3.2.3 Exhibitionnisme ou l'impudeur corporelle sur les
réseaux sociaux
Les jeunes par rapport au domaine privé ont vu leurs
usages et aux images évoluer quant à la « contentions de soi
des générations précédentes » (Granjon, 2014).
Plusieurs auteurs tels que Granjon s'accordent à dire que les jeunes
individus n'hésitent plus à se dévoiler au public, ce qui
les amène à se soumettre au regard d'autrui, notamment pas
l'extimité et l'exhibitionnisme. Échanger à travers les
photographies, les messageries instantanées aident les jeunes à
se montrer plus facilement. Notre étude nous donne des informations de
terrains biaisées par rapport au fait que les individus se montrent de
manière exhibitionniste. Les entretiens nous montrent qu'il n'y a pas
d'exhibitionnisme de la part des interrogés, qui refusent de montrer
leur intimité, voire qui vont jusqu'à « ne pas montrer
ses émotions » (Camille)116. Ils mettent parfois
des images d'eux, mais postent surtout des clichés de voyages ou
d'activités. Nous pouvons donc dire qu'ils se construisent une
identité basée sur leurs expériences, leurs
activités validées par les autres. Cependant, avec l'analyse de
contenus nous remarquons dans un premier temps qu'il y moins de pudeur
corporelle, les personnes n'hésitent pas à poser en tenue
légère, laissant paraître leur physique. Ils ont une grande
monstration de leur quotidien, ils se mettent en scène dans des
situations différentes de la vie, postent des selfies mais elles ne vont
jamais jusqu'à la nudité. Il est peut-être plus facile de
se montrer sur les réseaux sociaux grâce à la
possibilité de contrôle de son image, mais il résulte
derrière une volonté de modifier son apparence afin de se
créer une image de soi. Pour Fabien Granjon (2014) par exemple, le
sentiment de pudeur est une obligation d'autocontrôle de son image. Il
s'appuie sur la thèse de Norbert Elias dans La civilisation des
moeurs (1973) qui est que le sentiment de pudeur et «
l'évaluation des seuils de la bienséance et du convenable »
répondent à des logiques de contrôle socialement construit.
L'impudeur fait partie du décontrôle, car la société
fait qu'aujourd'hui, les codes sociaux sont davantage détendus, mais
qu'il est nécessaire de les maîtriser. Il démontre que la
pudeur et l'impudeur sur les réseaux sociaux est «
l'effet/conséquence de la formation d'un public éduqué,
rendu moins sensible aux expansivités de soi ». L'impudeur et la
pudeur sont une manière de toujours contrôler l'image que l'on
renvoi, même si elles laissent à penser qu'elles ne le sont pas.
C'est important d'encadrer ce que l'on publie de soi dans un espace où
l'on se dévoile intimement. Plusieurs de nos interrogés ont
dévoilé ne montrer qu'une partie de leur identité sur
Internet, une partie « sociale » qu'ils maîtrisent. Certains
comme Justine parle de « sélectionner » ce qu'ils montrent
d'eux, que ce soit au niveau de leur corps ou de caractère. Christophe
par exemple, ne montre que des aspects de son physique « pas trop
désagréables » tandis qu'Agathe117 montre
une facette d'elle « plus lisse ». L'analyse de contenu
prouve également qu'il y a une sélection de ce que l'on peut
montrer ou non : de la sensualité, mais jamais de vulgarité, on
peut montrer son apparence, mais seulement celles que l'on trouve
agréables, on peut montrer
116 Entretien Camille, le 06 juin 2019
117 Entretien Agathe, 19 juin 2019
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sa personnalité, mais seulement la partie
intéressante. Il faut se montrer unique, mais tout en respectant les
normes des réseaux sociaux. La maîtrise de ce que l'on expose de
soi est une théâtralisation, un témoignage du jeu
identitaire dans lequel se lancent les individus et une preuve de l'envie de
devenir autonome. (Granjon, 2014). Nous nous rendons compte que les personnes
contrôlent leur image en choisissant les facette d'eux-mêmes
à mettre en avant, en se construisant une image préconçue
pour la communauté et pour être sûre d'être
appréciée d'elle, ce qui va de pair avec l'identité
réelle et virtuelle.
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