Patrimoine culturel Bandjoun. Destruction et stratégies de protection (1904-2005).par Jacques Simo Djilo Université de Dschang Cameroun - Master 2 2018 |
3.2.8 Le manque d'intérêt des nouvelles générationsCe facteur est essentiel dans la compréhension de la disparition du patrimoine culturel matériel et immatériel de Bandjoun. En date du 10 Avril 2019, nous avons adressé un questionnaire aux jeunes de la chefferie Bandjoun plus précisément du quartier Hiala. Notre population accessible était de 110 jeunes des deux sexes. Sur la base des questions fermées et ouvertes, nous avons recueilli leurs avis dont l'exploitation et l'analyse nous ont permis de tirer quelques conclusions. Les résultats de nos questionnaires sont regroupés dans le Tableau suivant. Tableau 3: Avez-vous déjà entendu parler du patrimoine culturel ?
Source : Enquête de terrain réalisée le 10/05/2019 Les résultats de ce tableau démontrent à suffisance qu'une bonne partie de la jeunesse de la chefferie Bandjoun est au moins au parfum de la notion de Patrimoine. Tableau 4: Quelle (s) activité (s) de la liste ci-dessous savez-vous exercer?
Source : Enquête de terrain réalisée le 10/05/2019 Il convient de préciser que nous avons fermé cette question car les activités insérées dans le tableau sont celles qui sont considérées comme très lointaines et faisant partie intégrante du patrimoine culturel matériel Bandjoun bien avant le contact avec la colonisation. Les résultats contenus dans ce tableau démontrent clairement qu'il y'a un véritable problème de transmission du savoir-faire à la chefferie Bandjoun. Tableau 5: Quel métier aimeriez-vous exercer plus tard
Source : Enquête de terrain réalisée le 10/05/2019 Les résultats obtenus à partir de cette question attestent de ce que les jeunes ne sont pas attirés par l'artisanat élément primordial de leur patrimoine culturel. Même ceux qui précédemment ont affirmé qu'ils exerçaient la vannerie nous ont rétorqués qu'ils le faisaient parallèlement. Cependant, ils semblent attirés par le mirage urbain et le mirage occidental. C'est pourquoi plusieurs évoquaient des métiers de médecins, de magistrats, de comptables... On comprend pourquoi, la chefferie se vide par le phénomène d'exode rural. Les jeunes sont à la recherche des activités lucratives. Une fois partie et au contact du monde urbain perdent totalement leur identité culturelle, se lancent dans une recherche du gain facile etc. Au regard de cette désinvolture des jeunes et du recul des valeurs culturelles « Combien de jeunes parlent encore leur langue maternelle ? Quels sont ceux des jeunes africains qui peuvent réciter quelques versets de prières traditionnelles ? »204(*) Tableau 6: Etes-vous membre d'une société sécrète ou d'une autre association culturelle? (si oui précisez) (Si non cochez la raison)
Source : Enquête de terrain réalisée le 10/05/2019 Parmi les 110 interrogés, les 4/5 affirment ne pas appartenir à aucune association culturelle. Et pourtant déjà à l'âge de 15 ans pas moins de 4 associations culturelles sont ouvertes aux jeunes Todjom. Les autres personnes qui affirment appartenir à une association culturelle pour l'essentiel étaient le lali, et le wouop.
Source : Enquête de terrain réalisée le 10/05/2019 L'observation de ce tableau fait comprendre que les jeunes à Bandjoun sont encore dans une logique de construction des préjugés en ce qui concerne la dimension immatérielle du patrimoine culturel. Cette construction de préjugés s'accompagne et se consolide par l'expansion des idées religieuses. Tableau 8: Trouvez-vous nécessaire de protéger le patrimoine culturel de votre village ? Pourquoi ?
Source : Enquête de terrain réalisée le 10/05/2019 Cette question à deux tendances (une fermée et l'autre ouverte) nous a permis d'évaluer la place qu'occupent la protection et la valorisation du patrimoine culturel Bandjoun dans les considérations de développement des jeunes à Bandjoun. S'il y est une véritable avérée, c'est que tous sont conscients que le patrimoine culturel doit être protégé. Cependant la véritable difficulté à laquelle ils se heurtent est celle de savoir comment et pourquoi la protection du dit patrimoine. Plus loin certains ne se sentent pas concernés par cette entreprise de protection de ce patrimoine culturel. A ce titre Tagne Loic moto taximan Bandjoun centre Hiala nous déclare : « Je ne peux pas supporter la chaleur de la forge, fabriquer un tabouret, tisser un panier qui non seulement me prendra assez de temps mais dont je ne suis pas sûr de trouver les clients à l'immédiat. Et pourtant avec la moto c'est tout le contraire »205(*). * 204 Fouellefak, Kana C., « Cheick Anta Diop le panafricaniste : un repère pour l'Afrique et sa jeunesse ? » in Ethiopiques n0 87, Littérature, Philosophie et art, 2ème trimestre, 2011, p. 161. * 205 Entretien Tagne Loic, le 14-04-2019 sur le tronçon Bandjoun centre Hiala. |
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