PARAGRAPHE II : L'exigence de légitimité de
l'autorité légale
La légitimité de l'autorité suppose sa
compétence pour donner l'ordre dont l'exécution est
sollicitée. Il est ainsi évident que si un juge d'instruction est
compétent pour délivrer un mandat d'arrêt, un tel ordre ne
saurait émaner d'un préfet. Ce problème de
compétence est en réalité lié à celui de la
légalité ou de l'illégalité de l'ordre. Le concept
de légitimité de l'autorité publique est très
embarrassant. En effet, l'embarras vient de ce que certaines autorités
privées sont dites légitimes. C'est le lieu de signaler que ces
dernières n'ont néanmoins aucun privilège
d'obéissance (A). Mais, le cas des fonctionnaires de
fait ou à la retraite reste un peu problématique
(B).
A- L'exclusion de l'autorité privée ou
conventionnelle
76 C.S. Arrêt n°4 du 7 octobre 1960,
inédit.
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Même si la loi parle souvent de légitimité
en faisant allusion à l'autorité du père ou encore de
l'employeur, ne perdons pas de vue la précision que seule la
légitimité de l'autorité publique plus haut définie
est capable de justifier l'obéissance qui conduit à
l'irresponsabilité. Dans ce sens, Ortolan77 souligne encore
qu'on parle de « commandement de l'autorité légitime
lorsqu'une personne accomplit un acte tombant sous le coup de la loi, non de
son propre mouvement mais parce qu'elle en a reçu l'ordre de la part
d'un supérieur auquel elle doit obéissance. Tel est le cas du
simple citoyen obéissant à l'injonction d'un officier de police,
ou encore, d'un soldat de 2ème classe exécutant
l'ordre donné par son capitaine ». C'est pourquoi le code
pénal camerounais parle d'obéissance à l'autorité
légale comme excuse absolutoire78.
Nous avons vu que l'autorité correspond à une
valeur reconnue et attribuée ou conférée.
Premièrement, la légitimité est la qualité
d'être conforme aux aspirations des dirigeants donc de l'Etat, notamment
sur son origine et sa forme, ce qui lui vaut l'assentiment
général et l'obéissance spontanée. Ce qui nous
amène à comprendre que les pouvoirs de l'employeur viennent du
fait qu'il ait eu l'initiative de créer son entreprise et jamais du
désir de l'Etat d'accomplir un service public. Deuxièmement, la
légitimité de l'autorité suppose que cette autorité
soit compétente pour donner l'ordre en exécution duquel l'acte
sera commis. Ce qui n'est pas le cas pour le chef de famille dont le pouvoir
reste restreint au cadre de la famille dont il est le chef. C'est pourquoi le
fils qui se trouve sous l'autorité de son père n'est pas en droit
d'être exonéré parce qu'il lui a obéi : c'est le cas
de NGUEMO Evariste, qui sur instruction et ordre de son père SILATSA
Joseph, est allé au domicile de ses victimes proférer des menaces
de mort contre elles, les sommant de libérer les lieux disputés
avec son père79. Dans le même ordre d'idée, NJI
Patricia, épouse de NENTSIA Rudolf, a, sur instruction et directive de
ce dernier, déposé une plainte contre LESSOMO Lot pour
77Joseph Louis Elzéar Ortolan, né le
21 août 1802 à Toulon et mort le 27 mars 1873 à Paris, est
un juriste français. Joseph Ortolan étudie le droit à
Aix-en-Provence et à Paris et acquiert rapidement une
notoriété publique grâce à la publication de deux
ouvrages : Explication historique des institutes de Justinien (1827)
et Histoire de la législation romaine (1828). D'abord assistant
libraire à la Cour de cassation, il est promu après la
Révolution de 1830 au rang de secrétaire général.
Il est également appelé à donner des cours de droit
constitutionnel à l'Université de la Sorbonne, et en 1836, il
commence à donner des cours de droit pénal comparé
à l'Université de Paris. Il publie de nombreux ouvrages sur le
droit constitutionnel et le droit comparé.
78 V. Art. 83 C.P.
79T.P.I. de Dschang, jugement n°453/COR du 20
août 2010. Affaire MP et NEBOGA DJEUJIOHO Mathieu, TEMOU Maurice c/
SILATSA Joseph et NGUEUMOU Evariste. Inédit.
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vol de poulets. Lors de la confrontation, elle n'a pas pu
apporter la preuve de ses allégations, ce qui est constitutif de
diffamation. Par voie de citation directe, LESSOMO se retourne contre elle. Au
tribunal, le juge lui rappelle que son époux n'est pas une
autorité publique et que ses ordres, exécutés engagent la
responsabilité pénale de l'obéissant80
Il faut noter qu'il y a plusieurs formes d'autorité
privée : de l'autorité personnelle, parentale, éducative
à l'autorité politique, morale, spirituelle.
Pour que l'acte de l'autorité soit accepté ou
alors couvert par la loi, il faut qu'il soit non seulement appliqué de
façon exemplaire, mais surtout que cette autorité soit publique ;
c'est seulement dans ces conditions que l'autorité se justifie et
s'accrédite par sa légalité à produire et maintenir
des effets de droit. L'autorité a donc obligation de refaire sans cesse
la preuve de sa légitimité.
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