Patrimoine culturel Bandjoun. Destruction et stratégies de protection (1904-2005).par Jacques Simo Djilo Université de Dschang Cameroun - Master 2 2018 |
3.1.2 Les guerres d'occupation territoriales en pays Bamiléké : le cas des Bali-ChambaA Bandjoun, tout comme dans les autres entités traditionnelles Bamiléké, l'établissement et la consolidation se sont faites au gré des guerres. C'est du moins le constat fait par Dikoumé Albert et Ngoufo Sogang. « L'occupation de l'espace fut d'ailleurs consécutive à une série de guerre internes. C'est à la suite de ces conflits qu'on est arrivé à la stabilisation des chefferies à leur état actuel »157(*). Il donc est évident que la constitution des chefferies traditionnelles en pays Bamiléké en général et dans la sphère Ngomala'a (sphère culturelle à laquelle appartient la chefferie Bandjoun ) en particulier, a été une serie de conquêtes et de reconquêtes. Alors, ces guerres de conquêtes et de reconquêtes de l'espace ont été fatales pour le patrimoine culturel Bamiléké en général et Bandjoun spécifiquement. Nous pouvons évoquer dans ce cadre le cas spécifique de L'invasion des Panye ou Bali Chamba. Ce sont des guerriers pillards qui seraient venus du nord. Il s'agit selon Mohammadou « De la faction Bali-Chamba dont l'intervention au Grassland et dans les environs du milieu du XVIIIème siècle est précédée par l'implantation peule dans le plateau de l'Adamaoua. Avec la création de Banyo et Tibati »158(*). C'est dans la première moitié du XIXème siècle que ces guerriers font irruption dans la chefferie Bandjoun à l'époque dirigée par le roi Kaptué159(*). L'entrée des Bali-Chamba terrifia les défenseurs Bandjoun qui étaient surpris de l'existence des chevaux qui selon eux étaient des êtres surnaturels. Pris par l'assaut de l'ennemi, le roi Kaptué, dépositaire du patrimoine culturel, s'enfuit à Bansoa où il trouva refuge avec ses compagnons. Malheureusement, le roi Bansoa conçut un plan diabolique contre Kaptué et ses Compagnons. Ce plan consistait à les capturer et les vendre comme esclaves. Heureusement, avertis par un notable Bansoa nommé Decha, Kaptué et ses notables durent se réfugier à Batié160(*). L'invasion des Bali-Chamba a été catastrophique pour la chefferie Bandjoun. Wabo Tekam nous révèle qu'une bonne partie du trésor royal sacré aurait été déporté par le roi Kaptué lors de sa fuite et une autre partie aurait été donnée aux chefs voisins qui avaient aidé Bandjoun dans sa libération161(*). Cette action de pillage du patrimoine culturel Bandjoun est irréfutable si nous nous en tenons aux caractéristiques des invasions des Bali-Chamba : « Elles se caractérisaient par l'effet de surprise, la violence et dans certains endroits par la méthode terroriste avant la lettre »162(*). Il convient de préciser que Bandjoun a aussi livré plusieurs guerres d'occupation et d'expansion territoriale avec les Bamoun, les Bameka, Bamougou, Bahouang... sous l'impulsion du grand conquérant Kamga I. En effet, ces batailles se situaient dans le processus de vassalisation. D'une manière significative, ces batailles ont été drastiques pour le patrimoine matériel de la chefferie Bandjoun. On peut citer par exemple la destruction de cases traditionnelles, la déportation des objets royaux... * 157Dikoume, A.et Ngoufo Sogang, T., « Peuplement des hautes terres de l'Ouest » ..., p.50. * 158Mohammadou, E., « Envahisseurs du nord et Grassfields camerounais au XVIIIème siècle : Le cas du Bamoun » in Sudan Sahel Studies V, Tokyo, JLCAA, 1986, p.237. * 159 Notue , J.P., « Le royaume Bandjoun (Leng Djo ou Gung Djo ) : Histoire, contexte de la création artistique, arts et traditions dynamiques » ..., p.47. * 160Perrois, L et Notue J-P., Légendes : les origines de la chefferie Bandjoun au Cameroun, Yaoundé, institut des sciences humaines, 1984, p. 37-38. * 161 Entretien avec Wabo Tekam le 28- 04- 2019 à Soung Bandjoun. * 162Notue J.P., « Le royaume Bandjoun (Leng Djo ou Gung Djo ) : Histoire, contexte de la création artistique, arts et traditions dynamiques » ..., p.48. |
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