A. Commerce de gros
Les feuilles de manioc vendues par les grossistes à
Matamba viennent du plateau de Batéké plus fréquemment de
Menkao, de Bita, de Dumi et de petits villages dans les environs de ces grands
centres de transit ; mais également de Maluku pour le Manihot
glazziovi. Les grossistes des feuilles de manioc à Matamba
s'approvisionnent de deux manières : l'achat bord champ et achat
à Kinshasa auprès des producteurs au niveau du même
marché.
a. Approvisionnement bord champ
L'achat bord champ se fait de deux manières : Le
commerçant peut acheter à l'hectare ou par botte. L'hectare
coûte 35.000 FC et compte 7 colis1 en moyenne soit 35
variés2. Quand il achète par botte, cette
dernière coûte 1.500 FC.
a.1. Organisation
Par un appel de la part du producteur, les commerçants
s'organisent en groupe ou le plus souvent individuellement, recrutent la main
d'oeuvre appelée « équipage3 »,
et louent un véhicule depuis Kinshasa pour récolter et
transporter les feuilles de manioc achetées. Le voyage s'effectue
généralement la nuit. Le commerçant paie le producteur en
fonction de l'étendue à récolter. Cette dernière
commence aux environs de 4h et prend fin avant le lever du soleil pour
facilement atteindre Matamba sans que la production soit brûlée
par les rayons solaires.
La récolte se fait par les ouvriers appelés
« équipages ». Une fois la récolte
réalisée, les feuilles sont regroupées par bottes et le
véhicule peut être chargé pour l'acheminement de la
marchandise vers Matamba à Kinshasa. La botte autrement appelée
varié, est achetée à 1.500 FC est vendue de 4.000 FC
à 6.000 FC selon la qualité. Le commerçant effectue un
approvisionnement par semaine. Cette fréquence d'achat s'explique par le
fait que le travail est physiquement épuisant. Le grossiste doit, en
outre, être sûr au préalable de la disponibilité de
la marchandise avant d'organiser le voyage.
1 Colis : botte de 110 kg avec tiges et 60 kg sans
tiges
2 Varié : botte de 22 kg avec tiges et 12 kg
sans tiges
3 Equipage : main d'oeuvre utilisée dans la
récolte des feuilles
39
a.2. Risques
L'achat des feuilles de manioc au niveau du producteur parait
intéressant pour les grossistes. En effet, ils réalisent en
moyenne un bénéfice représentant au moins 50 % de leurs
dépenses. Cependant le risque est très élevé :
- Le risque que les équipages finissent la
récolte plus tard que prévu, ce qui aura pour conséquence
la détérioration des feuilles durant le transport avec
l'ensoleillement ;
- Le risque d'être en face des feuilles de manioc de
mauvaise qualité ; - Le risque de passer nuit à la belle
étoile en cas de panne du véhicule.
Pour contourner ces risques, les grossistes
préfèrent généralement acheter les feuilles de
manioc à l'arrivée à Kinshasa. Les grossistes choisissent
donc généralement la sécurité à un profit
élevé avec beaucoup de risques qui peuvent leur faire perdre
toute la somme investie.
b. Approvisionnement à Matamba.
Cet approvisionnement s'est développé suite aux
risques liés à un achat sur le lieu de production au plateau de
Batéké. Les producteurs viennent vendre leurs marchandises
à Matamba à un prix incluant les frais de transport et la main
d'oeuvre utilisée pour la récolte. La variée est vendue
à 5.000 FC. Cette pratique donne naissance à un autre acteur dans
la filière : « maman manoeuvre ». Elle sert
de pont entre le grossiste qui est généralement le producteur et
le détaillant. Le producteur prend contact avec la « maman
manoeuvre » avant tout déplacement pour Matamba. Une fois
arrivé à Kinshasa, le producteur confie la marchandise à
la maman manoeuvre qui se charge de la vente en majorant le prix de la
variée de 1.000 FC pour réaliser une marge. La plupart des mamans
manoeuvres sont d'anciens grossistes qui ont renoncé à
s'approvisionner au lieu de production pour éviter les risques
signalés ci-haut. Les mamans manoeuvres peuvent réaliser
jusqu'à trois rotations achat-vente par semaine.
c. Contrainte au niveau du grossiste
Le grossiste n'éprouve pas des difficultés
particulières dans l'écoulement de sa marchandise. Lorsqu'il y a
moins de clients, il stocke la marchandise pour la vendre le lendemain, ou
alors il vend en détail en cassant le prix pour écouler
rapidement sa marchandise. La vente en détail permet au grossiste un
bénéfice plus important même si cela peut prendre beaucoup
de temps.
B. Commerce de détail a.
Approvisionnement
Les détaillants des feuilles de manioc à
Matamba, s'approvisionnent et vendent sur place. L'espèce
préférée par les consommateurs est le Manihot
glazziovi. Le Manihot esculenta est généralement
achetée lorsque le Manihot glazziovi n'est pas en abondance sur
le marché.
40
b. Dépenses réalisées
Hormis le coût d'achat, les détaillants
dépensent pour la taxe et le dépôt. La taxe
s'élève à 400 FC et les frais de dépôt 500
FC. Le tout par jour pour l'ensemble de marchandises. L'achat et la vente sont
faits le long de la journée à chaque fois qu'un véhicule
arrive et que le commerçant a la possibilité de se procurer de la
marchandise.
c. Conditions de vente et contraintes
La vente ayant lieu tout au long de la journée. Les
détaillants sont obligés de préserver la qualité et
la fraicheur des feuilles de manioc. La pratique la plus répandue parmi
les détaillants est l'aspersion de l'eau sur les feuilles et la vente
sous un abri afin de protéger les feuilles contre les rayons solaires.
Une botte « variée » achetée donne 20 bottes de 500 FC
en saison pluvieuse. Le poids d'une botte est en moyenne d'1 kg avec tige et
environ 600 gr sans tige. Les détaillants s'approvisionnent en moyenne
trois fois par semaine en saison pluvieuse et deux fois en saison sèche
à cause de la rareté du produit au champ due au manque de
pluie.
e. Rareté
Les feuilles de manioc sont rares à la saison
sèche au point que le prix à l'achat comme à la vente
augmente d'au moins 100 %. La saison sèche est donc la période la
plus intéressante pour les commerçants. Pendant cette
période où l'offre est inférieure à la demande, les
clients ne sont pas très exigeants en ce qui concerne la qualité
des feuilles. Ils se contentent de ce qui est disponible sur le marché
quelle qu'en soit la qualité.
f. « Bidongola »
Les « bidongola » sont des déchets provenant
du reconditionnement de grosses bottes achetées en gros en de plus
petites vendues en détail. La nouvelle petite botte qui est
l'unité de vente en détail pèse en moyenne 1 kg avec tige
soit 600 gr sans tige. Les feuilles qui tombent lors du reconditionnement sont
toutes récupérées et vendues en tas d'environ 750 grammes
à 200 FC. Une variée (botte d'environ 12 kg) peut produire 3
à 6 tas.
3.2.2.2. Situation du marché UPN A.
Approvisionnement
La situation de commercialisation au marché UPN est
très différente de celle de Matamba. Dans ce dernier
marché, il y a des acteurs économiques très distincts de
par leurs produits et leurs activités. Par contre, au marché UPN,
tous les acteurs sont mêlés. Une même personne est à
la fois grossiste et détaillant. Tout dépend du moment de la
journée. A leur arrivée, les commerçants sont grossistes,
ils vendent aux mamans manoeuvres venues des quartiers environnants et qui les
revendront à leur tour, en détail, de manière ambulante
ainsi qu'aux restaurateurs de fortune en saison sèche. Cette situation
n'est pas régulière. Le commerçant est grossiste seulement
quand il y a le client et des invendus.
41
La commercialisation des feuilles de manioc au marché
UPN est réalisée par les habitants de Kasangulu qui viennent
uniquement vendre les feuilles et retourner au Kongo-Central. Les feuilles de
manioc commercialisées dans ce marché viennent du Kongo-Central
et plus précisément de Kasangulu. Le commerce est plus
réalisé en détail qu'en gros. Le commerçant
grossiste achète auprès du producteur des bottes de 2 kg à
500 FC la botte. Arrivé à Kinshasa, la même botte sera
divisée par deux et vendue à 500 FC la demi-botte.
Pour faciliter le transport de sa marchandise, le
commerçant au niveau de Kasangulu rassemble toutes ses bottes en
« kimfunda ». Cette unité n'a pas
d'équivalent précis parce qu'elle varie en fonction du nombre de
botte. Le kimfunda contient en moyenne 45 (45 kg) à 100 bottes (100 kg).
Le frais de transport d'un kimfunda est de 1.000 FC. Au marché, le
commerçant dépense 1.200 FC chaque jour pour les taxes et la
location de la place.
|