Conclusion
La richesse en ressources pétrolières et
gazières se transforme souvent en une malédiction. Le
pétrole et le gaz qui doivent être des vecteurs de
développement économique finissent par augmenter le taux de
pauvreté.
Le phénomène du paradoxe de l'abondance touche
une grande partie des pays africains producteurs de pétrole. Ces pays
riches en ressources naturelles ont un niveau de pauvreté qui se creuse
progressivement. Le paradoxe de l'abondance est dû à une gestion
opaque des ressources naturelles.
En effet, le paradoxe de l'abondance est une
conséquence du syndrome hollandais. Ce dernier s'explique par une forte
dépendance à la rente pétrolière au
détriment d'autres secteurs économiques prioritaires. Une chute
des cours mondiaux a donc un effet préjudiciable sur une économie
nationale.
Par ailleurs, le syndrome hollandais trouve son explication
dans un cadre purement juridique et réglementaire. De ce fait, la
théorie de Paul Collier qui développe une hypothèse selon
laquelle l'absence d'un cadre juridique et réglementaire mènerait
à un pillage des ressources s'est avérée véridique
dans l'étude scientifique effectuée.
Les cas du Nigéria et du Tchad ont
démontré qu'une absence de réglementation ou une mauvaise
application de cette dernière conduit au pillage des ressources
naturelles. Ces pays ont subi les effets du syndrome hollandais dû non
seulement à une dépendance importante à la rente
pétrolière, mais aussi à des cadres juridiques et
légaux insuffisants dans leur application. En d'autres termes, la
problématique liée à la gestion éthique et
transparente des ressources naturelles trouve sa réponse dans la mise en
oeuvre d'un arsenal législatif solide. Néanmoins, un cadre
juridique solide ne garantit pas une gestion prospère des ressources
naturelles, car son application est aussi capitale.
En se basant sur la théorie de Paul Collier, il a
été constaté que l'aspect juridique dans la gestion du
pétrole et du gaz est primordial et ne saurait être
négligé, car il y a un lien de causalité direct entre
l'exploitation des ressources naturelles et un seuil de pauvreté qui
augmente. Les exemples du Tchad et du Nigéria doivent servir d'exemple
pour le Sénégal.
La République du Sénégal dispose
récemment d'un bassin sédimentaire exploré par de
nombreuses compagnies pétrolières qui confirment son potentiel en
hydrocarbures. Par ailleurs, le sous-sol du Sénégal dispose
d'importants puits de pétrole et de gaz commercialisables à
partir de 2021. Par conséquent, le pays doit d'ores et
déjà répondre au défi du paradoxe de
l'abondance.
Étant donné que le Sénégal est
considéré comme un futur pays producteur de pétrole, il a
été pertinent d'analyser sous un angle juridique et par le biais
de sa législation pétrolière et tout en se fondant la
théorie de Paul Collier, les défis que pose le paradoxe de
l'abondance.
En ce sens, l'étude du régime juridique
pétrolier du Sénégal permet de relever que l'industrie
pétrolière présente des insuffisances juridiques qui
doivent être corrigées par la nouvelle législation
pétrolière. Premièrement, le contexte d'incitations
fiscales attrayantes dans le lequel le code pétrolier de 1998 ne
répond plus au nouvel environnement pétrolier.
Ensuite, en matière de transparence et gestion
responsable des ressources pétrolières, l'État du
Sénégal doit réguler son industrie
pétrolière. Tout d'abord, il doit doter la Société
civile des prérogatives lui permettant de participer activement dans la
définition des orientations stratégiques relatives au secteur des
hydrocarbures comme cela est le cas au Ghana où la Société
civile joue un rôle influent dans le domaine pétrolier. De ce
fait, pour corriger cette lacune juridique, l' État doit se conformer
à la directive de la CEDEAO portant sur l'harmonisation des principes
directeurs et des politiques dans le secteur minier ; une telle directive
reconnaît l'importance de la Société civile dans la
promotion du développement local.
Toujours dans le cadre de la transparence, l'État du
Sénégal a intégré l'ITIE pour mieux assurer la
gestion transparente de ses revenus pétroliers. Cependant, rejoindre
l'ITIE ne garantit pas une réussite dans la gestion responsable du
pétrole et du gaz, car les normes ITIE que l'État s'engage
à respecter doivent être accompagnées d'un cadre juridique
solide, ce qui n'est pas le cas du Sénégal.
En effet, la législation pétrolière de
1998 instaure un régime juridique qui promeut difficilement la
transparence notamment dans l'octroi des blocs, mais encore dans la part
réelle de l'État dans le régime juridique des contrats de
partage de production qui régit les relations contractuelles entre le
Sénégal et les compagnies pétrolières
internationales.
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Enfin au niveau fiscal le code pétrolier a montré
ses limites portant l'interprétation des
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dispositions fiscales relatives à l'exonération
portant sur les opérations pétrolières (article 48 du code
pétrolier 1998).
En somme, au regard de la théorie de Paul Collier, le
droit pétrolier en vigueur tel qu'il est conçu contient des
insuffisances qui ne lui permettent pas d'assurer une gestion éthique et
transparente du pétrole et du gaz. Une chute des cours mondiaux
exposerait le Sénégal au phénomène du paradoxe de
l'abondance.
Ainsi, une nouvelle réforme de la législation
pétrolière est exigée afin que cette dernière
puisse pleinement jouer son rôle dans le nouvel environnement
pétrolier. En ce sens, le nouveau code pétrolier devra
accroître les revenus de l'État, mais aussi créer un fonds
pour les générations futures (que le code pétrolier en
vigueur ne prévoit pas), garanti par une rigoureuse
réglementation juridique afin que le FONSIS puisse mener les missions
qui lui sont confiées par la loi en toute indépendance.
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