SECTION 1: LA DÉTERMINATION DES
CARACTÉRISTIQUES JURIDIQUES
Partant du texte constitutionnel de 1996, il est possible
à travers un « faisceau d'indices » de recentrer les
éléments juridiques plaidant en faveur de l'assise textuelle du
consensus. Ces éléments qui s'inscrivent dans la
continuité des mouvements juridiques relevés aussi bien à
l'international qu'au niveau interne permettent de réaliser sans ombre
de doute l'ancrage du consensus dans le système de valeurs retenu par
l'État. Naturellement les sociétés démocratiques
sont assises sur un système de valeurs, lequel s'inspire des dynamiques
divers. Quoi qu'il en soit, ces valeurs, parce que intégrées dans
l'ordonnancement juridique seront protégées en conséquence
par l'État. Le consensus, terrain expérimental de notre
étude fait l'objet d'une réitération constitutionnelle
indubitable (Paragraphe 1), laquelle le place définitivement au rang des
fondements du droit électoral (Paragraphe 2).
PARAGRAPHE 1: LA CONSTITUTIONNALISATION DU
CONSENSUS
Le processus d'incorporation des normes internationales dans
le système juridique interne se réalise au moyen de la
constitutionnalisation96. Cette dernière selon KEVIN
FERDINAND NDJIMBA a vocation à transformer les normes internationales en
normes constitutionnelles dans le but de leur donner une force juridique
supérieure97. Il relève ainsi à la suite de la
doctrine traditionnelle, la grande dépendance du droit international
à la constitution. Ce mariage apparent
96 NDJIMBA (Kevin Ferdinand), «
L'internationalisation des constitutions et la revalorisation du droit
constitutionnel (...), op.cit., p.13.
Le consensus en droit électoral camerounais
vise en réalité à assurer
l'efficacité de ce dernier dans l'ordre interne par le biais de la
constitution qui elle a une connotation véritablement obligatoire. Dans
cet d'ordre d'idée, on comprend mieux pourquoi DIDIER MAUS estimait que
la constitutionnalisation correspondait à un phénomène
spécifique traduisant la volonté de l'État de renforcer
l'intégration du droit international dans son ordre interne en lui
reconnaissant une valeur constitutionnelle98. Loin d'être
une simple « symbolique », la constitutionnalisation 99 du
consensus est la conséquence directe de la ratification de la CADEG (A).
La réalisation de l'intégration du consensus dans l'ordre interne
entraine alors l'obligation juridique de conformité (B) afin d'assurer
l'harmonie dans la pyramide.
A- Une conséquence de la ratification de la
CADEG
Bien qu'en agonie100, la démocratie demeure
à ce jour le système politique de référence des
sociétés modernes. Or comme il a été
déterminé aux termes de la Déclaration de Bamako, la
démocratie est fondée sur un certain nombre de principes
axés entre autres sur « le consensus ». C'est la raison pour
laquelle le constituant camerounais de 1996 en marquant sa volonté
à être lié par les principes démocratiques, a
entendu les pérenniser dans son système de fabrication des lois
en y faisant référence à chaque fois. Par ratification, la
Convention de VIENNE sur le Droit des traités précise en son
article 2 de la lettre « b » qu'elle « s'entend de l'acte
international ainsi dénommé par lequel un État
établi sur le plan international de son consentement à être
lié par un traité ».
Loin de faire une énumération exhaustive, le
Cameroun a ratifié un certain nombre d'instruments internationaux afin
d'inscrire son droit électoral à la normalité
internationale. Il s'agit entre autres de la CADEG, texte qui a la
particularité de valoriser le dialogue social et la participation des
citoyens dans la gestion des affaires publiques. Une telle approche est
d'autant plus nécessaire pour les États dont les bases demeurent
encore fragiles. En 2011, le Cameroun a donc ratifié ce texte. Cette
ratification a donc comme conséquence l'intégration des valeurs
de
97 Ibidem.
98 Cité par MAZIAU (Nicolas), « Les
constitutions internationalisées : Aspects théoriques et essai de
typologie », p.5.
99 Par constitutionnalisation, il faut entendre
« le changement de valeur normative d'une norme préexistante,
qui devient constitutionnelle », BARBE (Vanessa) et MILLET
(François-Xavier), Contribution à l'étude de
l'effectivité de la constitutionnalisation en droit de
l'environnement, Rev., trim., h., (78/2009), p.469.
100 SABI (Kassere Afo), op.cit., p.24.
Le consensus en droit électoral camerounais
l'international dans l'ordre juridique interne.
Depuis quelques années, on assiste en effet à
une pénétration constante, mais savante des valeurs de
l'internationale dans l'ordre juridique interne des États101.
Ces valeurs qui sont sécrétées par les organismes
internationaux s'accompagnent d'une idéologie constructive permettant de
garantir la stabilité des sociétés. Pour cette raison, le
constituant camerounais de 1996 en marquant son adhérence aux
systèmes de valeurs universelles a tenu à leur conférer
une place de choix. Les dispositions la loi constitutionnelle du 18 janvier
1996 sont édifiantes à ce sujet. Elle dispose clairement que
« les traités ou accords internationaux
régulièrement approuvés ou ratifiés ont, dès
leur publication, une autorité supérieure à celle des
lois, sous réserve pour chaque accord ou traité, de son
application par l'autre partie »102. Par cette
disposition, il s'opère comme une « transfiguration juridique
»103 des valeurs de l'international dans l'ordre
constitutionnel sans aucune forme de procédure particulière. Par
conséquent, il ne souffre d'aucune contestation que toutes les valeurs
à incidences électorales contenues dans le texte de la CADEG sont
marquées du sceau de la constitution. Qu'à cela ne tienne, leur
érection au niveau constitutionnel emporte, comme le souligne ATANGANA
ÉTIENNE JOËL LOUIS, la conséquence que le législateur
tout comme l'administration sont tenus dans les actes qu'ils prennent sous
peine d'inconstitutionnalité104.
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