1.1.2 Théorie du choix public
La théorie du choix public prône la
création d'une compétition entre les établissements
scolaires en indexant l'allocation des ressources publiques à la
performance de l'école. Les parents pourraient choisir les
établissements qui offrent le niveau de qualité le plus
élevé pour placer leurs enfants. Ce choix de la part des parents
créerait une compétition entre les établissements qui par
la suite conduirait à des efforts de la part de ces derniers pour
augmenter le niveau de la performance. Bien que cette théorie ne remette
pas en cause la gestion publique de l'éducation, elle explique qu'il est
plus difficile que les usagers du système éducatif aient
accès à une éducation de qualité lorsqu'il s'agit
d'un dispositif de gestion publique axée sur une bureaucratie
professionnelle Meuret Denis (2000).
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1.1.4. L'offre et la demande d'éducation
Les notions d'offre et de demande d'éducation sont
complexes et diverses : les différentes disciplines (économie,
histoire, sociologie, démographie...) développent des approches
singulières de ces notions du fait de méthodes et
d'intérêts scientifiques différents. Les recherches
menées sur l'offre et surtout sur la demande d'éducation sont
relativement récentes' et très peu développées. En
Afrique, la problématique de l'offre et de la demande d'éducation
est encore plus récente. (Lange M.-F. et
Martin J.-Y., 1995)
Ce sont les difficultés rencontrées par les pays
africains pour atteindre ' On peut situer la naissance des recherches sur la
demande d'éducation en économie avec l'émergence de la
théorie du capital humain (Becker G.S.,( 1964).
Par ailleurs, dans les pays développés, cette
approche s'est longtemps limitée à l'étude de la demande
d'éducation dans l'enseignement supérieur, puis à
l'enseignement secondaire, alors qu'en Afrique les études se sont
plutôt concentrées sur l'enseignement primaire. Plus
récemment, l'approche a pris en compte l`enseignement
préscolaire. (Weikart D. P.,
(2000).
1.1.4.1. L'offre d'éducation
L'offre d'éducation renvoie aux capacités
institutionnelles, aux moyens humains et matériels offerts et à
leur répartition quantitative et qualitative sur le territoire national
et entre les différents groupes sociaux. Elle dépend
étroitement des politiques d'éducation et donc de l'environnement
politique global (qu'il soit national ou international), mais aussi du
dynamisme de certains groupes de la société civile
(confédérations religieuses, mouvements associatifs ou syndicaux,
communautés villageoises ou de quartier urbain) ou de l'initiative
privée des individus.
L'offre d'éducation est appréhendée et
dénommée de façon très différente selon les
auteurs ; certains parlent d'offre scolaire ou d'offre de formation
(Duru-Bellat M. et Henriot-Van Canten A., (1992) d'autres d'offre
d'éducation Enfin, de nombreux auteurs étudient les politiques
éducatives (et pour partie l'offre d'éducation) mais sans faire
mention de cette notion. L'expression la plus communément
utilisée est dorénavant celle d'offre d'éducation, tout
particulièrement dans les pays du Sud où le développement
de l'offre éducative concerne tant l'éducation formelle que non
formelle.
Le singulier utilisé pour désigner «
l'offre » ne doit pas oblitérer le fait qu'il s'agit d'une offre
plurielle et diversifiée, aux moyens souvent disparates et aux objectifs
parfois divergents, et qui s'adresse soit à des publics non
définis, soit spécifiques3. Elle peut être d'origine
publique, privée (laïque ou confessionnelle), associative ou
communautaire, financée et reconnue ou non par
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les gouvernements. Cette offre plurielle s'inscrit au sein
d'un espace social : c'est dire que le secteur scolaire est le lieu où
s'opposent positions sociales, habitus et prises de position (Bourdieu P.
1994).
Le champ scolaire est alors considéré comme le
lieu de confrontation des différents acteurs et l'offre
d'éducation est perçue comme une offre sociale
déterminée en partie par les rapports de force qui
s'établissent entre les différents acteurs (État, aide
internationale, collectivités territoriales, ONG nationales ou
internationales, partis politiques, institutions ' Comme l'observe Jacques
Hallak, << La question de la demande aurait mérité
d'être mentionnée pendant la Conférence mondiale sur
l'éducation pour tous, mais les principales préoccupations des
participants étaient alors l'offre (accès et
équité) et la réussite de l'apprentissage.
La Déclaration et le Cadre d'action de Jomtien partent
de l'hypothèse que si l'offre est satisfaisante (sur les plans de la
quantité, de la localisation et de la qualité), enfants et
adultes iront à l'école et l'objectif de l'éducation pour
tous sera atteint. ( Hallak J., 1994).
En réalité, n'ont pas été pris en
compte ni les besoins, ni les desiderata des familles ou des
élèves en matière éducative, ni les revendications
ou les propositions des enseignants : le partenariat, tant affirmé,
finalement « ne résiste pas à l'analyse de l'exclusion des
enseignants et des familles, pourtant premier acteur de l'éducation et
de la socialisation des enfants» (Lange M.-F., 2003).
En effet, considérer l'offre d'éducation comme
sociale c'est aussi reconnaître que la transmission des connaissances
n'est pas neutre: il s'agit de faire passer, voire d'imposer, différents
types de savoirs, savoir-contenu, savoir-faire, savoir-être, savoir se
situer (Bourdieu.P., 1994) éléments constitutifs d'un
projet de société dévoilé ou non. Ceci signale que
l'offre d'éducation ne peut s'appréhender sous l'unique angle des
capacités institutionnelles de l'État et des différents
acteurs intervenant dans le secteur scolaire, ni s'évalué en
comptabilisant les salles de classe, le matériel ou les enseignants
disponibles.
Le fait d'appréhender l'offre d'éducation comme
une offre sociale permet aussi de s'interroger sur les raisons et les
conditions de la répartition de cette offre entre les différentes
régions, milieux ou groupes sociaux. En effet, l'offre éducative
est souvent répartie de façon très inégale en
Afrique, y compris dans les pays francophones de tradition administrative
très centralisée.
Les disparités selon les milieux (urbain et rural),
à l'intérieur du milieu urbain (opposant centre et
périphérie, quartiers lotis et quartiers « spontanés
» ou non lotis), ou selon les groupes sociaux sont encore de nos jours
très importantes. De fait, que ce soit en Afrique francophone ou
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anglophone, les individus ne sont pas égaux face
à l'offre scolaire, comme l'indiquent les études de cas
menées dans différents pays, que ce soit en Tanzanie. (Bonini
N., 1995)
Le nombre de places disponibles, l'éventail du choix
selon les différents types d'écoles (privé public,
religieux laïc) et selon les degrés d'enseignement, et la
qualité de l'éducation varient considérablement d'une
région à l'autre, du milieu rural au milieu urbain" Ils ne sont
pas égaux non plus quant au capital économique ou relationnel
qu'ils peuvent mobiliser en vue de la scolarisation de leurs enfants.
Fréquemment, la distribution de l'offre favorise les populations
aisées et ou déjà bénéficiaires de
structures éducatives et les plus pauvres sont souvent celles qui n'ont
aucun accès à des services éducatifs (zones non loties des
villes, zones rurales défavorisées). Cependant, face à une
offre donnée, les stratégies les plus diverses s'observent, du
refus de l'école à l'acharnement scolaire (Lange M.-F. et
Martin J.-Y.,1995). Ce qui indique que si l'offre peut stimuler la
demande, elle peut aussi ne pas être utilisée (de façon
partielle ou totale).
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