhal (1988) suggèrent de prendre
en compte comme déterminants de la demande plusieurs facteurs (taux de
chômage, région, sexe...), le plus important étant le
revenu disponible des individus.
Levy-Garboua (1979) développe lui, un
modèle prenant en compte les aspects consommations des dépenses
de formation : la demande d'éducation résulte d'un
comportement d'arbitrage de l'individu entre les avantages futurs liés
à la réussite et les avantages présents liés au
loisir ainsi qu'aux activités rémunérées permettant
d'accroître la consommation présente. Un modèle de gain et
de répartition du revenu peut en effet être dérivé
de la théorie du capital humain. Puisque la théorie stipule que
les individus sont rémunérés à leur
productivité marginale et que celle-ci est le reflet du capital humain
qu'ils incorporent, on doit voir dans la qualité et quantité
d'éducation reçues par un individu, un déterminant majeur
de ses gains. A celui-ci, il est possible d'ajouter les capacités
naturelles de l'individu. Toutefois, si l'on admet l'hypothèse de Becker
(1975) d'une liaison positive entre ces capacités et le niveau
d'éducation, on peut exprimer les gains (G) de façon simple en
fonction du capital humain ( niveau d'éducation : KH) pour un
individu (i) :
Gi = Gi (KHi)
Dès lors, il apparaît que les différences
systématiques de gains que l'on peut observer entre les individus ne
doivent résulter que des différences quantitatives et
qualitatives de leur éducation puisqu'à niveau de formation
donné, le marché égaliserait les gains.
Diverses études ont essayé d'en donner
une estimation en évaluant les performances productives des
employés exécutant une tâche donnée, ou des
entreprises d'une même branche, lorsque le degré
d'éducation de la force de travail varie. Par exemple, les études
économétriques de Gurgand (1993) sur la Côte d'Ivoire
indiquent que plus d'éducation n'améliore pas l'efficacité
productive et la productivité des agriculteurs comme l'ont
constaté avant lui Mook (1981) et Hopcraft (cité par Gurgand,
1993). Quoique de fortes présomptions existent, l'unanimité n'est
pas encore faite à propos de la vraisemblance de l'effet positif de
l'éducation (formation) sur la productivité.
Ces quelques développements semblent attester que les
canaux par lesquels l'éducation affecte la croissance sont d'une grande
variété. Tout en n'infirmant pas la théorie orthodoxe du
capital humain ils en établissent l'étroitesse, justifiant
peut-être ainsi les nombreuses contestations et prolongements dont elle
fait l'objet.
Un bon niveau de même qu'une bonne composition du
capital humain sont nécessaires. Cependant l'embauche d'un
éventuel candidat est fonction de la manière dont celui-ci s'y
prend pour émettre des « signaux » à
l'entreprise qui elle, procède par « filtre ».
|