Conclusion partielle
L'analyse de la première partie a illustré le
phénomène du paradoxe de l'abondance dans les pays africains
producteurs de pétrole. Elle a mis en exergue les effets du syndrome
hollandais dans les pays dont l'économie est entièrement
dépendante de la rente pétrolière, au profit d'un
délaissement des secteurs économiques prioritaires. D'un point de
vue strictement juridique, l'analyse effectuée a mis en lumière
l'importance de la mise en oeuvre et de l'application des législations
pétrolières dans la gestion éthique des ressources
naturelles. En effet, les études de cas portant sur le Nigéria et
le Tchad et relatifs à la gestion des revenus pétroliers, ont
prouvé qu'une mauvaise application des législations
pétrolières a mené de facto à une mauvaise gestion
des revenus pétroliers et cela a pour conséquence, le syndrome
hollandais.
Par conséquent, la théorie de Paul
Collier selon laquelle un cadre juridique insuffisant dans la gestion des
ressources naturelles mène à un pillage celles-ci
s'applique pour le Nigeria et le Tchad qui n'ont pu conjurer la
malédiction des ressources naturelles du fait d'une mauvaise application
de leurs législations pétrolières respectives. En un mot,
un pillage des ressources naturelles est un frein au développement, car
ne profitant point aux populations locales : les recettes de l'Etat augmentent,
mais le taux pauvreté s'accroit en parallèle.
Ensuite, dans le cadre d'une gestion des ressources
naturelles, les acteurs étatiques et institutionnels jouent un
rôle prépondérant dans la régulation des
activités pétrolières. Cependant, le rôle
considérable de la Société civile ne saurait être
occulté. Le cas du Sénégal, qui dans son COS-PETROGAZ, ne
dispose d'aucun membre de la Société civile dans la composition
dudit comité, remet en cause l'importance de la Société
civile. Le cas du Ghana a montré qu'une Société civile
impliquée dans les orientations stratégiques relatives à
la gestion des revenus pétroliers assure une gestion éthique de
ces derniers.
En résumé, une réglementation juste et
appliquée légalement est nécessaire pour une gestion
éthique et transparente du pétrole et du gaz. De plus,
réguler l'industrie pétrolière du Sénégal,
implique un renforcement juridique des prérogatives de la
Société civile notamment dans la gestion des revenus
pétroliers.
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Partie 2 : Un renforcement du cadre légal
relatif à l'industrie pétrolière garantissant une gestion
transparente du pétrole et du gaz
La Société civile est un acteur de
régulation de l'industrie pétrolière. Cependant, la
régulation pétrolière s'étend à l'amont
pétrolier. En d'autres termes, réguler l'industrie
pétrolière sénégalaise implique d'analyser la
législation pétrolière du Sénégal, qui est
la pierre angulaire de l'amont pétrolier. En effet, une analyse de la
législation pétrolière permettra de relever les
éventuelles lacunes que la nouvelle législation (qui fera l'objet
d'un projet de loi dans les prochaines semaines) devra combler.
Étudier et analyser l'amont pétrolier
sénégalais serait pertinent. En effet, une bonne gestion du
pétrole et du gaz nécessite que l'amont pétrolier, qui est
le fondement de toute activité pétrolière fonctionne dans
un cadre légal juste et bien défini. Plus
précisément, si le cadre juridique encadrant l'amont
pétrolier est insuffisant, alors la gestion opaque des revenus issus de
l'amont serait inévitable.
L'amont pétrolier porte sur les activités
d'exploration et de production. Dans le cadre de ces activités, les
relations contractuelles relatives au choix des compagnies internationales
opérant sur le bassin sédimentaire sénégalais,
à l'octroi des blocs pétroliers et de la part réelle de
l'Etat dans la production sont encadrés par le droit pétrolier
sénégalais.
Cependant, l'analyse du cadre juridique pétrolier en
vigueur régissant l'amont pétrolier mettra en exergue des lacunes
qui prouveront que ce dernier ne répond pas aux enjeux du paradoxe de
l'abondance (chapitre premier). Par conséquent, une
réforme totale du droit pétrolier est obligatoire pour assurer
une meilleure transparence dans la gestion du pétrole et du gaz
(chapitre second)
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Chapitre premier : Un cadre juridique pétrolier
peu adapté aux enjeux du paradoxe de l'abondance
Grâce aux nouvelles découvertes de pétrole
et de gaz, l'environnement pétrolier Sénégal est en pleine
mutation. Le bassin sédimentaire sénégalais est devenu
plus attractif du fait de son potentiel en hydrocarbures confirmé. Par
conséquent, les compagnies internationales étrangères qui
souhaitent explorer et exploiter le sous-sol sénégalais sont
soumises au régime juridique régissant l'amont
pétrolier.
Un état des lieux juridiques de l'amont
pétrolier (section 1) met en lumière des lacunes
et des vides juridiques rendant le régime juridique en vigueur peu
adapté au nouvel environnement pétrolier sénégalais
(section 2).
Section 1 - Un état des lieux juridiques de
l'amont pétrolier
Les activités d'exploration et de production qui
constituent l'amont pétrolier sénégalais sont
menées sur l'étendue du bassin MSGBC. Sur un plan juridique, le
sous-sol est exclusivement la propriété de l'État
sénégalais159. L'Etat a la faculté de confier
l'exploration et l'exploitation de son sous-sol à des compagnies
internationales qui se voient imposées un cahier des charges
strictes160. Par conséquent, le Sénégal s'est
doté d'une architecture législative assez conséquente
(paragraphe premier) prévoyant un régime de
partage de production régissant les relations contractuelles entre
l'État et les compagnies pétrolières internationales
(paragraphe second).
159 SONKO, Ousmane. Pétrole et gaz au
Sénégal, Fauves Editions, 2017, p.59
160 Ibidem
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