Le règlement des contentieux des affaires en Afrique. Cas de l'arbitrage Ohada.( Télécharger le fichier original )par Lamba CHRISTIAN BOINLAOU Université Libre du Congo - Maitrise 2012 |
CHAPITRE II :L'EVALUATION DE L'APPLICABILITE DE L'ARBITRAGE EN DROIT OHADALa mise en oeuvre effective d'un instrument juridique comme celui objet de notre étude, c'est-à-dire des mécanismes de son opérationnalisation, ne saurait, être appréhendée et comprise en terme d'efficacité que s'il est réellement évalué. L'évaluation de l'applicabilité de l'arbitrage en droit OHADA, se mesurerait sinon s'apprécierait ainsi donc au prorata de son efficacité en pratique. Autrement, il est ici question de chercher à savoir si l'instrument OHADA en général et son mécanisme de Règlement des litiges en particulier, sont susceptibles d'être qualifiés d'efficaces. C'est en effet, ce à quoi sera consacré le présent chapitre dont, la démarche méthodique voudrait, nous semble t-il, que nous examinions son évaluation au plan institutionnel (Section 1) et ensuite, au plan opérationnel (Section 2). SECTION I : L'EVALUATION SUR LE PLAN INSTITUTIONNELL'évaluation sur le plan institutionnel dont il est question dans cette section sera axée sur deux paragraphes. Le premier portera sur l'évaluation au plan national (Paragraphe 1) et le second sur l'évaluation au plan régional (Paragraphe 2). Paragraphe 1 : Au plan nationalLa mise en oeuvre de l'arbitrage au niveau national des Etats parties au Traité et autres instruments juridiques consacrant l'organisation communautaire suppose, en aval, son évaluation au plan étatique. Aux termes de l'article 13 du Traité « le contentieux relatif à l'application des Actes uniformes est réglé en première instance et en appel par les juridiction des Etats parties ». En effet, la lecture minutieuse de l'article 13 du Traité, nous enseigne que le législateur OHADA a pris de l'avance pour ne pas dire qu'il a été prévoyant dans la répartition des compétences entre la CCJA et le juge étatique. Par cette démarche somme toute courageuse, les rédacteurs de Traité OHADA ont voulu, par la même occasion, partager ou repartir les compétences juridictionnelles entre, d'une part ce juge et, d'autre part, la CCJA. Aussi, en permettant au juge national de jouer un rôle dans le règlement des litiges portés devant lui, par des parties au différend contractuel, le Traité OHADA a consacré l'intervention du juge étatique et ce, limitativement, dans une catégorie de contentieux à savoir, notamment, les litiges en première instance et en appel. Précisons qu'à ce sujet, la procédure de cassation n'est pas du ressort du juge national, car la disposition de l'article 14 du Traité préconise la compétence exclusive de la CCJA. En conséquence et en application de l'article 13, on constate que la juridiction nationale passe ainsi de son statut de juge étatique à celui de juge de droit commun dans le cadre de l'OHADA. En revanche, la CCJA apparaît alors, du coup, comme seule institution compétente pour se prononcer en matière de cassation (79(*)). En ce sens, une série de décisions avaient été rendue, par un certain nombre de juridictions nationales de l'espace OHADA, en rapport avec le procès en première instance et celui en appel. A cet effet, citons par exemple, la jurisprudence camerounaise du 15 mai 2000 (80(*)). De la même manière, les Cours d'Appel gabonaise (81(*)) et nigérienne (82(*)) ont fait une stricte application des textes en matière de règlement de contentieux contractuels au plan national. Ce faisant, ces Cours d'appel ont, entre autres, rendu des décisions en première instance et en appel mettant aux prises des particuliers aux sociétés et/ou aux entreprises. Une observation minutieuse du fonctionnement des mécanismes juridictionnels institutionnels institués dans certains pays africains, et ayant pour principale mission le règlement des différends ou litiges contractuels, nous offre une lecture peu enthousiaste de l'effective application du droit d'arbitrage dans l'espace OHADA. A titre d'exemple, il convient de dire que les Centres nationaux d'arbitrage ont été créés, pour certains, avant l'avènement du Traité OHADA, c'est-à-dire avant la création de l'Organisation. C'est, par exemple, le cas du Centre d'arbitrage, de médiation et conciliation de la chambre de commerce, d'industrie et de l'agriculture de Dakar qui officie, depuis des décennies auprès de la Chambre de Commerce et d'Industrie du Sénégal. Il en est de même de la Cour d'arbitrage du Togo (CATO) et de la Cour d'arbitrage de la Côte d'Ivoire (CACI) qui se prononcent sur des litiges contractuels. En revanche, il en est qui ont été institués longtemps après la création de l'OHADA. Nous pouvons faire mention de la récente et très jeune institution du Congo Brazzaville qu'est le CEMACO. En effet, crée en 2012, le Centre congolais comme la plupart des autres centres africains d'arbitrage, a pour compétence de régler les différends entre les particuliers relatifs à un contrat. Mais la grande difficulté, c'est que cette institution d'arbitrage n'est pas connue voire ignorée, du moins pour le moment, du grand public congolais en général et des milieux d'affaires en particulier. Enfin, rappelons qu'à l'exception de la CCJA, qui peut connaître des litiges d'arbitrage dans l'espace OHADA, les centres d'arbitrage institués par les Etats n'ont qu'une compétence nationale. Cette qualité ne peut en l'occurrence, empêcher leur saisine par des parties ne résidant pas dans l'espace communautaire, suivant l'autonomie relative de leur commune volonté. De plus, soulignons que les centres d'arbitrage sont des institutions à « statut privé » et n'ont pas une personnalité juridique propre. Cette restriction juridique de leur qualité les expose à des poursuites judiciaires devant les juridictions compétentes lorsque le statut leur conférant une autonomie ou une personnalité juridique, ne leur a pas été accordé ou attribué, par l'institution étatique compétente de son ressort territorial. Il s'agit ici, en l'espèce, de leur responsabilité civile délictuelle. * 79 L'article 15 du Traite qui dispose que : « les pourvois en cassation... sont portés devant la cour commune de justice et d'arbitrage, soit par l'une des parties à l'instance, soit sur renvoi d'une juridiction nationale statuant en cassation saisie d'une affaire soulevant des questions relative à l'application des Actes uniformes ». * 80 Société Soccia, Revue camerounaise de droit des affaires, janvier-février 2001, n° 12, Ohada.com, consulté le 29 juin 2012. * 81 C.A. Port-Gentil, 28 avril 1999, Société E.F.G., Penant 2001, p.144, Ohada.com /Ohadata j-02-151. * 82 C.A. Niamey, 8 décembre 2000, Sanak Dan Nona c/ Hamidou Abou, Ohada.com/Ohadata j-02-33. |
|