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7 . 2002
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rubrique colloque:
son rôle décisif sur l'issue du litige, le T.A. a
considéré que le refus de prendre en compte un
élément de preuve est un motif de cassation1.
D'autre part, le juge peut intervenir en matière de
preuve à travers l'expertise2 pour réunir les
éléments de preuve et d'évaluation nécessaires
à la solution du litige.
En droit fiscal tunisien, le C.D.P.F. prévoit deux cas
de recours à l'expertise. L'article 62 du C.D.P.F. consacre le cas de
recours obligatoire à l'expertise3. Selon cet article :
« Dans les litiges relatifs aux droits d'enregistrement ou à
l'impôt sur le revenu au titre de la plus-value immobilière, le
tribunal ordonne d'office une expertise pour évaluer la valeur
vénale des immeubles, des droits immobiliers et des fonds de commerce
cédés >>. Le caractère d'office de l'expertise
semble être justifié dans ce cas par l'importance des
intérêts en jeu.
L'article 66 du C.D.P.F. prévoit, quant à lui,
le cas de désignation d'un expert à la demande du contribuable.
Selon cet article : « En cas d'introduction de modifications
nécessitant une nouvelle liquidation des sommes à payer ou
restituables, le tribunal peut se faire assister par l'administration fiscale
pour établir cette nouvelle liquidation ou désigner, à la
demande du contribuable, un expert à cet effet >>. Cet article
appelle deux observations :
D'une part, l'article 66 prévoit la possibilité
de désignation d'un expert à la demande du contribuable. En
pratique, c'est surtout pour l'imposition des contribuables soumis à
l'obligation de tenir une comptabilité que l'organisation d'une
expertise peut s'avérer utile. Ainsi, en cas de rejet de
comptabilité, le contribuable peut demander qu'une expertise soit faite
pour prouver le caractère nonfondé du rejet de
comptabilité.
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-
T.A., 10 avril 2001 /32233 (appréciation souveraine des
moyens de preuve par CSTO, car question de fait .
- T.A, 5 février 2001, req. n° 32134 (CSTO :
appréciation des moyens de preuve) :
" .
i
- T.A., 18 octobre 1999, req. n° 31439 ( moyens de preuve :
appréciation souveraine CSTO).
- T.A., 18 octobre 1999, req. n° 31503 ( moyens de preuve :
appréciation souveraine CSTO).
1 -T.A., 21 mai 2001, req. n°32361 (inédit), voir en
annexe n°2 de ce mémoire.
- Voir aussi T.A., 5 février 2001, req. n° 32192,
voir annexe n° 2 de ce mémoire.
- T.A. 23 avril 2001, req. n° 31645 :
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2 Sur l'expertise voir :
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- J. DUCHON-DORIS, << Evolution du rôle de
l'expertise dans le contentieux fiscal >>, B.F. 3/ 90, p. 159.
- François LOLOUM, << Quelle est la portée
du contrôle de cassation en matière d'expertise et de
dénaturation ? >>, B.D.C.F. 4/97, n°85, p.5 1-53.
- DELIGNIERES (B.), << Preuve fiscale >>,
(généralités, charge et administration de la preuve),
juris-classeurs, Proc. Fisc., Fasc. 380, 1994, p. 14 et 15.
3 Voir Note commune n°9, Texte n° D.G.I. 2002 / 22,
p. 97, relative au contentieux de l'assiette de l'impôt devant les
tribunaux de l'ordre judiciaire objet des articles 53 à 68 du code des
droits et procédures fiscaux. Voir en annexe n°3 de ce
mémoire.
Il faut noter que le résultat de l'expertise ne lie ni
le juge ni l'administration. Celle-ci peut ne pas adopter cette expertise.
Mais, le T.A. exige, fort heureusement, que l'administration doit justifier et
motiver le rejet de l'expertise1.
D'autre part, l'article prévoit la possibilité
de se faire assister par les agents de l'administration. L'expertise
confiée aux agents de l'administration fiscale ne va-t-elle pas à
l'encontre de l'objectivité requise en matière de justice,
n'accroît-elle pas le déséquilibre entre l'administration
fiscale et le contribuable, ne constitue-t-elle pas une survivance du
problème d'une administration à la fois juge et partie ?
Quoiqu'il en soit, l'intervention du juge en matière
de preuve permet de rééquilibrer dans certaine mesure les
rapports entre le contribuable et l'administration fiscale. Certes, « le
juge n'est pas un supérieur hiérarchique de l'administration ;
c'est bien un juge, un contrôleur juridique de l'administration, mais ses
décisions peuvent se traduire par une modification directe de
l'impôt qui avait été assigné au contribuable
>>2 . Ainsi, « à la fonction classique et
mécaniste de la preuve, qui est de convaincre le juge en vue de trancher
une contestation de droit ou de fait, tend à s'ajouter maintenant une
fonction nouvelle, plus dynamique, dans laquelle la preuve devient
également pour le juge un moyen de doser le contrôle qu'il
désire exercer sur l'activité administrative
>>3.
Néanmoins, il ne faut pas exagérer la
portée des pouvoirs du juge fiscal4. Il faut observer que
« l'environnement fiscal favorable suppose (...) l'existence d'une justice
réellement indépendante et réellement compétente
pour trancher, en toute impartialité, les litiges fiscaux
>>5. Le juge fiscal devrait avoir présent à
l'esprit le conseil adressé par le Calife Omar Ibn El KHATTAB dans sa
lettre à Abou Moussa EL ACHAARI : « la fonction de cadi (juge) est
un devoir religieux précis et une tradition qu'il faut suivre. Ecoutes
bien les dépositions qui sont faites devant toi, car il est inutile
d'examiner une requête qui n'est pas valide. Tu dois traiter sur le
même pied ceux qui comparaissent à ton tribunal et devant ta
conscience, de sorte que le puissant ne puisse compter sur ta partialité
ni le faible désespérer de ta justice >>.
1 -T.A., 20 mai 2002, req. n°32228 (inédit), voir
annexe n°2 de ce mémoire.
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Voir aussi les arrêts du T.A :
- T.A., 7 mai 2001, req. n° 32079 (inédit), voir en
annexe n°2 de ce mémoire.
- T.A., 5 juin 2001, req. n°32431.
- T.A., 18 octobre 1999, req. n° 31667.
2 Michel ROUGEVIN-BAVILLE et Cie, << Leçons de
droit administratif >> op. Cit., p.530.
3 J.-P. COLSON, << L'office du juge et la preuve dans le
contentieux administratif >>, L.G.D.J., Paris 1970, p. 9.
4 Voir :
" " -
.
5 Néji BACCOUCHE, << L'environnement fiscal de
l'entreprise à l'heure de l'internationalisation de l'économie :
Le cas tunisien >>, in journées de l'entreprise 9 et 10 novembre
2001, Port El Kantaoui, édition préliminaire.
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
Le C.D.P.F. a davantage renforcé les pouvoirs de
l'administration fiscale plus qu'il n'a renforcé les garanties du
contribuable. L'administration fiscale apparaît comme une administration
puissante. Elle est bien outillée et juridiquement armée.
Les règles présidant à l'administration
de la preuve sont telles que les contribuables ne pourront espérer
pouvoir faire prévaloir leurs droits que difficilement. Peut être
dans cet aménagement a-t-on négligé les contribuables.
Leur droit à la preuve, s'il n'est pas encore lettre morte, se
rétrécit chaque jour tel une peau de chagrin1.
Comment peut-on alors convaincre le contribuable d'accepter
l'impôt en tant que participation à la vie politique et non pas en
tant que mal nécessaire ? La lutte contre la fraude fiscale ne se fait
pas moyennant les prérogatives exorbitantes de l'administration ou
moyennant des dispositions répressives sévères. L'octroi
des garanties réelles au contribuable et l'instauration d'impositions
modérées sont les véritables solutions durables à
la fraude2.
Il convient d'avoir présent à l'esprit que
« derrière chaque contribuable il n'y a pas nécessairement
un fraudeur. Et mieux vaut laisser échapper un fraudeur que de risquer
d'imposer abusivement d'honnêtes citoyens »3.
1 Gérard LUPI, << La preuve en matière
d'impôts directs >> ; R.S.L.F. 1955, n°3, p. 584.
2 Néji BACCOUCHE, << L'environnement fiscal de
l'entreprise à l'heure de l'internationalisation de l'économie :
Le cas tunisien >>, in journées de l'entreprise 9 et 10 novembre
2001, Port El Kantaoui, édition préliminaire, p. 102.
3 P.-M. GAUDEMET, << réflexions sur les rapports du
juge et du fisc >>, mélanges M.Waline, t.5, 1974, p.136.