3.1.5 Principales mesures d'optimisation des
dépenses publiques
Le Cameroun aspire à rejoindre, d'ici 2035, le groupe
des nations industrialisées à revenu intermédiaire de la
tranche supérieure, avec de faibles taux de pauvreté, une
croissance économique soutenue et une démocratie
consolidée. Élaboré par le gouvernement dans ce but, le
Document de Stratégie pour la Croissance et l'Emploi table sur un taux
annuel de croissance du PIB de 5,5% et la création de milliers d'emplois
formels chaque année. Fort d'une économie relativement plus
diversifiée que ses voisins de la Communauté économique et
monétaire de l'Afrique centrale, plus dépendants du
pétrole, le Cameroun semblait, du moins jusqu'au milieu de cette
décennie, en bonne position pour concrétiser ses objectifs. Mais
une conjoncture extérieure moins favorable et des contraintes internes
menacent les ambitions de développement du pays, où le taux de
pauvreté reste élevé, à 37,5% en 2014 (Source
résultats de ECAM44 publié par l'INS5 en
2018).
Avec les effets durables du choc pétrolier de 2014 et
la détérioration de la situation intérieure,
l'économie camerounaise a marqué le pas. Les flambées de
violence dans les régions du Nord et de l'Extrême-Nord,
conjuguées à un mouvement séparatiste dans les
régions anglophones, ont porté un coup d'arrêt à
l'activité. En réaction, les dépenses de
sécurité ont monté en flèche, aggravant le
déficit budgétaire qui est ressorti à 6,1% du PIB en 2016,
le taux de croissance atteignant en 2017 son niveau plancher depuis sept ans,
à 3,5%. L'insuffisance et l'inefficacité des dépenses en
faveur de la santé maternelle et infantile ainsi que le coût trop
élevé des manuels scolaires ont également rejailli sur les
performances en matière de santé et d'éducation. En
parallèle, une hausse sensible des emprunts en vue de financer de lourds
projets d'infrastructures ont fait grimper la dette publique à 35,7% du
PIB en 2017, contre 15,9% en 2006.
Le pays dispose néanmoins d'atouts pour renverser la
situation : la récente revue des dépenses publiques
réalisée par la Banque mondiale et intitulée : Aligner
les dépenses publiques aux objectifs de la Vision 2035 identifie
cinq leviers pour y parvenir :
(1) Rectifier l'assise macroéconomique.
Les pouvoirs publics doivent afficher leur volonté de
respecter une discipline macroéconomique et budgétaire. Cela
passe par la rationalisation des dépenses publiques, la recherche de
nouvelles sources de revenu et la maîtrise de la dette publique. L'une
4. ECAM4=Quatrième Enquête Camerounaise
auprès des Ménages
5. INS=Institut National de la Statistique
NDI ZAMBO Jean *** Mémoire ISE
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Hypothèse des déficits jumeaux: évaluation
empirique appliquée au Cameroun
des conclusions du rapport est sans appel : seuls un
redéploiement des dépenses publiques et des réformes
structurelles parviendront à améliorer l'efficacité des
dépenses publiques sans menacer la stabilité budgétaire.
La réduction de la part des dépenses de l'administration
générale et financière dans le total des dépenses
--en particulier les frais de représentation, de missions, de
cérémonies, de carburant, de voyages et de services externes --
pourrait entraîner de substantielles économies budgétaires.
Les économies réalisées sur ces frais, de même que
les gains liés à la réduction des dépenses fiscales
et la diminution des transferts et des subventions, permettraient de
dégager une véritable marge de manoeuvre en faveur des secteurs
sociaux (et autres secteurs prioritaires).
(2) Réduire la dette et mieux gérer les
investissements publics.
Pour maîtriser son endettement, le gouvernement doit
optimiser la gestion des entreprises d'État et des investissements
publics. Il doit pouvoir identifier et adopter les mesures à prendre
pour éviter l'accumulation de pertes financières chaque
année. Louable, la volonté du pays de réduire son
déficit d'infrastructures ne doit pas empêcher d'approfondir et
d'accélérer les efforts consentis pour rendre les investissements
publics plus efficaces. Le ministère des Finances et le ministère
de l'Économie, de la Planification et de l'Aménagement du
territoire doivent hiérarchiser les projets existants et renforcer le
cycle des projets d'investissement public. Pour ce faire, le gouvernement doit
fixer des critères précis pour déterminer le degré
de maturité des projets et procéder à des
évaluations à chaque étape. Au lieu de recourir à
de coûteux emprunts commerciaux qui aggravent le risque de
surendettement, il doit privilégier les financements concessionnels et
les partenariats public-privé.
(3) Améliorer l'efficacité dans le secteur de
l'éducation.
L'efficacité accrue des dépenses passe par une
allocation directe des fonds aux établissements scolaires, via un
mécanisme de financement tenant compte de leurs besoins
spécifiques et intégrant des incitations à la performance.
Le transfert direct des fonds devrait renforcer sensiblement la
responsabilité des établissements et augmenter le montant des
dépenses par élève. Par ailleurs, l'introduction de
mécanismes de financement basé sur la performance à
l'échelle des écoles devrait accentuer les incitations à
obtenir de meilleurs résultats. La révision des politiques de
recrutement, de rémunération et d'affectation des enseignants
pourrait favoriser une répartition plus équitable des ressources
éducatives. Alors que plus de 80% du
NDI ZAMBO Jean *** Mémoire ISE
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Hypothèse des déficits jumeaux: évaluation
empirique appliquée au Cameroun
budget de l'éducation sont consacrés à la
rémunération des enseignants, le nombre d'enseignants dans les
zones qui en ont le plus besoin, les ZEP (zones d'éducation
prioritaire), est en recul constant.
(4) Augmenter et optimiser les dépenses de
santé.
L'État doit allouer davantage de ressources à
la santé et mieux les gérer. Un rééquilibrage de la
distribution des ressources entre l'administration centrale et les lieux de
prestation des services à l'échelon local contribuerait à
améliorer l'efficacité et l'équité des
dépenses de santé, sachant que les établissements de soins
primaires au niveau des districts tendent à offrir les interventions les
plus rentables tout en desservant les ménages les plus pauvres et les
plus vulnérables. Dans le cadre de l'extension du programme de
financement basé sur la performance, le gouvernement devrait introduire
un système de budgétisation équitable reposant sur une
formule de calcul transparente dans le but d'affecter des moyens aux
régions qui en ont le plus besoin. Plusieurs pays ont adopté des
formules de ce type, où l'allocation des ressources est fonction des
spécificités de chaque centre de soins et des besoins de la
population desservie.
(5) Renforcer le système de protection sociale et les
filets sociaux. Le gouvernement a également beaucoup à faire pour
améliorer le dispositif de protection sociale du pays. Il doit pour cela
modifier sensiblement la composition des dépenses en faveur de l'aide
sociale, d'un meilleur ciblage et d'une couverture complète des risques.
Plus de 90%: la revue des dépenses publiques du Cameroun
réalisé par la Banque Mondiale des dépenses sociales
actuelles subventionnent le régime de pensions de la
fonction publique et les subventions aux carburants deux types
de dépenses qui ne couvrent ni les pauvres, ni les principaux risques
encourus tout au long de la vie.
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