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Le consensus en droit électoral camerounais


par Rodrigue Stéphane Agathon Ondoa
Université de Douala - Master 2 2017
  

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PARAGRAPHE 2 : DES MÉCANISMES JURIDICTIONNELS LIMITÉS

Dans son Contrat social, JEAN-JACQUES ROUSSEAU292 affirmait que « l'obéissance à la loi qu'on s'est prescrite est liberté ». À l'inverse, la pensée de ROUSSEAU est révélatrice d'une réalité qu'on ne peut plus feindre d'ignorer : qu'il est difficile pour les citoyens de se soumettre à une loi lorsqu'ils ne s'y reconnaissent pas, a fortiori lorsque celle-ci ne sert qu'à promouvoir les intérêts égoïstes d'un individu ou d'un groupe d'individus. Dans cette position, si cette idée permet de recentrer le débat sur le rôle du juge électoral, garant du respect des lois par les acteurs, c'est qu'il est de plus en plus confronté aux cas de contestations desdites lois, bien plus encore, de leur légitimité. La question qui se pose alors est celle de savoir que peut le juge? Peut-il connaitre une action en contestation de la loi électorale pour défaut de consensus ou tout au moins pour inconstitutionnalité ?

Ces interrogations semblent a priori dénuées d'intérêt lorsqu'on prend acte du champ

292 Cité par VERGEZ (André), HUISMAN (Denis), Histoire des philosophes illustrée par les textes, Fernand Nathan, paris-VIe, 1966, p.211.

Le consensus en droit électoral camerounais

matériel du contentieux électoral qui, à tout égard, est bien circonscrit. Cependant l'instrumentalisation des processus électoraux en Afrique noire devrait interpeller la doctrine sur l'apport réel du « juge des élections » à la protection des valeurs proclamées par le texte constitutionnel nécessaires à l'édification de la démocratie. L'étude du processus électoral camerounais depuis 1990 montre en effet que l'évolution de celui-ci des luttes politiques, le juge ayant très peu participé. La fonction du juge dans la matière électorale est non seulement limitée (B), mais aussi soumis à l'application d'un droit se déversant par le haut (A).

A- Le juge tenu par le droit

Dans une réflexion forte édifiante opérée sur la justice en rapport avec la démocratie, PAPA OUMAR SAKHO indiquait que « la démocratie et la justice sont en Afrique des concepts qui coexistent dans une logique empreinte d'ambiguïtés »293. En fait, si la contribution du « juge de l'élection » à l'édification du droit électoral est réelle294, celle-ci n'est faite cependant qu'à titre exceptionnel, puisqu'il n'est pas, par essence, un législateur. Du coup la fonction qu'on lui reconnait en droit camerounais est essentiellement portée sur l'interprétation et l'application des règles produites outre instances qui s'imposent à lui295.

Le cas du juge camerounais qui nous intéresse particulièrement révèle l'image d'un individu qui est tenu de ne qu'agir dans le sens définit par la loi quelle que soit sa formulation. On est donc en droit de se poser la question de savoir comment peut-il valablement consolider l'idée de consensus dans la production de la norme électorale lorsque lui-même en est exclu du processus ? Tout se passe en effet comme si le juge était embrigadé dans un mécanisme juridico-politique lui tombant sur la tête et auquel il doit se soumettre pour connaitre les litiges soulevés à l'occasion des compétitions électorales. Pour ainsi dire avec le Professeur ALAIN DIDIER OLINGA, même si de nombreuses dispositions électorales ont été éclaircies grâce aux interprétations du juge, il reste que la norme électorale que le juge de l'élection applique lui est donnée par le législateur. Et lorsqu'on connait toute la contestation dont ces lois font l'objet, on ne peut rester indifférent face à l'impuissance du juge qui, malgré tout, est tenu de les appliquer

293 PAPA OUMAR SAKHO, « Quelle justice pour la démocratie en Afrique ? », Seuil, Pouvoirs, n°129, 2009, p.64.

294 Voir OLINGA (Alain Didier), « Politique et droit électoral au Cameroun (...) », op.cit., pp.35-36.

295 OLINGA (Alain Didier), « Justice constitutionnelle et contentieux électoral : quelle contribution à la sérénité de la démocratie élective et à l'enracinement de l'Etat de droit ? », op.cit., p.2.

Le consensus en droit électoral camerounais

au risque de déni de justice.

Le juge de l'élection est-il alors dans l'impasse, peut-on s'interroger sur sa fonction ? À cette question, le Professeur ALAIN DIDIER OLINGA rappelle que dans l'analyse du travail du juge et précisément constitutionnel en matière électorale, il faut pouvoir distinguer ce qui est à imputer au producteur de la norme à appliquer (et qui ne dépend nullement du juge) et ce qui est attribué au choix interprétatif, au choix de posture institutionnel, bref à ce que l'on appelle la politique jurisprudentielle du juge296. C'est dire autrement que la fonction du juge est hautement circonscrite à des matières définies préalablement.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery