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La régulation de l'industrie pétrolière du Sénégal face au défi du paradoxe de l'abondance


par Pape Amadou FALL
Faculté de droit Paris Descartes - Master 2 Droit des Politiques Publiques du Développement 2018
  

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Paragraphe premier - Le régime juridique de l'amont pétrolier

Le régime juridique de l'amont pétrolier est encadré par un arsenal législatif assez important. En effet, l'amont pétrolier découle de sources juridiques différentes dont la plus importante est la loi pétrolière(A). De plus, le droit pétrolier sénégalais est caractérisé par un régime contractuel de partage de production pétrolière (B).

A- Un régime juridique encadré par la législation pétrolière

La République du Sénégal, étant membre de l'Organisation des Nations-Unies (ONU) dispose du droit d'exploiter librement ses richesses et ses ressources naturelles161. En effet, l'Assemblée Générale de l'ONU encourage les Pays en Développement « à mettre à profit et à exploiter comme il convient leurs richesses et leurs ressources naturelles »162. L'État sénégalais, pour développer ses ressources naturelles, s'est doté d'une architecture législative assez importante en la matière.

L'amont pétrolier sénégalais est régi par la Constitution du 22 janvier 2001 dans son article 25-1163, qui dispose que « les ressources naturelles appartiennent au peuple. Elles sont utilisées pour l'amélioration de ses conditions de vie. L'exploitation et la gestion des ressources naturelles doivent se faire dans la transparence et de façon à générer une croissance économique, à promouvoir le bien-être de la population en général et à être écologiquement durables ».

Ensuite, l'amont pétrolier tire sa source dans, la Loi pétrolière164, le règlement pétrolier165, la loi n°2012-32 du 31 décembre 2012 modifiant diverses dispositions législatives relatives aux

161 Résolution 626 (VII) du 21 décembre 1952 de l'Assemblée Générale des Nations-Unies

162 Ibidem

163 Loi constitutionnelle n°2016-10 du 5 avril 2016 portant révision de la Constitution

164 Loi n°98-05 du 8 janvier 1998 portant Code pétrolier

165 Décret n°98-810 du 6 octobre 1998, fixant les modalités et condition d'application de la loi n°98-05 du 8 janvier 1998 portant Code pétrolier

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régimes fiscaux166 et les contrats types167. Cependant, le code pétrolier est la source juridique la plus éminente, car il régit toutes les dispositions juridiques relatives à l'exploration et à la production pétrolière. De plus, il organise les relations entre l'État et les compagnies pétrolières internationales.

Comme mentionné dans l'introduction, le code pétrolier de 1998 fut élaboré dans un contexte où il cherchait à « offrir aux acteurs potentiels de l'industrie pétrolière des conditions attrayantes et susceptibles de favoriser le développement des investissements pétroliers d'exploration ou de production »168.

Le code pétrolier consacre l'entière souveraineté de l'État sénégalais sur ses ressources pétrolières et gazières présentes dans son sous-sol169. L'État détient la prérogative pour autoriser les compagnies pétrolières internationales à entreprendre des opérations pétrolières170. Cette prérogative étatique tire sa source de la Convention sur le Plateau Continental du 29 avril 1958 qui dispose que l'État riverain bénéficie de la faculté d'exercer des droits souverains sur le plateau continental à titre d'exploration et de l'exploitation de ses ressources naturelles171. En d'autres termes, aucune personne physique ou morale de nationalité sénégalaise ou étrangère ne peut ni entreprendre des activités d'exploration ou d'exploitation, ni revendiquer des droits sur le plateau continental sans le consentement de l'État sénégalais172.

Ensuite, le code pétrolier traite des dispositions liées à la fiscalité et aux conditions techniques, financières et administratives relatives à l'exploration, la production et le transport des hydrocarbures. Par conséquent, différents procédés de gestion sont prévus par la législation pétrolière. Celle-ci régit tout d'abord l'autorisation de prospection173 qui pour une durée de deux ans, confère à son titulaire le droit non exclusif « d'exécuter des travaux préliminaires de prospection d'hydrocarbures, notamment par l'utilisation de méthodes géophysiques,

166 Rapport de conciliation ITIE, 2014, p.41.

167 Contrat type de partage de production ou contrat type de concession

168 Exposé des motifs, loi 98-05 du 8 janvier 1998 portant Code pétrolier, p1-2.

169 Article 3 du code pétrolier de 1998

170 Article 5 du code pétrolier

171 Article 2.1 de la Convention sur le Plateau Continental du 29 avril 1958

172 Article 2.2 de la Convention sur le Plateau Continental du 29 avril 1958

173 Article 12 du code pétrolier de 1998

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géologiques et géochimiques, à l'exclusion des forages d'une profondeur supérieure à deux cents mètres »174.

De plus, le code pétrolier autorise l'État à conférer des permis de recherche175 dont la durée est de quatre ans renouvelables deux fois pour des périodes de trois ans. Ils confèrent à son titulaire « le droit d'exécuter tous les travaux y compris le forage, ayant pour objet la recherche et la mise en évidence de gisements d'hydrocarbures »176.

En outre, le code pétrolier régit l'autorisation d'exploitation provisoire177 qui accorde à son titulaire « la possibilité d'exploiter à titre provisoire, les puits productifs » pour une durée de deux ans178. De plus, l'État est habilité à délivrer des concessions d'exploitation de vingt-cinq ans extensibles de dix ans renouvelables une fois179. La concession d'exploitation accorde au titulaire du titre minier « le droit exclusif d'effectuer toutes les opérations pétrolières, suivant les stipulations de la convention qui lui est attachée »180.

Enfin, les compagnies pétrolières peuvent bénéficier de contrats de services à risques pour explorer et éventuellement exploiter le sous-sol sénégalais181. Pendant la recherche et l'exploitation, le titulaire du contrat de services a des droits et obligations identiques à ceux d'un titulaire de concessions d'exploitation d'hydrocarbures.

Le régime juridique régissant les relations contractuelles entre l'État et les compagnies pétrolières porte sur les contrats de services encadrés par le code pétrolier. L'État du Sénégal marque donc une préférence pour les contrats de services reposant sur le régime du Contrat de Partage de Production (CPP).

174 Ibidem

175 Article 14 du code pétrolier de 1998

176 Ibidem

177 Article 24 du code pétrolier de 1998

178 Ibidem

179 Article 25 du code pétrolier de 1998

180 Ibidem

181 Article 34 du code pétrolier de 1998

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B- Des relations contractuelles entre État et compagnies pétrolières reposant sur le régime de partage de production

Depuis son indépendance, la Sénégal a noué des accords avec beaucoup de compagnies pétrolières majors comme indépendantes, dans l'objectif de tester son potentiel en hydrocarbures. Les relations contractuelles nouées entre l'État et les sociétés pétrolières se sont accrues avec l'octroi de plusieurs blocs pétrogaziers fondés sur les réglementations en vigueur. Plus précisément, les contrats liant l'État et les compagnies pétrolières internationales reposent sur le régime juridique du partage de production. L'État du Sénégal privilégie les contrats de services en marquant une préférence pour les Contrats de Recherches et de Partage de Production (CRPP). Le CRPP est considéré comme un contrat à risques. Cela s'explique par le fait qu'il s'agit d'un contrat dont le contractant émane du choix de l'État. De ce fait, le contractant qui est une compagnie pétrolière effectue une prestation de services en explorant et en exploitant éventuellement du pétrole ou du gaz. En outre, le service que fournit la compagnie pétrolière est à risques, car ni l'État du Sénégal, ni la PETROSEN représentante de l'État au contrat, ne supportent financièrement le risque de l'exploration sur le bassin sédimentaire qui était encore peu exploré.

Le choix du régime de partage de production permet d'une part à l'État sénégalais d'avoir une meilleure distribution de la rente pétrolière et d'autre part, de bénéficier d'un régime contractuel plus favorable que le contrat de concession. Qui plus est, le régime de la concession d'exploitation prévoit un partage égal de la production pétrolière en cas de découverte. Par conséquent, un pays disposant d'une économie faible et d'un potentiel confirmé en hydrocarbures se retrouve dans un rapport de force inférieur à la compagnie pétrolière exploitant son pétrole182. De ce fait, la majorité des PED ont recours au CRPP.

Ainsi, il va sans dire que le choix du CRPP est un avantage pour le Sénégal, car il demeure propriétaire de son pétrole et de son gaz éventuellement découverts dans son sous-sol, tout en

182 ANGELIER, Jean-Pierre. L'évolution des relations contractuelles dans le domaine pétrolier. Liaison énergie francophonie, 2008, no 80, p. 23-26.

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ayant la faculté de ne pas investir dans l'exploration qui constitue une activité à risques183. Dans un CRPP, l'Etat confie à une ou plusieurs compagnies pétrolières ou personnes physiques morales qualifiées, l'exercice des droits exclusifs de recherche et d'exploitation d'hydrocarbures à l'intérieur d'un périmètre défini184. De ce fait, il incombe au contractant d'engager et de supporter financièrement les travaux d'exploration, de développement et de production.

Compte tenu de tous ces atouts, le CRPP régit le régime de l'exploration et de l'exploitation pétrolière au Sénégal. En phase de recherche, la PETROSEN, représentante de l'État dans le CRPP s'associe avec la compagnie pétrolière en vue d'effectuer la recherche. Cette association est par ailleurs obligatoire comme le prévoit la Convention du contrat type de partage de production185, dans le cadre d'un Accord d'Association186. Durant la phase de recherche, la compagnie pétrolière participe à hauteur de 90 pour cent. En effet, elle engage les dépenses d'exploration et d'évaluation. La PETROSEN quant à elle, participe à hauteur de 10 pour cent187. Cependant, cette participation de la PETROSEN pendant la période de recherche n'entraîne aucune dépense de sa part. Toutes les dépenses sont donc prises en charge par la compagnie pétrolière.

En outre, la compagnie pétrolière peut céder partiellement ou totalement ses parts de participation188. Cependant, cela n'exonère pas le nouveau titulaire de respecter les engagements de travaux, d'investissements consentis antérieurement par la compagnie cédante à l'État189.

En phase d'exploitation, c'est-à-dire dans l'hypothèse où il y a une découverte d'hydrocarbures, des travaux d'évaluation sont entrepris par le contractant en relation avec le ministère de l'Énergie pour déterminer le caractère commercialisable des quantités découvertes qui seront

183 Ibidem

184 Article 36 du code pétrolier de 1998

185 Article 1.5 du contrat type de partage de production consultable sur : http://itie.sn/wp-content/uploads/2018/04/CONTRAT-DE-RECHERCHE-ET-DE-PARTAGE-DE-PRODUCTION-Du2019HYDROCARBURES-RUFISQUE-OFFSHORE-PROFOND-TOTAL-PETROSEN.pdf

186 Article 1.1 du contrat type de partage de production

187 Article 24.1 du contrat type de partage de production

188 Article 33 du code pétrolier de 1998

189 Ibidem

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alors exploitées sous condition de la délivrance d'une autorisation d'exploitation par l'État190.

Le régime du partage et de production régit donc les relations contractuelles entre l'État, la PETROSEN et les compagnies pétrolières. Les relations contractuelles prévoient les participations et investissements de chaque parti au contrat. De plus, elles réglementent les gains de l'État dans le partage de production des hydrocarbures en cas de découvertes commercialisables.

Cependant, la loi pétrolière ne définit pas explicitement la répartition de la participation des entreprises pétrolières. Le code pétrolier de 1998 prévoit des dispositions relatives à la participation de l'État et des compagnies pétrolières sans explicitement préciser la répartition de la participation du contractant lors des opérations de recherche et d'exploitation191. Cela pose un problème de transparence dans la gestion des activités pétrolières entre l'État et les compagnies pétrolières, car la loi pétrolière ne régule pas la participation du contractant dans les opérations pétrolières. Elle renvoie plutôt aux conventions de contrat type pour plus de précisions.

Or, à la lecture des CRPP, les compagnies pétrolières participent aux travaux de recherche à hauteur de 90 pour cent et la PETROSEN a une part de participation de 10 pour cent192 qu'elle peut accroître de 20 pour cent en cas de découverte193. Il serait pertinent d'en déduire que le taux de participation en phase de recherche n'est pas légalement fixé et est donc amené à varier en fonction du CRPP, ce qui laisse une marge de manoeuvre et de négociations trop importante pour l'État. Le mécanisme de participation prévu par la loi pétrolière n'assure pas une transparence totale dans les gains réels de l'État lors de la phase de production.

De ce fait, les intérêts de l'État ne sont pas totalement protégés et la nouvelle législation pétrolière gagnerait à rajouter une disposition claire sur la clé de répartition de la participation du contractant.

190 Article 20 du code pétrolier de 1998

191 Articles 34 et 36 du code pétrolier

192 Article 24 du contrat type de partage de production

193 Article 24.2 du contrat type de partage de production

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En outre, le cadre juridique pétrolier en vigueur, bien qu'étant incitatif et attrayant pour des investissements dans le sous-sol sénégalais, n'est pas adapté au nouvel environnement pétrolier du Sénégal, notamment en ce qui concerne la détermination de la part réelle de l'État dans le partage de la production pétrolière et gazière.

Paragraphe second - Une régulation nécessaire quant à la détermination de la part réelle de l'Etat dans le partage de la production

Une fois l'autorisation d'exploitation délivrée par l'État, le CRPP liant l'État et les compagnies pétrolières détermine le partage de la production pétrolière. Ainsi, la production de pétrole et de gaz doit être partagée entre l'État et la compagnie pétrolière. Le mécanisme de détermination de la part réelle de l'État dans le régime du partage de la production est prévu par le contrat type de partage de production (A). Ce dernier, qui a un impact direct sur le profit attendu de l'État, n'est juridiquement pas outillé pour protéger les intérêts de l'État du Sénégal (B).

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984