Patrimoine culturel Bandjoun. Destruction et stratégies de protection (1904-2005).par Jacques Simo Djilo Université de Dschang Cameroun - Master 2 2018 |
2.2.3 Le kè (Magie)A Bandjoun il existe plusieurs légendes qui ont trait à la divination, la malédiction (ndo') et à la maitrise et la manipulation du monde métaphysique. Cette manipulation est ce que nous appelons kè. A ce sujet, Pierre Harter écrit : « Le fo et son conseil (nkamvu'u) possèdent des pouvoirs surnaturels. Ils ont la faculté de se transformer en animaux féroces ou en phénomènes naturels (tonnerres, éclair, tempêtes, arc-en-ciel »144(*). C'est donc ce pouvoir difficile à cerner qui constitue le kè véritable élément constitutif du patrimoine culturel immatériel et matériel. Maillard Bernard ajoute : « le kè représente la puissance surnaturelle de vie et de fécondité, le pouvoir de posséder un double et de se transformer en cas de nécessité en animal, en force de la nature ; le pouvoir qui fonde la force mystique du fo, des neuf notables, des membres de certaines sociétés sécrètes ; le pouvoir de faire tomber ou d'arrêter la pluie, de lancer la foudre, de diviser un cours d'eau en deux. On peut comparer le kè à ce pouvoir des prêtres chez les anciens égyptiens »145(*). Même si les auteurs semblent insister sur le caractère positif et protecteur du kè, il convient de préciser que certaines couches de la population Bandjoun n'appréhendent plus cette puissance dans la même logique. Le kè n'était à la disposition de tout le monde. Ceux qui en possédaient portaient le titre de ghèkè. Ils se laissaient définir à travers plusieurs objets sacrés tels que les pipes, les sacs, les bracelets, les trônes. Etc. Source : Notué, J-P., « Le royaume de Bandjoun( Leng Djo ou Gung a Djo) : Histoire, contexte de la création artistique, art et tradition dynamique »..., P. 62. Ce masque est un objet du patrimoine d'une sous-chefferie Bandjoun notamment la chefferie Mewè. Il a été emporté à la chefferie après une guerre de coquète conduite par le monarque Fotso I entre 1825-1875.146(*) Le kèà Bandjoun était étroitement lié au Totem (Pi). L'individu et l'animal formaient ainsi un seul corps. Jean Paul Notué écrit à ce sujet : « le pi est le double animal d'une personne humaine. Celui-ci vit en brousse ou dans l'eau mais participe aussi à la vie de l'homme dont il est le pi. Si l'un tombe l'autre chute avec lui »147(*). Le pi est choisi parmi les grandes espèces animales au rang desquelles les panthères, les crocodiles, serpents... * 144 Harter, P., Arts anciens du Cameroun, Armouville, Editions Arts d'Afrique noire, 1986, p.9. * 145 Maillard, B., Pouvoir et religion. Les structures socioreligieuses de la chefferie de Bandjoun, Berne, Peterland, 1984, p. 154. * 146 Entretien avec Albertin Koupgang lors de la visité guidée du Musée du 25- 04- 2019 à la chefferie Bandjoun. * 147 Notué, J-P., « Le royaume de Bandjoun (Leng Djo ou Gung a Djo) : Histoire, contexte de la création artistique, art et tradition dynamique »...,P. 63. |
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