IV. QUESTIONS DE
RECHERCHE
Notre recherche part d'un constat. Il existe au Cameroun un
dynamisme entrepreneurial. Ce dynamisme s'exprime davantage dans le secteur
informel (soit 53% du secteur selon l'INS). Il y a lieu de se demander si cette
manifestation de l'entrepreneuriat dans l'informel est une expression de
l'hostilité de l'environnement des affaires au Cameroun. Selon la Banque
Mondiale (Doing business in 2006), il faut avoir rempli en moyenne 12
procédures et au coût équivalent à 152% du revenu
par habitant pour créer une activité au Cameroun. Cette
hostilité est renforcée par la difficulté d'accès
au crédit bancaire.
Partant de ce constat comment permettre au travailleur
indépendant (auto employé) de conserver son statut
d'emploi ? Etant entendu que l'emploi est l'outil principal de lutte
contre la pauvreté et permet de disposer d'un revenu comme contrepartie
de la participation à la création de richesse (Babisakana),
comment permettre au promoteur de conserver son statut d'employé pendant
une longue durée ?
Une relation intrinsèque lie le promoteur à son
activité. Cette activité lui confère un statut
d'employé. La conservation de ce statut passe par la survie de
l'activité ou la durée de vie de cette activité. Autrement
dit, comment assurer la pérennité des activités
créées par les travailleurs indépendants ?
Puisque notre recherche est une étude de cas
appliqué au FNE, comment le FNE peut améliorer les facteurs qui
influencent la pérennité des activités de ses
promoteurs ?
Si la législation fait des efforts afin de
décourager des licenciements abusifs et permettre ainsi aux
employés de conserver, pendant une longue durée, leur statut,
comment parallèlement favoriser la pérennité des
activités créées par les promoteurs du FNE ?
V. APPROCHES METHODOLOGIQUES
*Recherche documentaire et approches
théoriques
Pour atteindre notre objectif, nous avons
procédé à une recherche documentaire sur le fonctionnement
du marché de travail et la dynamique du travail indépendant (auto
emploi). Cette recherche nous a permis d'élaborer un rapprochement avec
les notions de théorie des jeux. Elaboré par J. Von Neumann et O.
Morgenstern en 1944, la théorie des jeux met un accent sur les
stratégies (alternatives) dont disposent des acteurs en vue d'un
compromis de coopération ou pas. La recherche d'emploi est un jeu
où interviennent à la fois le chercheur d'emploi et les
entreprises qui offrent les emplois.
La stratégie de se lancer en son propre compte est
définie lorsque les deux parties refusent de coopérer. D'une
part, l'entreprise prend l'option de n'est pas embaucher, malgré la
demande d'emploi qui lui est adressée, et d'autre part, le chercheur
d'emploi refuse l'emploi offert, puisque les avantages offerts sont
insignifiants par rapport à ce qu'il retirait de son activité
d'auto emploi.
Afin de traiter les données de notre
échantillon, cette étude nous a suggéré deux
approches complémentaires : le déterminisme afin
d'expliquer les facteurs clés de succès des activités
d'auto emploi et l'approche française de la détermination des
taux de survie des activités.
Le déterminisme soutient que l'avenir de
l'activité (entreprise) est en grande partie tracé dès le
départ de l'initiative. Pour expliquer l'issu heureux ou malheureux de
l'activité, nous avons émis des pistes tenant compte des
caractéristiques du promoteur, des moyens engagés pour son
investissement, des stratégies mises en place pour se positionner sur le
marché. Contrairement à l'approche américaine qui
considère qu'une entreprise vendue est toujours en vie, l'approche
française, par contre apporte une particularité dans la
détermination des taux de pérennité des activités.
Le système statistique français opère une distinction
entre les taux de pérennité relatifs à l'individu qui a
créé l'activité et les taux de continuité, relatifs
à l'activité qu'il dirige. Si l'activité est revendue ou
cédée au cours de la période d'étude, cela sera
considéré comme une cessation d'activité au niveau de
calcul des taux de pérennité.
*Echantillonnage de l'étude et
méthode de collecte d'informations
Le travail que nous avons entrepris est une étude de
cas sur un échantillon portant sur 108 promoteurs du Fonds National de
l'Emploi (Agence centrale) et cela sur dix ans (1996 -2005). Ce
prélèvement aléatoire représente 25% des
activités créées pendant la période d'étude.
Le choix de prélèvement de notre échantillon est
effectué en vue d'une large vision (10 ans) sur la dynamique d'auto
-emploi et son financement par le Fonds National de l'Emploi. Le chômage
comme d'ailleurs la pauvreté sont des réalités qui
s'apprécient dans la durée. Le choix de la période
1996-2005 est motivé par la maîtrise du processus d'accompagnement
des promoteurs par le personnel du FNE impliqué dans la création
d'activités.
Les données ont deux sources
complémentaires : le tableau d'amortissement de l'emprunt et le
plan d'affaires. Les indicateurs de financement sont issus du bureau de l'Agent
Administratif des Projets (ADP) du service emplois indépendants (SEI).
L'ADP suit les indicateurs de solvabilité des promoteurs à
travers le tableau d'amortissement. A partir de ce tableau d'amortissement de
l'emprunt contracté au FNE, nous pouvions dégager des
informations à caractères financiers de l'activité et du
promoteur. Les données relatives à la stratégie de
départ élaboré de commun accord entre le promoteur et son
conseiller -emploi (CE) sont issues des plans d'affaires. Le plan d'affaires
est un outil permettant d'affiner un projet tout en tenant compte de la
réalité du marché. Les fiches des plans d'affaires sont
conservées chez l'Agent administratif des projets. Les deux types de
données (financières et stratégiques) ont
été prélevés afin de tenir compte des
déterminants de la pérennité de l'activité telle
que nous renseigne la littérature (Vestraete et Saporta, 2006). Les
caractéristiques de l'échantillon prélevé sont
reprises dans la partie pratique et dans l'annexe. Afin de traiter les
données de l'échantillon, nous avons utilisé le logiciel
SPADN version 4.0, qui permet de faire des analyses en composante principale
(ACP).
*Guide d'entretien
Un guide d'entretien était soumis aux conseillers et
chefs de service impliqués directement dans l'accompagnement des
promoteurs. Les conseillers emplois sont impliqués à la fois dans
l'accueil, l'accompagnement, l'installation et le suivi des promoteurs. Nos
entretiens avec eux nous ont permis de cerner des difficultés auxquels
sont confrontés les promoteurs une fois installés. Le chef
service emploi indépendant (SEI) a la mission d'affecter le promoteur
à un conseiller et ceci selon le domaine de compétence du
Conseiller. L'entretien avec lui nous a permis d'estimer la marge de manoeuvre
dont dispose le FNE pour faire face à sa mission de promouvoir de
l'emploi au Cameroun. Cette méthode par guide d'entretien est un
complément à l'explication de la pérennité des
activités.
|