L'encouragement de l'investissement par la solution des conflits par voie d'arbitrage: les mesures prises par l'Etat Libanais et leur degré d'efficacité( Télécharger le fichier original )par Jean-Pierre Nasr - D.E.A. de Droit Privé, des Affaires et de l'Arbitrage 2007 |
Paragraphe II: La levée de la prohibition de l'Etat de compromettre en droit interneLes effets négatifs de l'annulation des clauses compromissoires dans les arrêts Cellis et Libancell de 2001 sur l'avenir des investissements au Liban, ont poussé le législateur à intervenir en 2002 en vertu de la loi n° 440 pour remanier sept articles du NCPCL. Les modifications les plus importantes ont trait à l'arbitrabilité des contrats conclus par l'Etat et les personnes morales de droit public. Notons que, si ces modifications ne concernent pas directement l'investissement, elles nous permettent cependant de prendre compte de l'évolution du droit libanais de l'arbitrage. I- l'Etat du Droit avant 1983Avant la promulgation du NCPCL, les personnes morales de droit public étaient frappées d'une incapacité de compromettre, qu'il s'agisse de litiges relevant du contentieux administratif ou du contentieux privé45(*). Elles ne pouvaient d'ailleurs être relevées de cette incapacité qu'exceptionnellement en vertu d'un texte législatif. La sanction de l'incapacité était en l'occurrence la nullité de la clause compromissoire ou du compromis, ainsi que celle de la procédure arbitrale qui s'en suivait. Ce n'est qu'en 1948, que s'est posé pour la première fois, le problème de l'arbitrabilité des contras administratifs devant le conseil d'Etat libanais, où ce dernier a affirmé à cette occasion la prohibition du recours à l'arbitrage par les établissements publics pour la résolution de leurs litiges46(*). II- L'arbitrage en vertu du règlement des établissements publics de 1972Le décret n° 4517 du 13 décembre 1972 porte sur la réglementation des établissements publics et autorise les conseils d'administrations des établissements publics à se référer à l'arbitrage en cas de litiges. L'importance de ce décret réside en en tant que premier texte émanant de l'autorité étatique, autorisant les établissements publics à recourir à l'arbitrage. Ce décret précise dans son article premier, que l'établissement public n'est ni l'Etat, ni les municipalités. III- L'Etat du Droit et de la Jurisprudence entre 1983 et 2002Le NCPCL promulgué en 1983 ne reprend les anciens articles 828 et 408 du CPC qui posaient un principe de prohibition de l'arbitrage en matière administrative. Le législateur a d'autre part ajouté, en vertu du décret-loi n° 20/1985 aux dispositions règlementant l'arbitrage interne un alinéa à l'article 795 du NCPC disposant: « si le litige objet de l'arbitrage relève de la compétence des juridictions administratives, l'exéquatur est octroyée par le président du conseil d'Etat... ».En dépit de cette modification législative, le Conseil d'Etat libanais restait attaché à la prohibition de l'arbitrage dans les contrats internes de droit public. Dans ce même sens, la section des consultations et de la législation du Ministère de la justice a exprimé une opinion dans une affaire opposant la municipalité de Beyrouth à la société OTV pour le traitement des déchets, concluant à l'inarbitrabilité des contrats administratifs en droit interne. Une série d'arrêts du Conseil d'Etat libanais47(*), rendus dans la même affaire, mais demeurés isolés, ont cependant apporté une certaine atténuation au principe rigide de non arbitrabilité des contrats administratifs internes. La difficulté que trouvent les juges administratifs à admettre l'arbitrage a connu son apogée à la veille de la promulgation de la loi n° 440/2002. Les deux arrêts du Conseil d'Etat rendus le 17 juillet 2001 dans deux affaires similaires opposant l'Etat libanais à la société FTML d'une part, et à la société finlandaise d'autre part48(*) en sont la plus grande illustration. Le Conseil d'Etat affirme que «l'interdiction de l'arbitrage dans les contrats administratifs constitue un principe ancré dans la jurisprudence et la doctrine administratives», en raison de l'absence d'un texte exprès autorisant l'arbitrage en la matière. Ces arrêts ont été vivement critiqués par la doctrine, ce qui a poussé le législateur à intervenir par la loi n° 440/2002. * 45 A. Patrikios, L'arbitrage en matière administrative, LGDJ, 1977 p. 31. * 46 Se référer à l'arrêt du Conseil d'Etat Libanais, no.303 du 27/12/1950, RJL, 1951, p.339. * 47 Se référer à l'Arrêt du Conseil d'Etat Libanais {Etat/Medrico},1/2/1988, Revue Judiciaire Administrative 1990/1991, n°5, p.37. * 48 V. Rev. Arb. 2001, p. 855 et s. |
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