B- La reconsidération de la fonction citoyenne
Dans sa conception classique, la citoyenneté est
l'attribut par lequel l'individu manifeste son appartenance à la
communauté des nationaux, traduite autrement par la qualité
d'électeur qui lui est reconnue330. Cette conception
étroitement politique n'a cessé dès lors d'évoluer
avec la prise en compte d'autres considérations qui ont permis à
ce jour de le remodeler. Relativement à sa conception moderne, BENOIT
SADRY indique que la citoyenneté se comprend désormais dans une
pluri dimensionnalité. En sus de celle politique, la citoyenneté,
supposant au passage l'existence d'un lien juridique entre l'individu et
État331, prend dorénavant en compte les dimensions
socio-économique et administrative332. Cependant, cette
restructuration ne doit pas voiler la complexité et l'instabilité
de ce concept qui, suivant les analyses d'ATAGANA ÉTIENNE JOËL
LOUIS reste encore de plus flexible et précaire au
Cameroun333. En effet le statut de citoyen est souvent reconnu et
octroyé suivant des critères définis par chaque
État. Ces critères sont souvent déterminés suivant
les termes du Réseau du Savoir Électoral en fonction du lieu de
naissance, de l'âge, de la parentalité, des liens juridiques avec
certains citoyens, de la
328 Il faut entendre par « cadre institutionnel de la
compétition politique », « l'ensemble des
mécanismes et des règles formelles ou informelles qui peuvent
avoir une incidence sur le déroulement et/ou les résultats des
scrutins », ISSAKA (Souaré), Thèse, op.cit., p.154
329 Le cadre politique de la compétition
électorale est saisi par ISSAKA SOUARE aussi bien au niveau interne (par
un aménagement des conditions politiques de la compétition
électorale, relativement à l'état de la presse et de la
situation générale des droits humains), qu'au niveau externe (il
s'agit de la capacité des Etats africains à organiser des
élections à la mesure des critères définis à
l'internationale, vu la grande dépendance de la plupart de ces pays
vis-à-vis des bailleurs de fonds internationaux). ISSAKA SOUARE,
Thèse, op.cit., p.187.
330 SADRY (Benoit), Bilan et perspectives de la
démocratie, Thèse, op.cit., p.171. On trouve
également un élément de définition de la notion de
citoyenneté chez ATANGANA (Etienne Joël Louis), Thèse,
op.cit., p.329. Il écrit en effet que « la citoyenneté
se conçoit comme le lien juridique qui unit l'individu à la
cité ». « Ce lien, poursuit-il, est
matérialisé par l'existence des lois démocratiques et qui
reconnaît à ce dernier des droits et devoirs ».
331 Réseau du Savoir Electoral, op.cit., p57.
332 Selon BENOIT SADRY, elles se traduisent respectivement par
une reconnaissance de droits sociaux : droit à la grève,
liberté syndicale, etc. ; et de telle sorte que le citoyen ne soit plus
assujetti à l'administration puisqu'il est appelé à
participer à son fonctionnement. SADRY (Benoit), Thèse, op.cit.,
pp.201-209.
333 ATAGANA (Étienne Joël Louis), Thèse,
op.cit., p.329.
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Le consensus en droit électoral camerounais
relation entre le pays étranger et le nouveau
pays334, etc. Qu'à cela ne tienne, la reconnaissance de cette
qualité constitue le fondement de la participation de l'individu aux
affaires publiques.
Précisément à l'analyse de ce dernier
point, BENOIT SADRY note dans ses travaux de Thèse une certaine crise de
l'implication citoyenne dans la vie publique335. Aussi propose-t-il
pour sa réhabilitation de repenser la fonction citoyenne, laquelle
devrait désormais être fondée sur une participation
évidente336.
La participation citoyenne337 qui est donc
évoquée dans ces propos «vise (...) à susciter
une adhésion plus forte des citoyens aux systèmes politiques par
l'organisation des procédures (débats, enquêtes, instances
consultatives etc...) permettant de les faire participer à
l'élaboration même des décisions politiques
»338 . On pourra au surplus dire avec PHILIP BRAUD que
cette participation doit permettre aux gouvernés d'exercer une influence
sur le fonctionnement du système politique339 et
spécifiquement sur le processus de mise en oeuvre des règles
électorales. Mais les habitudes politiques étant difficiles
à délier 340 , il va falloir procéder de
façon progressive. Cette progressivité, nous semble-t-il, passe
nécessairement par une ouverture du système de
sécrétion du droit électoral.
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